France Simard, coordonnatrice du Mouvement Action Chômage Lac-Saint-Jean


Action au Saguenay, 30 juin 2021

Forum ouvrier : Est-ce que le déclenchement des élections a un impact sur votre campagne pour un régime de l'assurance-emploi (AE) juste et universel ?

France Simard : La pandémie a démontré à quel point l'assurance-emploi est désuète. Il faut qu'il y ait une réforme en profondeur du système. Nous participons à une campagne en temps que membre du Masse, le Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi. Nos revendications sont simples et claires, sauf qu'avec les élections nous avons beaucoup d'interrogations. Le gouvernement fédéral avait établi une consultation à l'été, en même temps cela fait des années qu'on leur dit que ça ne fonctionne plus, alors pourquoi faire une consultation au lieu de se mettre au travail, s'asseoir ensemble, travailler ensemble sur du concret. Ils ont mis en ligne un sondage. Pour ce qui est du reste, tout est arrêté, tout est sur la glace avec les élections. Nous avons déposé des mémoires à la ministre et au comité HUMA (Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées). Est-ce que tout cela va se ramasser sur une tablette, et on va recommencer à zéro avec un nouveau gouvernement ?

FO : Quelles sont les revendications du MASSE dans cette campagne ?

FS : Notre première revendication c'est un seuil d'admissibilité unique à 350 heures ou 13 semaines. Nous voulons éviter que ceux qui travaillent à temps partiel n'aient pas droit à l'assurance-emploi. Nous voulons inclure tout le monde dans le régime d'assurance-emploi. La deuxième revendication c'est un taux de prestations d'au moins 70 % du salaire assurable, basé sur les 12 meilleures semaines de travail, au lieu du taux pré-pandémie de 55 % du salaire basé sur un nombre de semaines pouvant varier entre 14 et 22 semaines pour la détermination des meilleures semaines. La troisième revendication est un plancher minimum de 35 semaines de prestations. On sait que les travailleurs saisonniers sont victimes d'un trou noir qui est de plus en plus grand et de plus en plus dramatique pour toute cette industrie saisonnière. L'industrie saisonnière existe partout au Canada, et il faut que les gouvernements finissent par comprendre que c'est une condition particulière, que ce ne sont pas les travailleurs qui sont saisonniers mais c'est l'emploi qui est saisonnier. On a besoin d'un plancher de 35 semaines de prestations minimum pour tous, et avec ce plancher on éliminerait le trou noir.

Nous demandons toujours l'abolition des exclusions totales. Si un travailleur perd son travail par
départ volontaire ou inconduite, on veut que le régime les inclue eux aussi. L'exclusion totale des prestations de l'assurance-emploi pour ces travailleurs est une mesure extrême, et c'est ce qui se produit en ce moment.

La cinquième est l'accès aux prestations régulières d'assurance-chômage, en cas de perte d'emploi, sans égard aux prestations maternité/parentales/paternité versées. Les femmes qui viennent d'accoucher et qui perdent leur emploi pendant leur période de prestations de RQAP (Régime québécois d'assurance parentale) ou tout de suite après n'ont plus le droit à rien. Si elles perdent leur emploi ce n'est pas leur faute. C'est de la discrimination envers les femmes et envers les hommes aussi parce qu'il y a des hommes qui reçoivent des prestations parentales et de paternité.

Il est plus que temps d'établir un régime d'assurance-emploi juste et universel. Dans mon travail, je porte une grande attention aux travailleurs indépendants, je devrais plutôt dire les faux travailleurs indépendants. Ils font face à énormément de difficultés. D'un côté on leur dit que leur emploi est assurable, sur la base d'un long questionnaire qui examine par exemple qui décide de leurs heures, quel investissement ils ont dans l'entreprise, etc Ils doivent alors cotiser au régime, et de l'autre côté on leur refuse l'assurance-empoi parce qu'ils sont des travailleurs indépendants. Nous avons un grand nombre de ces travailleurs dans la région.

Il faut qu'on avance, et avec les élections qui sont déclenchées, on se demande s'il faut recommencer au début. Un éternel recommencement, avec chaque changement de gouvernement, ou de ministre, qui ne connaît pas le dossier, etc

Nous avons besoin d'un régime d'assurance-emploi juste et universel, qui est là pour aider les gens et non pour leur nuire.


Cet article est paru dans

Numéro 75 - 27 août 2021

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