La Cour pénale internationale commence son enquête sur les crimes d'Israël contre le peuple palestinien

Le 3 mars, la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye a annoncé qu'elle débutera son enquête sur la « situation en Palestine ». L'enquête de la CPI est le résultat de requêtes des Palestiniens, qui sont devenus un « État partie » de la CPI en 2015.

À la suite de cette requête en 2015, la procureure en chef de la CPI, Fatou Bensouda, a commencé un examen préliminaire de la « situation en Palestine ». Après une enquête approfondie, elle a conclu, en décembre 2019, qu'elle était convaincue parce qu'il y avait des preuves suffisantes que des crimes de guerre ont été commis dans quatre aspects de l'enquête, soit : 1) la guerre d'Israël contre Gaza en 2014; 2) les « colonies » illégales en Cisjordanie, incluant Jérusalem-Est; 3) les morts de manifestants aux mains d'Israël à Gaza en 2018-2019; et 4) les tirs aveugles de roquettes par les Palestiniens.

Dans son annonce du 3 mars, madame Bensouda écrit : « La décision d'ouvrir une enquête fait suite à l'examen préliminaire minutieusement mené par mon bureau pendant près de cinq ans. Au cours de cette période, conformément à la pratique établie par le bureau, ce dernier a été en contact avec un grand nombre de parties prenantes et a notamment eu régulièrement des échanges fructueux avec des représentants des gouvernements palestinien et israélien. »

Elle souligne que l'enquête sera menée « en toute indépendance, impartialité et objectivité, sans crainte ni parti pris » et que son bureau « exercera ses responsabilités conformément à ces principes et de manière impartiale, comme il l'a fait pour toutes les situations dont il a été saisi par le passé ». Elle a ajouté : « En définitive, ce sont les victimes tant palestiniennes qu'israéliennes du long cycle de violence et d'insécurité, qui a causé de profondes souffrances et un terrible sentiment de désespoir quel que soit leur camp, qui doivent être au centre de nos préoccupations. »

La procureure en chef a aussi souligné qu'un soin méticuleux a été pris pour garantir la portée de l'enquête. À cet égard, afin « d'obtenir au préalable une décision judiciaire sur cette question, car il nous semblait crucial d'obtenir d'emblée ces précisions afin que les futures enquêtes reposent sur une base solide et éprouvée sur le plan juridique », elle a demandé à la Chambre préliminaire I de la CPI de se prononcer sur la question. Elle souligne que, le 5 février, « la Chambre a statué, à la majorité de ses juges, que la cour pouvait exercer sa compétence pénale dans la situation en Palestine et que sa compétence territoriale s'étendait à Gaza et à la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est », le territoire palestinien qu'Israël occupe depuis 1967.

La décision de la CPI est historique. Elle est saluée par le peuple palestinien et toutes les personnes éprises de justice et de paix au Canada et dans le monde qui ont pris position depuis plus de 70 ans à la défense des droits du peuple palestinien. Le ministre palestinien des Affaires étrangères a dit : « Ce geste attendu depuis longtemps sert l'effort vigoureux de la Palestine de réaliser la justice et la responsabilité en tant que bases indispensables à la paix. » Il a appelé à une conclusion rapide de l'enquête à la lumière des crimes continus des dirigeants de l'occupation contre le peuple palestinien, lesquels sont « permanents, systématiques et très étendus ».

L'État sioniste d'Israël a condamné la décision de la CPI. Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a dit : « La décision de la cour internationale d'ouvrir une enquête contre Israël aujourd'hui pour crimes de guerre est absurde. C'est de l'antisémitisme à l'état pur et le comble de l'hypocrisie. Israël a entrepris depuis une campagne internationale pour attaquer la décision de la CPI sous prétexte que la CPI « n'a pas la qualité pour agir. Pas de compétence. Pas de cause. »

Les États-Unis ont la même position. Le secrétaire d'État Anthony Blinken a dit : « Les États-Unis s'opposent fermement et sont profondément déçus de cette décision. La CPI n'a pas de compétence en cette matière. Israël n'est pas un État partie de la CPI et n'a pas donné son consentement à la compétence de la cour, et nous avons de sérieuses préoccupations en ce qui concerne la tentative de la CPI d'exercer sa compétence touchant le personnel israélien. Les Palestiniens n'ont pas la qualité d'un État souverain, ne sont pas qualifiés pour obtenir un statut de membre en tant qu'État, pour participer en tant qu'État à la CPI ou lui déléguer une compétence. »

La position du Canada sur cette question est aussi entièrement méprisable. Lorsque la Chambre préliminaire 1 de la CPI a rendu sa décision, le 5 février, que la procureure en chef pouvait procéder à l'enquête, le ministre canadien des Affaires étrangères Marc Garneau a dit : « [...] la position de longue date du Canada reste la même : le Canada ne reconnaît pas un État palestinien et ne reconnaît donc pas son adhésion aux traités internationaux, y compris le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Le Canada a exprimé cette position à la Cour à diverses occasions. » Une semaine plus tard, le 14 février, incité par Netanyahu, le premier ministre Justin Trudeau a écrit à la CPI pour exprimer l'opposition du Canada à sa décision.

Toutes les personnes éprises de paix et de justice doivent dénoncer la position sans principes du Canada à cette décision juste et légale de la CPI. La CPI est une cour des Nations unies qui a le mandat de poursuivre les individus accusés de perpétration de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre sur le territoire d'États parties du Statut de Rome, son traité fondateur. Israël, comme son parrain les États-Unis, n'est pas membre de la CPI, mais l'autorité palestinienne l'est. L'Autorité palestinienne a d'abord cherché à devenir un « État partie » de la CPI en 2009, mais celle-ci avait conclu au terme d'une délibération que le statut de la Palestine en tant qu'entité observatrice à l'ONU ne remplissait pas les critères juridiques pour se joindre à la cour. C'est seulement en novembre 2012, après que l'Assemblée générale des Nations unies a adopté, par une majorité écrasante, la Résolution 67/19 accordant « à la Palestine le statut d'État non membre observateur auprès de l'Organisation des Nations unies », que la Palestine a été admissible à se joindre au Statut de Rome. La résolution a été adoptée par un vote de 138 en faveur, 9 contre (dont le Canada) et 41 abstentions.

(Sources : Cour pénale internationale, l'ONU, The Guardian, Affaires mondiales Canada, Département d'État des États-Unis)


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 5 - 4 avril 2021

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