Non au recours aux pouvoirs de police face à l'itinérance et
pour attaquer la dignité humaine!

Évictions brutales répétées des résidents des campements à Toronto

Au cours des mois d'été à Toronto, il y a eu une intensification des attaques contre les personnes itinérantes vivant dans plusieurs campements dans les parcs de la ville, des évictions forcées effectuées par la police, pour faire respecter un avis d'entrée non autorisée émis le 12 juin par la Ville de Toronto. L'avis met en garde les personnes itinérantes qu'elles pourraient être expulsées et subir, si condamnées, une amende pouvant atteindre 10 000 $, comme si les personnes vivant l'itinérance pouvaient payer de telles amendes. Les attaques ont soulevé une opposition massive de la part des personnes itinérantes, des organisations luttant pour le droit au logement pour tous et d'autres sympathisants.

La plus récente intervention violente par la police pour démanteler un campement et évincer ses résidents a eu lieu le 21 juillet au parc Lamport Stadium, où 26 personnes ont été arrêtées. Aliya Pabani, une bénévole du Réseau d'appui aux campements de Toronto a dit à CBC News qu'elle avait été attaquée au poivre de cayenne et que plusieurs autres manifestants avaient été blessés par la police. « Des gens ont subi de graves blessures », a dit Pabani. « Ils ont asséné des coups de poing aux gens... exercé une pression sur leur cou avec leurs genoux. » Elle a dit que l'attaque avait été « brutale » et « un déploiement de force dégoûtant », ajoutant que certaines personnes ont dû recevoir des points de suture pour leurs blessures.



Pour des vidéos de l'éviction, cliquer ici

La veille de l'évincement du parc Lamport Stadium, la police avait attaqué et évincé des gens du parc Alexandra, où au moins neuf personnes ont été arrêtées. Comme cette éviction avait suscité l'opposition de centaines de personnes, le lendemain, une clôture temporaire a été érigée tôt le matin au parc Lamport pour tenter de tenir les opposants ainsi que les médias à l'écart, pour que la police puisse mener son assaut avec impunité. Domenico Saxida, un résident du campement, a dit de l'expulsion des gens du parc par la police et la sécurité qu'elle n'était « pas du tout nécessaire ». Il a dit à CBC News que plusieurs résidents avaient déjà commencé à quitter les lieux, certains ayant choisi de se déplacer vers des hôtels et des refuges, alors que d'autres avaient réussi à se trouver un logement plus permanent. Domenico Saxida a dit qu'il ne savait pas où lui-même irait maintenant et qu'il s'inquiétait pour les autres qui avaient été évincés du campement. « Il y a quelques femmes dans ce parc. J'aimerais savoir, où iront-elles ? Que feront-elles ? Les refuges débordent, et il en va de même pour les hôtels. Ceux-ci sont dangereux », a-t-il dit.

Assaut et éviction par la police au parc Alexandra

Le 22 juin, des centaines de personnes se sont rassemblées au parc Trinity Bellwoods pour résister et tenir responsable la police présente en grand nombre pour évincer de force le campement d'itinérants du parc. Près de 400 à 500 personnes ont tenu tête à près de 100 policiers armés de gaz lacrymogène, de balles en caoutchouc pour les empêcher de détruire le campement et d'évincer les près de 25 personnes itinérantes qui y vivaient. Le face-à-face avec la police a duré 12 heures avant que les personnes itinérantes ne soient évincées. Certaines des personnes défendant les droits des personnes itinérantes ont été arrêtées.

Le personnel de la ville est arrivé tôt le matin pour procéder aux évictions. On a avisé les résidents du campement qu'ils avaient quelques heures pour ramasser leurs biens et quitter. Selon les médias, on les aurait avisés de se déplacer vers des refuges désignés.

Pour la vidéo de l'éviction des sans-abris du campement de Trinity Bellwoods, cliquer ici 

À la suite de ces événements, le 23 juillet, cinq conseillers municipaux ont signé et publié une lettre appelant à mettre fin à la violence exercée lors des évictions forcées aux campements des personnes itinérantes dans les parcs de la ville, avant que n'ait lieu la prochaine éviction qui doit avoir lieu au parc Moss au cours des semaines à venir. « Avant que n'ait lieu cette éviction, nous exigeons que cessent la violence et tout déploiement de force extrême. Il n'y a absolument pas lieu d'avoir recours aux matraques, au poivre de cayenne ou aux armes à feu, alors que ces interventions relèvent du personnel municipal déployé pour reloger les personnes itinérantes et d'autres travailleurs communautaires », ont-ils écrit[1].

Avant la publication de la lettre des conseillers, le 9 juillet, une autre lettre a été envoyée au maire Tory, intitulée « Une voie vers l'avant », signée par 207 organisations et dirigeants communautaires, « exigeant que le maire John Tory et la Ville mettent fin à l'éviction forcée des campements et au recours à la force par la police contre les personnes itinérantes, et s'engagent à respecter une approche conforme aux droits humains dans leurs interactions avec les personnes itinérantes[2]. » La lettre avait été soumise en vue de la réunion du Conseil municipal du 15 juillet, mais elle n'a pas été ajoutée à l'ordre du jour par le Conseil ou le maire.

Chaque nuit, il peut y avoir dans les rues de Toronto près de 10 000 personnes itinérantes. Les conditions de surpeuplement dans les refuges de Toronto ont engendré une crise qui menace les nombreuses personnes vulnérables qui ont recours à ces espaces ainsi que le personnel des refuges, les bénévoles et les communautés locales, selon l'Association canadienne des libertés civiles.

Le maire John Tory accuse les personnes qui défendent les droits des personnes itinérantes de créer un problème, les accusant de profiter de la situation pour « passer un message ». Le maire maintient que les campements contreviennent à plusieurs articles du Code municipal et ne sont pas une solution à l'itinérance.

La Ville programme ces règles et cette réglementation sans se préoccuper de la nécessité que la société canadienne respecte son engagement de fournir des logements adéquats en tant que droit fondamental du peuple. De telles « règles » sont une violation des lois et conventions internationales dont le Canada est signataire.

Le Haut-Commissariat aux Droits de l'homme des Nations unies stipule sans ambigüité : « Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l'ONU a souligné qu'il convenait de ne pas donner du droit à un logement convenable une interprétation trop étroite, mais de le considérer comme étant le droit de vivre en un lieu dans la sécurité, la paix et la dignité. Le droit à un logement convenable recouvre des libertés, parmi lesquelles : la protection contre les expulsions forcées et la destruction ou la démolition arbitraire de son logement[3]. »

Les actes du Canada en disent plus long que ses paroles. Forum ouvrier condamne les évictions par la force des personnes itinérantes et la présence policière massive déployée contre elles. Le logement et les refuges adéquats sont un droit fondamental !

Notes

1. « Lettre ouverte au maire Tory  Il faut mettre fin aux interventions policières dans les évictions de campements », 23 juillet 2021

2. « Une voie vers l'avant, Lettre au maire Tory », 9 juillet 2021

3. Le droit à un logement convenable, Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme

(Photos : Hamilton ESN, SHJN, S. Punwasi, M. Reis, C. Leung, S. Jama)


Cet article est paru dans

Numéro 65 - 4 août 2021

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