Les travailleurs migrants intensifient leur campagne pour un statut pour toutes et tous

Plus de 300 personnes ont participé à une assemblée sur la régularisation organisée en ligne par le Réseau des droits des migrants le 14 juin. La réunion avait pour but de mobiliser et de concentrer les actions pour demander au parlement d'adopter un programme de régularisation « Un statut pour tous » avant la suspension de la session pour l'été. Des personnes menacées d'expulsion, des travailleurs sans papiers, des réfugiés, des étudiants internationaux, des défenseurs des droits des migrants et d'autres personnes ont participé à cet événement informatif et militant.

Dans son introduction, le directeur général de l'Alliance des travailleurs migrants pour le changement, Syed Hussan, a souligné qu'en décembre 2021 le premier ministre Trudeau s'était engagé à soutenir un programme de régularisation pour tous les travailleurs sans papiers, migrants et réfugiés. Depuis, cependant, très peu a été fait.

Syed Hussan a souligné que toutes les concessions obtenues par le mouvement des droits des migrants ne l'ont pas été grâce aux largesses du gouvernement, mais parce que les travailleurs migrants ont été une force organisée, défendant leurs droits d'une seule voix, dans le cadre de la lutte pour les droits de toutes et tous.

Syed Hussan a déclaré qu'au cours des trois dernières années, plus de 100 actions ont été organisées. Celles-ci comprenaient des rassemblements, des visites aux bureaux des ministres, des pétitions, des appels téléphoniques et même une rencontre en personne entre le ministre de l'Immigration Sean Fraser et 150 personnes sans-papiers qui ont exigé qu'il agisse pour protéger leurs droits.

Ces actions pour exiger un statut complet, la dignité et l'égalité pour tous ont permis de maintenir la question des droits des migrants à l'ordre du jour des affaires politiques au niveau national, de gagner le soutien du public et de faire pression sur le gouvernement libéral pour qu'il tienne l'engagement de Justin Trudeau. Syed Hussan a déclaré : « Nous savons qu'ils discutent de cette question au sein du cabinet. Nous demandons au premier ministre Trudeau d'agir maintenant pour tenir sa promesse. »

L'assemblée était organisée en deux tables rondes. Dans la première, quatre défenseurs des droits des migrants ont parlé de leur expérience dans la lutte pour les droits des migrants au pays. Il s'agit de Jane, une demandeuse d'asile menacée d'expulsion, de Daniel De Leon, président de Migrante Canada – une organisation nationale de défense de la communauté philippine au Canada – dont l'ordre d'expulsion a été suspendu pour le moment, de Hardy Anne, une militante de longue date pour les droits des migrants dans la région de Montréal, et de Claudia, une travailleuse migrante chinoise.

Une pause a suivi cette table ronde, au cours de laquelle les participants à l'assemblée ont été invités à appeler, envoyer des SMS ou des courriels au premier ministre, au ministre de l'Immigration, au ministre de la Sécurité publique et à d'autres ministres pour exiger un statut pour tous sans exception.

La deuxième table ronde a abordé la question de l'exploitation financière et de la maltraitance dont sont régulièrement victimes les travailleurs migrants en raison de leur statut temporaire ou de l'absence de statut. L'appel d'OJ, un travailleur jamaïcain, a été particulièrement intéressant. OJ faisait partie d'un groupe de travailleurs jamaïcains courageux qui ont écrit une lettre au gouvernement jamaïcain pour lui demander d'intervenir afin de l'aider à mettre fin à l'exploitation brutale et aux mauvais traitements dont sont victimes les travailleurs de Jamaïque et d'autres pays dans le cadre du Programme des travailleurs agricoles saisonniers du Canada.

OJ a parlé de son arrivée au Canada pendant la pandémie de Covid et a été révolté par les conditions déplorables de logement, de nourriture et de traitement dans la ferme où il travaillait. Il a souligné que les travailleurs agricoles migrants sont confrontés à des conditions brutales et à des mauvais traitements qui s'apparentent à de l'esclavage, et qu'ils sont peu protégés par la loi. Lui et d'autres travailleurs jamaïcains s'attendaient à ce que des mesures soient prises à la suite de leur lettre au ministre jamaïcain, mais peu de choses ont changé.

