Préoccupations des travailleurs
que les gouvernements
et les élections n'abordent pas
Le gouvernement ne protège pas les régimes de retraite des travailleurs
- Éric Drolet, président de la
section locale 9700 du Syndicat des Métallos
-
La section locale 9700
du Syndicat des Métallos représente les
travailleurs de l'aluminerie ABI de Bécancour
Mon profond malaise avec cette élection, et la
façon dont elle se passe, c'est que les
travailleurs, ou les électeurs, dont la majorité
sont des travailleurs, sont utilisés comme des
pantins pour des fins de propagande, comme une
statistique de sondage, pour que des partis
arrivent au pouvoir ou restent au pouvoir. On ne
les écoute pas. On ne prend
pas en note leurs besoins. On va dans le sens
contraire de ce que le peuple demande de ses
gouvernements. Si on suit les débats, on voit
jusqu'à quel point les élections sont déconnectées
et loin de nos besoins et de nos préoccupations.
Une
des sérieuses préoccupations des travailleurs,
c'est la défense de leurs régimes de retraite. Par
exemple, cela fait des années que les Métallos et
d'autres organisations syndicales militent pour
que les travailleurs soient parmi les premiers
créanciers, avec leurs régimes de retraite,
lorsque les entreprises déclarent faillite. Il y a
beaucoup de
travailleurs qui ont perdu 30 ou 40 % et
même plus de leur régime de retraite dans ces
cas-là. C'est un problème qui perdure depuis de
nombreuses années et encore aujourd'hui ce n'est
toujours pas réglé.
Un sérieux problème auquel nous faisons face,
c'est que les lois canadiennes encadrent mal les
entreprises. Prenons le cas d'Aléris, cette usine
de transformation d'aluminium qui était au
Cap-de-la-Madeleine ici à Trois-Rivières. Aléris
était une filiale de la multinationale du même nom
aux États-Unis mais elle était une entité légale
indépendante au Canada. Ce qui s'est passé c'est
que la multinationale américaine a siphonné les
profits et a laissé des déficits dans les régimes
de retraite des travailleurs canadiens. Le
gouvernement lui a permis de ne pas renflouer les
déficits du régime de retraite. Pendant toutes ces
années les profits sont allés à la maison-mère qui
existe encore.
En 2009, l'entité canadienne a été déclarée
en faillite. La multinationale américaine n'a
reconnu aucune obligation envers les travailleurs
canadiens, qui ont perdu leurs indemnités de
départ et une portion énorme de leur régime de
retraite. Je connais deux anciens travailleurs
d'Aléris, un de 28 ans d'ancienneté et
l'autre de 25 et
ils ont perdu chacun 42 % de leur régime
de retraite. Et tout cela a été déclaré légal.
Voilà des responsabilités dont les entreprises se
détournent, de manière légale ou en forçant la
main parfois.
Nous sommes dans la même situation ici à ABI.
L'aluminerie ABI est une entité des
multinationales étrangères Alcoa et Rio Tinto.
Elle est toutefois considérée comme une entité
canadienne indépendante. Si demain matin, advenant
par exemple que le marché de l'aluminium
s'effondre, Alcoa et Rio Tinto décident de la
mettre en faillite, ils ne
seront pas redevables de ce qui va arriver aux
travailleurs d'ABI. Alcoa et Rio Tinto n'auront
pas à renflouer les déficits.
Les entreprises qui viennent investir ici au
Québec et Canada connaissent les lois canadiennes
et savent qu'elles ne protègent pas les
travailleurs canadiens. Souvent, elles viennent
s'établir ici, prennent des subventions, mais
l'entité est déclarée par la loi comme étant
indépendante même si ce n'est pas le cas. Tout le
monde sait que ces entités
sont la propriété de ces multinationales et que ce
sont elles qui prennent les décisions. Le
gouvernement canadien ne légifère pas assez
strictement pour défendre les travailleurs. C'est
cela qu'on dénonce depuis longtemps et qui doit
changer. C'est un problème que le gouvernement
canadien ne veut pas aborder.
Et pendant les élections, ce problème n'est même
pas soulevé.
Cet article est paru dans
Numéro 85 - 20 septembre 2021
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