Les résultats des tests sont utilisés pour faire croire que les grèves nuisent à la santé publique

– Enver Villamizar –

Le 28 septembre, le lendemain de l'annonce des résultats du vote des membres de la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (FEESO) sur le parcours de l'arbitrage de différends exécutoire, le gouvernement de l'Ontario a publié un communiqué en réponse aux« résultats de l'évaluation annuelle des élèves » de l'Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (OQRE). Les résultats sont les notes obtenues aux tests normalisés de mathématiques et de littératie de la maternelle à la 12e année par les élèves l'année précédente, en l'occurrence en 2022-23. Le gouvernement affirme que les progrès enregistrés en lecture, en écriture et en mathématiques sont dus à ses « vigoureux efforts veillant à ce que les enfants restent en classe et bénéficient du retour aux éléments fondamentaux ». Bien entendu, le communiqué de presse du gouvernement n'a pas pour objectif de fournir des informations sur la nature et la cause de ces améliorations, mais plutôt de s'en servir pour faire passer un message.

Le communiqué de presse indique ce qui suit : « Ces résultats prouvent que le plan de l'Ontario pour une année scolaire stable et sans interruption où l'accent est mis sur le retour aux éléments fondamentaux et l'amélioration des compétences de base fonctionne », ajoutant qu'« il reste cependant du travail à faire pour que les élèves continuent d'avoir de bons résultats ». Il ne précise pas quel travail il reste à faire exactement.

Si l'on se fie aux commentaires du ministre de l'Éducation Stephen Lecce à l'effet que les autres syndicats de l'éducation doivent suivre le parcours de la FEESO, qui a renoncé à son droit de grève et opté sur une base volontaire pour l'arbitrage de différends exécutoire, « le travail qu'il reste à faire » est d'amener les autres syndicats de l'éducation à renoncer à leur droit de grève, soit volontairement, soit sous la menace du recours à la force.

Plus loin dans le communiqué, on peut lire : « Comme le montrent les résultats aux tests de l'OQRE, le gouvernement continue de faire valoir qu'un apprentissage stable en personne, nouvellement recentré sur l'enseignement de la littératie et des disciplines STIM [Sciences, technologie, ingénierie et mathématiques] conduira à une santé mentale, développementale et physique positive [notre souligné] ainsi qu'à la réussite scolaire à long terme. L'Ontario veille à ce que les élèves obtiennent leur diplôme en ayant acquis les compétences de base nécessaires pour exercer les emplois de demain. »

Le langage utilisé laisse entendre que le gouvernement essaie en fait de démontrer que les grèves – il préfère parler d'« interruptions » – nuisent à la « santé mentale, développementale et physique » des élèves. Ce qu'il veut faire valoir, c'est que le droit de grève des enseignants et des travailleurs de l'éducation devrait être interdit parce que leurs actions collectives représentent un danger pour la santé publique, en l'occurrence la « santé mentale, développementale et physique » des jeunes.

Les tribunaux ont statué que le critère le plus important pour qu'un gouvernement déclare des travailleurs essentiels est que s'ils faisaient grève, cela mettrait en danger la santé publique. Cette position du gouvernement intervient alors qu'il procède à des coupures importantes dans l'éducation et tous ceux qui travaillent dans les écoles savent que ces coupures constituent des violations du droit des jeunes à l'éducation et au soutien dont ils ont besoin pour se développer sainement dans leur corps et dans leur esprit. Les besoins dans les écoles dépassent largement les fonds disponibles et ce sont les éducateurs qui sont forcés d'essayer de répondre à ces besoins sans les ressources nécessaires, ce qui est insoutenable. Que le gouvernement se serve de ce problème grave pour atteindre ses fins est pour le moins honteux.

Ce discours doit être contesté par tous car il montre le véritable objectif du gouvernement, qui est de continuer à miner l'éducation publique en éliminant la capacité de ceux qui sont en première ligne de sa mise en oeuvre à dire Non !, jusqu'à et y compris par la grève. Les enseignants et les travailleurs de l'éducation qui ont voté en faveur de la proposition de la FEESO relative à l'arbitrage de différends exécutoire ne l'ont pas fait parce qu'ils pensent que le droit de grève nuit aux jeunes. Loin de là ! Nombreux sont ceux qui ne font pas confiance au gouvernement pour le respect des normes, que ce soit dans les négociations contractuelles ou dans l'éducation en général. Beaucoup n'ont pas voté parce qu'ils refusent de renoncer au droit de grève mais espèrent néanmoins que l'arbitrage de différends exécutoire permettra d'avancer face à l'intransigeance du gouvernement. C'est l'argument qui leur a été présenté par leur syndicat et le résultat du vote donne au syndicat la possibilité d'essayer cette méthode pour sortir du refus de négocier du gouvernement.

Il est d'une importance critique qu'on ne laisse pas le gouvernement utiliser le vote de la FEESO pour revendiquer un mandat pour toute initiative visant à limiter le droit de grève dans l'éducation au nom de la protection de la santé des jeunes de l'Ontario.


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Numéro 57 - 4 octobre 2023

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