Cependant, OJ a souligné que la lettre a permis de sensibiliser davantage le Canada et la Jamaïque au sort des travailleurs agricoles saisonniers et a mis en lumière les problèmes systémiques qui créent les conditions auxquelles les travailleurs migrants sont confrontés au Canada. Les participants à l'assemblée ont été informés qu'en raison de son action, OJ a été puni par le gouvernement canadien, qui l'a privé de la possibilité de travailler à nouveau au Canada.

Un jeune travailleur, Divyansh Kamboj, a déclaré avoir été exploité dans une station-service où il a travaillé pendant plus de deux ans et a été payé moins de 10 dollars de l'heure au cours de cette période. Aujourd'hui, grâce au soutien de l'Alliance des travailleurs migrants pour le changement, Divyansh Kamboj se bat pour récupérer les 40 000 dollars que lui doit le propriétaire de la station-service. Les travailleurs migrants sont souvent isolés et ont peur de se battre, a-t-il dit, mais c'est en se joignant à d'autres et en luttant collectivement qu'il est possible d'obtenir justice et dignité.

L'assemblée a également entendu le porte-parole d'un groupe de travailleurs de la pêche au Nouveau-Brunswick qui ont été privés de leur salaire pendant trois semaines l'année dernière à cause de la réduction de la saison de pêche du homard. Ces travailleurs, dont beaucoup de femmes, se sont battus contre leur employeur. En s'unissant, ils ont obtenu leurs arriérés de salaire et quelques concessions sur leurs conditions de travail, ainsi qu'une prime et des contrats leur garantissant du travail pour la saison suivante.

Ces victoires sont le fruit d'une résistance organisée, un thème majeur qui a été abordé tout au long de la réunion.

Doris Gatawa, une aide familiale philippine travaillant à Vancouver et membre active du Comité pour les droits des travailleurs domestiques et des aides familiaux (CDWCR), a également pris la parole. Doris Gatawa a souligné que les politiques d'immigration du Canada concernant les travailleurs migrants sont devenues de plus en plus arbitraires, inhumaines et racistes au fil du temps. Elle a fait remarquer qu'il y a 100 ans, lorsque les travailleurs domestiques venaient de Grande-Bretagne et d'autres pays d'Europe du Nord, ils arrivaient comme immigrants reçus.

Aujourd'hui, lorsque les travailleurs domestiques viennent des Philippines, du Guatemala, du Mexique, de l'Indonésie et d'autres pays, tout est fait pour que leur statut reste temporaire et pour les priver du droit à la résidence permanente au Canada, même après avoir vécu ici pendant de nombreuses années. Il faut que cela change, a souligné Doris Gatawa, et c'est grâce à des organisations comme le CDWCR qui se battent pour les droits des travailleurs domestiques et des aides familiaux que le changement se produira.

L'Assemblée de régularisation a également eu des nouvelles de la ligne de front, d'un groupe d'étudiants internationaux indiens campés devant l'Agence canadienne des services frontaliers à Brampton. Ils ont manifesté pendant 18 jours, 24 heures sur 24, pour empêcher l'expulsion d'une centaine d'étudiants du Pendjab victimes d'une escroquerie à l'inscription menée par des « recruteurs » frauduleux. Ces derniers demandaient aux étudiants de fortes sommes d'argent pour s'inscrire dans des collèges et universités du Canada et leur fournissaient de fausses lettres d'admission.

Lovepreet Singh, qui devait être expulsé le 12 juin, s'est adressé à la réunion par l'intermédiaire d'un réseau social. Il a déclaré qu'il était inacceptable que lui et ses pairs aient été maltraités par ces recruteurs sans scrupules qui leur ont soutiré des dizaines de milliers de dollars, et qu'ils doivent à nouveau faire face à de mauvais traitements au Canada. Il a été annoncé à l'Assemblée que le gouvernement fédéral avait suspendu l'ordre d'expulsion et qu'il allait enquêter sur la situation.

La réunion s'est terminée sur une note positive : le Réseau des droits des migrants a annoncé son intention d'intensifier ses actions au cours des prochains jours. Il s'est engagé à continuer à s'organiser et à lutter pour les droits des centaines de milliers de travailleurs sans papiers, de réfugiés et de travailleurs migrants qui sont victimes de la politique raciste et arbitraire du Canada en matière d'immigration et de réfugiés. Les participants à l'assemblée se sont engagés à lutter au-delà de cette session parlementaire jusqu'à l'obtention d'un statut et de justice pour toutes et tous.


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Numéro 31 - 26 juin 2023

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