Campement de nuit à Montréal pour revendiquer un statut

Dans le cadre de la journée d'action pancanadienne organisée par le Réseau pour les droits des migrants, un campement de nuit a été installé dans la soirée du 18 mars devant la Commission sur l'immigration et les réfugiés du gouvernement fédéral à Montréal, pour exiger un « programme de régularisation pleinement inclusif, sans laisser personne de côté, MAINTENANT ».

« Depuis plusieurs semaines, les médias ne cessent de parler du chemin Roxham d'une manière qui offre un terrain fertile aux discours racistes et xénophobes qui blâment les migrants pour tous les problèmes de la société », écrit Solidarité sans frontières dans un communiqué de presse annonçant l'événement. « De cette façon les riches essayent de détourner l'attention, transformant les personnes migrantes en bouc émissaire et créant des divisions entre les personnes exclues de la richesse et des privilèges. » L'organisme ajoute que « les sans-papiers sont laissés dans l'obscurité et le froid d'une exclusion qui tue sans humanité – aux frontières, dans les rues, lentement après des années de précarité, de séparation de nos familles, et de travail physiquement dur et d'exploitation, de manque de soins de santé et dans la peur et le stress quotidien d'être arrêtés, détenus et expulsés. »

« Nous ne quittons pas nos pays pour le plaisir de migrer vers le Canada. Nous venons au Canada pour nous réfugier à cause de divers problèmes. [...] Le système d'immigration injuste nous rend vulnérables », disent ceux qui sont laissés sans statut.

« Nous avons attendu un tel programme de régularisation depuis plus de 14 mois maintenant ; depuis que Justin Trudeau a mandaté le ministre de l'Immigration Sean Fraser de régulariser les personnes sans papiers. Nous revendiquons aussi la résidence permanente pour toute personne migrante.

« Nous faisons ces demandes en solidarité AVEC les sans-abris, toute personne qui a subi le profilage racial, les travailleurs exploités de n'importe quelle origine, avec les peuples autochtones dont les terres ont été volées et CONTRE ces personnes qui nous divisent, nous exploitent et nous utilisent à leurs fins financières et politiques. »
 

Témoignages de participants au campement de nuit

De nombreux militants engagés dans la lutte pour la défense des droits des migrants et pour un statut pour tous sont venus au camp pour encourager les campeurs de nuit, partager leurs expériences et participer aux activités organisées pour l'occasion. Voici quelques témoignages enregistrés lors de l'événement.

« Pendant la pandémie, c'était très difficile, car notre horaire de travail commençait à minuit, alors que le couvre-feu était en place à partir de 20 heures. Nous vivions dans la crainte d'être arrêtés par la police. C'est très utile de vivre ici, même si nous préférerions retourner dans notre pays, où il y a beaucoup d'insécurité. À notre âge, il serait très difficile de trouver un emploi et notre avenir serait très incertain. C'est pourquoi nous voulons un statut pour tous, dans l'espoir que ... nous puissions être régularisés. Si nous sommes régularisés, nous pourrons retrouver notre sérénité. Nous aurons droit aux soins de santé et nous aurons de meilleures possibilités de travail, ce qui nous permettra de nous épanouir pleinement en tant que personnes ».

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« Le premier ministre Trudeau avait annoncé un programme de régularisation pour tous les sans-papiers et les réfugiés refusés. Mais il a tardé à l'appliquer. De nombreuses personnes comme moi sont menacées d'expulsion. En fait, il y a plus de gens qui sont expulsés aujourd'hui qu'avant. [...] Nous, les immigrants sans papiers, avons besoin d'une résidence permanente et nous en avons besoin maintenant, sans aucune condition, afin que nous puissions être réunis avec nos familles et vivre une vie normale et en sécurité tout en continuant à apporter notre contribution à la société canadienne. Il ne suffit pas de nous donner un permis de travail. Un programme de régularisation doit nous permettre d'obtenir une résidence permanente. Toute autre solution est inacceptable et inhumaine, et n'est pas digne du Canada... »

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« Je suis arrivé du Maroc en 2020. J'ai été embauché par une entreprise canadienne alors que j'étais encore dans mon pays, pour venir travailler au Canada. Je suis donc venu ici avec un permis de travail et j'ai été approuvé lorsque je suis entré au Canada à l'aéroport. Je me souviens que lorsque je suis passé devant les services frontaliers pour compléter mes procédures d'arrivée, mon employeur a été appelé pour l'informer de mon arrivée. À ma grande surprise, j'apprends sur place de sa bouche que mon contrat avait été annulé. Il avait déjà licencié quatre autres employés. L'agent des services frontaliers a alors produit froidement un rapport disant que je dois quitter le territoire canadien. La nouvelle m'a complètement brisé. Je n'aurais jamais imaginé cela ! J'étais arrivé plein d'espoir pour changer la situation de ma famille. Mon rêve s'est transformé en un véritable cauchemar, en l'espace de quelques secondes. Pendant toutes mes démarches, j'ai fait tout selon les règles de l'art et je n'ai reçu aucune nouvelle de l'annulation de mon contrat, qui nécessitait une lettre d'invitation. [...]. Je ne savais pas quoi faire à ce moment-là.

« Tout s'est écroulé d'un coup, sans que personne ne comprenne ce que signifie investir dans un tel projet et les sacrifices qu'il faut consentir pour le réaliser [...] quitter son pays, être séparé de sa famille, de ses enfants, pour s'y rendre. J'ai dû quitter [...] mon ancien emploi. J'ai vendu des biens familiaux, qui étaient notre seule source d'argent stable. J'ai laissé ma femme enceinte et mes deux jeunes garçons [...] sous un toit hypothéqué, une famille financièrement dépendante de moi. Certains diront : 'Tu devrais rentrer chez toi et t'occuper de ta famille.' Avec tous les sacrifices faits par toute ma famille et la petite graine d'espoir que j'ai semée en eux, je ne peux pas reculer. C'est trop tard. Ils n'accepteront pas que je revienne les mains vides. Ils comptaient sur moi... »

(Photos : LML et Solidarité sans frontières)


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Numéro 17 - 3 avril 2023

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