La nouvelle réglementation intéressée du gouvernement Trudeau pour les travailleurs étrangers temporaires

Le 26 juillet, un jour après qu'une manifestation militante et très réussie ait convergé vers Ottawa, organisée par des groupes de défense des droits des migrants pour réclamer l'égalité des droits, l'égalité d'accès aux services et un Statut pour tous les travailleurs migrants, le gouvernement Trudeau a annoncé qu'il allait adopter de nouveaux règlements « pour améliorer la protection des travailleurs étrangers temporaires ». Il s'agit d'un stratagème cynique pour gagner des voix lors d'une prochaine élection, alors qu'en réalité, l'intention du gouvernement est de garantir l'approvisionnement en main-d'oeuvre migrante bon marché et non protégée pour l'industrie agroalimentaire. Son cynisme est tel qu'il affirme que la nouvelle réglementation rendra « notre » chaîne d'approvisionnement alimentaire plus sûre — alors qu'en fait, la majeure partie de la production agricole des méga-entreprises installées en Ontario, en Colombie-Britannique et au Québec est expédiée vers le sud, aux États-Unis, puis réimportée au Canada sous forme de ketchup et d'autres produits de consommation.

La nouvelle réglementation proposée prétend améliorer la protection des travailleurs étrangers temporaires en matière de contrats de travail, de logement et de soins de santé et éliminer les « mauvais acteurs » qui profitent de la vulnérabilité des travailleurs migrants. Les libéraux de Justin Trudeau soulignent les changements apportés plus tôt cette année, qui permettent aux migrants titulaires d'un permis de travail spécifique à un employeur de changer d'employeur et de commencer à travailler pendant qu'un nouveau permis est en cours de traitement. Le gouvernement a même créé un tableau d'affichage du Guichet-emplois qui met en relation les employeurs admissibles et les travailleurs migrants temporaires qui cherchent à changer d'emploi.

Tout avantage pour les travailleurs n'est qu'accessoire par rapport aux stratagèmes gouvernementaux pour payer les riches. L'année dernière, par exemple, le gouvernement fédéral a donné aux monopoles agroalimentaires 50 millions de dollars pour couvrir le coût de l'obligation d'autoconfinement de 14 jours en matière de santé publique pour les travailleurs agricoles migrants entrants. Cette année, le gouvernement fédéral leur donnera 35 millions de dollars de plus en aide d'urgence à la ferme pour améliorer les conditions de vie des travailleurs migrants.

Les monopoles agroalimentaires ont eu beaucoup de mal à embaucher des travailleurs migrants l'année dernière, en raison de la pandémie mondiale. En mars 2020, il y a eu 43 % de moins d'arrivées de travailleurs agricoles migrants temporaires au Canada, par rapport à la même période l'année précédente. Ces travailleurs étaient contraints de travailler selon des horaires dangereux et intolérables — des journées de 15 heures, des semaines de 7 jours. L'Alliance des travailleurs migrants pour le changement (Migrant Workers Alliance for Change) a fait état de plus de 1100 plaintes entre mars et mai 2020 relatives au non-paiement des heures supplémentaires et aucun travailleur n'a été indemnisé. Le gouvernement fédéral va-t-il s'assurer que ces travailleurs soient correctement indemnisés ?

Les blessures sur le lieu de travail ont monté en flèche. Même avec le nombre réduit de travailleurs agricoles migrants, les dortoirs étaient toujours surpeuplés et les éclosions de COVID-19 étaient courantes. Des travailleurs migrants en sont morts. Le manque d'accès aux services médicaux dont sont victimes depuis longtemps les travailleurs agricoles migrants n'a fait qu'aggraver la situation. La nouvelle réglementation est censée exiger de tous les employeurs qu'ils offrent un accès raisonnable aux services de santé et qu'ils fournissent une assurance-maladie en cas de besoin, mais il reste à voir ce que cela signifie dans la pratique. On est loin de la garantie des soins de santé en tant que droit.

Le gouvernement s'est engagé à lancer une discussion sur le logement des travailleurs agricoles migrants et a alloué davantage de fonds pour les inspections des logements existants. En 2018, une étude commandée par le gouvernement fédéral a révélé « une grande variation de ce qui est considéré comme une norme de logement acceptable » et « des lacunes dans le processus d'inspection des logements » qui « peuvent potentiellement causer des dommages ou des blessures aux travailleurs ». Cette étude n'a pu éviter l'éléphant dans la pièce, à savoir qu'il n'existe pas de norme nationale pour le logement des travailleurs agricoles migrants temporaires. Même lorsque les inspections révèlent que les logements ne sont pas sécuritaires, il n'y a pas de conséquences parce qu'il n'y a pas de normes exécutoires. Que faut-il encore discuter pour que les droits des travailleurs à un logement adéquat soient respectés ?

Le « mauvais acteur » dans tout ce scénario est l'État canadien et sa discrimination systémique et son déni des droits humains des migrants. Les migrants sont rendus vulnérables, privés de droits égaux et de l'égalité d'accès aux services par les programmes mêmes que le gouvernement canadien a mis en place pour satisfaire les besoins des riches. Une meilleure réglementation de la discrimination systémique ne fait rien pour mettre fin à la discrimination. La solution réside dans l'affirmation des droits de tous. « Un statut pour tous et toutes ! » est la revendication des travailleurs migrants, des organisations de défense des migrants et de la classe ouvrière canadienne.

(Photos: MRN, J4MW)


Cet article est paru dans

Numéro 64 - 2 août 2021

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