Les défis du mouvement ouvrier

Les régimes de retraite des travailleurs ne doivent pas servir à financer l'antisyndicalisme

– Empower Yourself Now –

Le Conseil provincial de la FEESO/OSSTF debout en signe de soutien aux travailleurs de Sel Windsor, 2 juin 2023

Le 20 août 2023, la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'Ontario (FEO) tiendra sa réunion d'été du Conseil des gouverneurs à Toronto. L'un des principaux sujets de préoccupation qui sera abordé lors de cette réunion est l'investissement important du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario (RREO) dans Stone Canyon Industries Holdings Inc. (SCIH), directement et par l'intermédiaire d'une des filiales de la SCIH, SCI Salt, qui se livre à des activités antisyndicales à Sel Windsor, à Windsor, en Ontario.

La FEO est un organisme composé de 40 représentants de toutes les fédérations d'enseignants de l'Ontario. Il s'agit de l'Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), de la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEO), de l'Association des enseignantes et des enseignants catholiques anglo-ontariens (OECTA), de la Fédération des enseignantes et des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (FEESO) ainsi que des Enseignantes et enseignants retraités de l'Ontario (ERO).

La FEO est régie par la loi ontarienne et, en 1991, elle a formé un partenariat avec le gouvernement de l'Ontario pour superviser le RREO. Cela s'est produit alors que le gouvernement de l'Ontario restructurait l'État pour se décharger de ses responsabilités envers le régime de retraite des enseignants de l'Ontario, dont il était le seul à assumer le contrôle et la responsabilité jusqu'en 1989. Dans le cadre de ce partenariat, en échange de l'abandon par le gouvernement de sa responsabilité exclusive à l'égard du régime, la FEO a obtenu un certain contrôle sur celui-ci en choisissant les membres de son conseil d'administration[1].

Depuis un certain temps, et avec une fermeté croissante, les actionnaires du RREO, notamment les présidents de toutes les fédérations d'enseignants, demandent au RREO d'utiliser ses investissements dans la SCIH pour mettre fin aux attaques contre les travailleurs du sel canadiens et les ressources essentielles qu'ils extraient et transforment. Le président et chef de la direction du régime de retraite a d'abord répondu à ces préoccupations en affirmant que le RREO n'intervenait pas dans les activités quotidiennes des entreprises dans lesquelles il investissait et ne détenait pas de participation majoritaire. Cette réponse a été rejetée par les enseignants, qui ont souligné que le RREO avait un siège au conseil d'administration de Stone Canyon, ce qui fait qu'il est directement impliqué dans les activités de la société. De plus, alors que le RREO ne cesse de répéter qu'il utilise ses investissements pour essayer d'avoir un impact environnemental et social positif, pour une raison quelconque, arrêter le démantèlement des syndicats contre les travailleurs canadiens n'est pas considéré comme nécessitant des mesures concrètes.

Le président et chef de la direction du régime de retraite a ensuite répondu aux présidents des fédérations d'enseignants, qui ont signé une lettre commune pour exprimer leurs inquiétudes concernant les investissements du régime. Il leur a répondu que le RREO soutenait la négociation collective et le droit de grève, et. qu'il était heureux que l'entreprise et les travailleurs négocient. En fait, l'entreprise, que le RREO aide à gérer, ne négociait rien du tout, mais continuait de maintenir ses demandes antisyndicales, notamment par l'abandon du droit d'ancienneté, la sous-traitance lors de la reprise de la production de sel dans les installations, une fois la grève terminée, l'affaiblissement de la capacité du syndicat à représenter ses membres et la compromission de la santé et de la sécurité des préposés à l'entretien[2]. C'est pourquoi les travailleurs de la mine à qui ces concessions ont été présentées dans la récente entente de principe ont voté Non !

