Entrevues

Kevin McLean, président du comité de santé-sécurité-environnement à la Fédération des employées et employés de services publics-CSN

Mon syndicat de provenance est le Syndicat du transport de Montréal, je suis électro-mécanicien et j'effectue des réparations sur les composantes mécaniques du métro de Montréal. Le projet de loi 59 est rétrograde. C'est un projet de loi entièrement pro-employeur. Cela fait longtemps que les patrons revendiquaient des reculs dans la santé et la sécurité, parce qu'ils veulent avoir le moins d'impact possible des mesures de santé et sécurité dans leurs affaires parce que la santé-sécurité c'est très contraignant. Quand les travailleurs se mettent à respecter les normes de sécurité, ils peuvent bloquer rapidement une entreprise si les conditions ne sont pas sécuritaires. C'est pour cela que dans le projet de loi, les conditions de santé et sécurité sont laissées à la discrétion de l'employeur.

En ce qui concerne notre syndicat, nos conditions de santé et sécurité sont conventionnées, elles font partie de la convention collective. On peut présumer que lors de la prochaine convention, ils vont demander des concessions là-dessus, ils vont dire que la loi ne prévoit pas ces choses-là, ils vont vouloir nous les enlever, il va falloir se battre même pour conserver nos acquis.

Nous avons fait une enquête sur nos syndicats, et nous avons constaté que plusieurs conventions collectives stipulent que les normes de santé et sécurité sont celles qui sont dans la loi. Si la loi change, la convention collective vient automatiquement de changer par la bande et les normes aussi. Il va falloir se battre pour équiper nos syndicats pour leur donner des clauses en santé et sécurité, garder nos acquis et donner des forces à ceux qui font référence à la loi comme norme en santé et sécurité. Ils vont perdre beaucoup sinon.

À titre d'exemple, ma convention collective dit clairement qu'il y a six personnes, qui font 40 heures-semaine en santé-sécurité, payées par le patron, on se rencontre deux fois par mois avec l'employeur pour faire un comité de santé-sécurité. On amène des points, on discute, on participe aux enquêtes, tout cela est écrit dans notre convention collective. Dans les conventions où c'est la loi qui est la référence, et que la loi change, la situation peut changer du jour au lendemain. C'est peut-être légal mais c'est honteux. C'est inacceptable qu'on doive modifier nos conventions collectives pour être protégés. Par exemple, dans le projet de loi, les heures en santé-sécurité sont laissées à la discrétion des employeurs, ce qui n'a aucun sens. Il y a aussi la question du multi-établissement. Selon le projet de loi, il sera possible maintenant pour les employeurs qui ont plusieurs établissements de mettre en place un seul programme de prévention, un seul comité de santé et sécurité et un seul représentant à la prévention pour l'ensemble de leurs établissements Cela pourrait nous affecter très sérieusement à la Société de transport de Montréal, compte tenu du fait par exemple que chaque station de métro a une adresse civique et que nous avons plusieurs ateliers de réparation différents. Qu'est-ce qui va arriver si l'employeur utilise cela pour dire qu'il est en situation de multi-établissements et qu'il peut réduire par exemple le nombre de représentants en prévention ?

La fédération est très active contre le projet de loi 59. Nous participons aux actions démonstratives, nous avons participé à la vigile qui a duré 59 heures devant l'Assemblée nationale à partir du 31 mai.

Les travailleurs visitent les bureaux des membres de l'Assemblée nationale, janvier 2021

Nous avons demandé à nos membres de contacter le député de leur circonscription, qu'il ou elle soit au pouvoir ou dans l'opposition. C'est très différent comme méthode que d'avoir simplement une centrale syndicale qui écrit au ministre. On a eu des réactions de députés. Ils ne sont pas habitués à cela, à se faire interpeller de la sorte, à se faire demander de prendre position.

Puis, nous avons fait une phase deux. Nous avons fait une tuile Facebook qui disait que les derniers amendements du ministre Boulet proposés au projet de loi 59 sont non seulement insuffisants, mais carrément rétrogrades et que la loi sur la santé et sécurité au travail doit protéger tous les travailleurs. C'est moi qui la signais, et on a demandé aux syndicats de l'envoyer aux membres et de dire aux membres de la mettre sur leur page Facebook et de tagger leur député et leur ministre. On avait donné la liste des ministres selon les circonscriptions.

Nous continuons à faire pression. Nous n'allons pas lâcher. Nous avons besoin d'une loi en santé et sécurité qui protège tous les travailleurs et toutes les travailleuses.

(Photos: FTQ)


Cet article est paru dans

Numéro 72 - 20 août 2021

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