Défendons le droit des communautés autochtones d'exercer un contrôle sur leurs territoires ancestraux
Les communautés autochtones ont été touchées par près de 42 % des évacuations dues aux feux de forêt quoiqu'elles ne représentent que 5 % des gens vivant sur l'Île de la Tortue. Au cours de la saison des feux de forêt de 2023, jusqu'en juillet, 106 feux de forêt avaient frappé 93 Premières Nations, menant à 64 évacuations et touchant près de 25 000 personnes. Non seulement plusieurs maisons ont été détruites par le feu, mais le déplacement de leurs maisons et de leurs communautés prive les peuples autochtones et métis de leur moyen de subsistance, de leurs sources alimentaires et de leurs pratiques culturelles. De retour chez eux, les membres des communautés autochtones peuvent autant constater que leur maison a été détruite ou que leur environnement a été dévasté, avec des répercussions sur la chasse et la cueillette d'aliments et de remèdes sur leur territoire ancestral[1].
Plusieurs pompiers forestiers au Canada sont membres de nations autochtones et métisses et ils mettent leur vie en péril pour combattre les feux de forêt. Et pourtant, leurs communautés, qui sont souvent éloignées, peinent à avoir accès aux produits de base, aux services et aux autres ressources nécessaires à la prévention et à la résilience requises pour contrecarrer les feux de forêt et même pour combattre les feux qui les menacent directement.
Les feux de forêt ont de graves répercussions sur la santé des peuples autochtones. La fumée des feux de forêt est fortement associée à une croissance du taux de mortalité, selon l'Agence de la santé publique du Canada, ainsi qu'aux décès dus aux maladies respiratoires et cardiovasculaires, à l'exacerbation de l'asthme et de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BCO) et aux complications liées à la reproduction et au développement, telles que les nouveau-nés ayant un poids inférieur à la moyenne.
Parmi les mesures immédiates exigées par les nations autochtones figurent l'approvisionnement en équipement de pompier pour les communautés, la pleine mobilisation des pompiers autochtones et des mesures immédiates pour contenir les feux avant qu'ils ne menacent les communautés. Elles revendiquent aussi des postes permanents de Gardiens autochtones dans les communautés et d'autres mesures qui restaurent pleinement leur capacité d'exercer la prise de décision conformément à leur rôle en tant qu'intendants de la terre et au savoir et aux pratiques acquises au cours des milliers d'années pendant lesquelles elles ont appris à vivre avec les feux de forêt.
Partout en Colombie-Britannique, dans les prairies et dans les Territoires du Nord-Ouest, il y a eu plusieurs évacuations pendant la saison des feux de forêt de 2024 touchant des dizaines de milliers de personnes des communautés des Premières Nations.
Les Territoires du Nord-Ouest
Jusqu'au 18 septembre, dans les Territoires du Nord-Ouest, il y a eu 171 feux de forêt. La superficie incendiée est de 1 671 421 hectares.
L'Alberta
En Alberta, la nation crie de Little Red River a été forcée d'évacuer pour une deuxième année de suite. La nation comprend près de 5500 membres et est composée de trois communautés : Garden River, Fox Lake et Prairie John D'Or, situées à environ 560 kilomètres au nord d'Edmonton. Garden River a reçu l'ordre d'évacuation le 10 juillet et Prairie John D'Or et Fox Lake le 20 juillet. L'année dernière, Fox Lake a perdu plus de 200 structures, dont 100 maisons, une épicerie et une station d'épuration. La réserve de Fox Lake est accessible seulement par chaland l'été, et est vulnérable aux fluctuations d'eau et aux routes glacées l'hiver, ce qui complique l'approvisionnement de la communauté. Près de 525 personnes vivent dans des chambres d'hôtel à High Level et à Fort Vermilion, ou ont loué des logements, des camps ou des mini-maisons à Fox Lake depuis 2023 en attendant la reconstruction de leurs maisons.
Le Saskatchewan et le Manitoba
Plus de 3000 membres des Premières Nations au Saskatchewan et au Manitoba ont été forcés d'évacuer leurs maisons cette année en raison des feux de forêts.
En réponse au feu de Flanagan, en Saskatchewan, qui a commencé au début de juillet, l'Agence de sécurité publique du Saskatchewan (ASPS) a rendu la situation encore plus difficile en omettant d'appeler au service les pompiers des Premières Nations. Le chef Peter Beatty et le Grand Conseil de Prince Albert (GCPA) ont publié un communiqué le 14 août informant que l'ASPS avait refusé d'approuver l'appel en service de centaines de pompiers des Premières Nations qui auraient pu aider à éteindre les feux avant qu'ils ne se répandent. « Pourquoi avez-vous permis qu'un incendie se rapproche à ce point de la communauté, devenant un grave problème, pour ensuite tenter de le gérer. Rendu là, ce n'est plus gérable », Beatty a dit à la CBC. Selon lui, la gestion des feux de forêt de la province était une politique de « laissez-les brûler ». « Il y a des centaines de pompiers qualifiés des Premières Nations et ils sont prêts et enthousiastes à aider, mais l'ASPS a refusé de les engager, prétendant que c'était trop dangereux. Leur raisonnement ? Un manque d'équipement de protection individuelle », lit-on dans le communiqué.
D'autres communautés ont aussi été menacées au cours de cette saison de feux de forêts. Le chef du Grand conseil de Prince Albert Brian Hardlotte a dit de la gestion de la province qu'elle était inadéquate et négligente, reflétant un mépris envers les communautés autochtones dans le nord du Saskatchewan, une situation qui perdure depuis deux décennies, a-t-il dit.
« Il ne s'agit pas seulement d'une lacune politique, mais de leadership et de responsabilité morale du gouvernement provincial. Prioriser des considérations économiques plutôt que des vies humaines et la protection environnementale est à la fois une vision à court terme et un danger, dit Brian Hardlotte. Ce ne sont pas que des forêts éloignées. Ce sont nos maisons, notre terre sacrée, notre avenir. Les laisser brûler sans tout faire pour les éteindre est une trahison impardonnable de notre confiance. »
Près de 2400 membres de la nation crie Bunibonibee (anciennement la Maison Oxford) dans le nord-est du Manitoba, ont été forcés d'évacuer en août. La nation crie Bunibonibee est située à près de 577 kilomètres au nord de Winnipeg, et à près de 185 kilomètres au sud-est de Thompson. Les gens ont été évacués au moyen de petits avions de ligne et d'un avion militaire Hercule. Le fait que peu de membres de l'équipage d'évacuation ne parlaient le cri a rendu l'évacuation encore plus difficile pour les nombreuses personnes qui ne parlent que le cri, a dit le chef Hart. Celui-ci affirme n'avoir jamais vu un feu comme celui-là. La combinaison d'arbres secs rapprochés et de forts vents a occasionné une « croissance explosive » des flammes.
Les peuples autochtones sont les gardiens et les intendants ancestraux de la terre. Ils savent ce qui est requis. Le problème est plutôt le refus de l'État canadien de reconnaître la souveraineté autochtone et les relations de nation à nation avec les peuples autochtones.
Note
1. Rapid Review : An intersectional analysis of the disproportionate health impacts of wildfires on diverse populations.
(Avec des informations de CBC, Global News, Saskatoon Star-Phoenix)
Cet article est paru dans
27 septembre 2024
Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/LA2024/Articles/LA54186.HTM
www.pccml.ca • redaction@pccml.ca