La FEO et ses fédérations membres doivent relever le défi de défendre les valeurs de leurs membres en refusant que leurs pensions soient utilisées pour financer l'attaque d'une société de portefeuille américaine contre les travailleurs canadiens, leur syndicat et les ressources naturelles du Canada. Le RREO est un atout énorme pour les enseignants et la population de l'Ontario, car il permet d'investir dans des projets et des activités qui on tun socialement responsables. Les enseignants sont très fiers de leur régime de retraite parce qu'il se présente comme un investisseur responsable qui utilise ses investissements qui auront une incidence positive sur l'environnement naturel et social. Cependant, ce n'est pas le cas actuellement. Le RREO investit massivement dans diverses activités antisociales, de la privatisation des soins de santé, des soins aux aînés, de l'éducation et des infrastructures publiques au Canada et à l'étranger, aux armes nucléaires françaises et, comme en témoignent ses investissements dans la SCIH, à la monopolisation de ressources naturelles essentielles et les attaques contre les travailleurs de ces industries et, par extension, les communautés dans lesquelles elles sont implantées.

Trouver des moyens d'obliger les dirigeants et le conseil d'administration du RREO à rendre des comptes pour leurs investissements dans le démantèlement des syndicats au Canada contribuera concrètement à défendre des travailleurs canadiens et le Canada dans son ensemble. Une telle contribution concrète consisterait pour le RREO à dire clairement à Stone Canyon que si elle ne renonce pas à ses exigences antisyndicales et ne négocie pas une convention qui respecte le syndicat des travailleurs et les normes établies au cours d'un siècle de production de sel, ou si elle ne vend pas Sel Windsor à quelqu'un qui le fera, alors le RREO vendra ses investissements dans la SCIH. Il est irrationnel pour un régime de retraite public canadien d'investir dans de telles activités.

En prenant clairement position contre l'utilisation du régime de retraite des enseignants pour les activités antisyndicales de Stone Canyon, la FEO peut contribuer à défendre la dignité de tous les travailleurs canadiens et faire comprendre au gouvernement de l'Ontario, son partenaire dans la supervision du régime de retraite, que le diktat ne sera pas accepté à aucun niveau contre les travailleurs canadiens. Cela permettra également aux enseignants de garder la tête haute alors qu'ils se préparent pour leurs propres luttes dans la nouvelle année scolaire. Ils sont sans convention collective en Ontario depuis le 31 août 2022 à cause de l'utilisation par le gouvernement de sa majorité pour dicter des changements au système d'éducation de l'Ontario et de son refus de prêter attention aux revendications des enseignants et de négocier de bonne foi.

Notes

1. La FEO et le gouvernement de l'Ontario choisissent chacun cinq personnes pour siéger au conseil d'administration du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario. Ces partenaires choisissent conjointement le président du régime. Selon la FEO, le gouvernement et la FEO « déterminent ensemble les niveaux des prestations, les taux de cotisation et la fréquence du dépôt des évaluations actuarielles du RREO ». Les personnes nommées au conseil d'administration du régime ne proviennent pas des fédérations d'enseignants, mais la FEO a fixé les critères suivants : « En vertu des statuts de la FEO, une administratrice ou un administrateur doit posséder une connaissance générale des régimes de retraite et une expertise particulière en ce qui concerne les intérêts du personnel enseignant. Une administratrice ou un administrateur doit également avoir une expérience générale des régimes de retraite et une expertise particulière concernant la structure et les prestations d'un régime de retraite. De plus, au moins deux administratrices ou administrateurs doivent posséder une expérience générale des régimes de retraite et une expertise financière particulière en ce qui a trait à la retraite. »

La FEO a également son propre Comité du régime retraite, composé de membres du personnel de la FEO. La FEO et chacune de ses filiales, soit l'AEFO, la FEÉO, l'OECTA et la FEÉSO, nomment chacune une représentante ou un représentant au Comité. Les Enseignantes et les enseignants retraités de l'Ontario (ERO) y ont également une représentante ou un représentant. Ce comité « examine les questions relatives à la retraite qui lui sont soumises par le Bureau de la FEO. Les membres du Comité effectuent des recherches et proposent des recommandations concernant les politiques au Bureau de la FEO et aux membres de la FEO qui siègent au Comité des partenaires ».

2. « Tous avec les travailleurs de Sel Windsor ! Négociez, ne dictez pas ! », Empower Yourself Now !, 28 juillet 2023.


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Numéro 43 - 10 août 2023

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