Le gouvernement de l'Alberta ajoute les établissements de santé à sa loi sur les «infrastructures essentielles»


Des travailleurs de la santé manifestent devant l'hôpital Royal Alexandria à Edmonton,
le 26 octobre 2020, pour défendre leurs droits.

Le gouvernement Kenney de l'Alberta a annoncé qu'il allait ajouter les hôpitaux et les établissements de soins de santé aux « infrastructures essentielles » désignées par sa Loi 1 antiouvrière et antisociale, la Loi sur la défense des infrastructures essentielles,. Cette annonce intervient à un moment où les travailleurs de la santé ont averti qu'ils ne pourront pas empêcher l'effondrement du système de soins de santé qui a subi près de trois décennies d'assaut néolibéral. Ils ajoutent que le gouvernement doit immédiatement mettre en oeuvre les mesures que les travailleurs de la santé réclament. Le gouvernement ne se contente pas de faire la sourde oreille aux travailleurs, il étend ses pouvoirs arbitraires pour s'attaquer à leur droit de négocier leurs propres salaires et conditions de travail et au droit de la population d'avoir un système de soins de santé viable.

Le projet de loi 1 a été présenté en février 2020 comme une attaque directe contre les peuples autochtones ne faisant qu'un avec les Wet'suwet'en. En présentant le projet de loi 1, Kenney a clairement indiqué que la législation était spécifiquement en réponse aux actions menées pendant ce mois dans tout le pays pour appuyer la lutte des défenseurs de la terre Wet'suwet'en contre le pipeline du monopole énergétique Coastal GasLink qui traversera leur territoire traditionnel dans le nord de la Colombie-Britannique, sans leur consentement.

La Loi 1 érige en infraction le fait de « sans droit légitime, justification ou excuse, d'entraver, d'interrompre ou de gêner délibérément la construction, l'entretien, l'utilisation ou le fonctionnement d'une infrastructure essentielle de manière à rendre cette infrastructure dangereuse, inutile, inopérante ou inefficace » .

Maintenant, en utilisant comme prétexte les rassemblements « antivax » qui ont eu lieu devant les hôpitaux, les établissements de soins de santé et les hôpitaux seront ajoutés par voie réglementaire à la longue liste des « infrastructures essentielles » que le projet de loi « protège ». En vertu de cette loi, la police peut procéder à des arrestations sans obtenir de mandat ou d'injonction. La loi déclare aussi une infraction toute action visant à aider, conseiller ou ordonner à une autre personne de commettre une infraction à la loi, que cette personne commette ou non l'infraction.

La Loi 1 a déjà suscité une tempête de critiques de la part des peuples autochtones, des travailleurs et de leurs organisations, des organisations de défense des droits humains, des experts juridiques et de bien d'autres, et l'affirmation du gouvernement selon laquelle il « fait respecter la loi et l'ordre » a été accueillie avec le mépris qu'elle mérite. Cette annonce ne fera qu'intensifier la résistance.

L'affirmation selon laquelle cette législation vise les « antivaccins » ne peut être prise au sérieux, pas plus que celle selon laquelle l'objectif est de protéger les soins de santé. La présidente des Infirmières et infirmiers unis de l'Alberta (IIUA), Heather Smith, a exprimé sa préoccupation face au moment choisi par l'Alberta pour effectuer ce changement. Le gouvernement pourrait tenter d'entraver les futures actions syndicales, a-t-elle dit au Edmonton Journal, puisqu'il n'y a pas de manifestations devant les hôpitaux en ce moment.

« Je suis certainement préoccupée par le fait que ce soit l'intention, car, comme je l'ai dit, le moment choisi semble très suspect et déconnecté des véritables activités qui nous préoccupent tous », a-t-elle déclaré. L'IIUA est actuellement en médiation et le gouvernement continue d'exiger que les infirmières acceptent des réductions de salaire et des attaques contre leurs conditions de travail, ce qui ne ferait qu'aggraver la crise de l'embauche et de la rétention des infirmières.

Les contestations de la Loi 1 en vertu de la Charte sont déjà en cours. Elle sera aussi certainement contestée par la population en action pour défendre ses droits humains ainsi que ses droits civils. Lorsque les lois ne reconnaissent pas les droits qui appartiennent aux personnes en vertu de leur humanité, y compris les droits souverains des peuples autochtones et les droits des travailleurs en tant que producteurs de toute valeur sociale, un grave problème se pose. La loi 1 et son extension aux soins de santé sont peut-être légales mais elles aggravent aussi le conflit entre l'autorité et les conditions. Le fait que l'autorité n'agit pas conformément à ce que les conditions requièrent est un sérieux problème auquel sont confrontés le peuple et la société. Ce problème doit être abordé et résolu. Ce n'est pas un problème qui peut être réglé en utilisant la force et la violence au nom de « l'ordre public ».

Que la Loi 1 soit jugée ou non inconstitutionnelle, ce qui est tout à fait possible, cela va certainement à l'encontre de la compréhension moderne de l'objectif d'une loi qui est de servir la cause de la justice. Lorsqu'une loi n'est pas perçue comme étant juste et lorsqu'elle est imposée par des pouvoirs arbitraires dans le but de menacer, d'intimider et de criminaliser ceux qui défendent leurs droits et les droits de toutes et tous afin de les forcer à se soumettre, cela doit être remplacé par un état de droit digne de ce nom.

Si Kenney et ses semblables tentent d'utiliser la Loi 1 pour attaquer les infirmières et les autres travailleurs de la santé qui se sont surpassés au prix de leur propre bien-être pour que le système de santé continue de fonctionner, le gouvernement récoltera la tempête !

Notre sécurité est dans la lutte à la défense des droits de toutes et tous !

(Photos : FO, Friends of Medicare, Radical Citizens' Media)


Cet article est paru dans

Numéro 91 - 4 octobre 2021

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