Négociations dans le secteur
public au Québec
Les syndicats rejettent la position inacceptable du gouvernement
- Pierre Chénier -
Piquetage devant l'Assemblée nationale le 6
mai 2021
Peu après leur rencontre, le 2 mai, avec le
premier ministre du Québec, François Legault, et
la présidente du Conseil du trésor, Sonia Lebel,
plusieurs dirigeants syndicaux du secteur public
qui représentent 550 000 travailleurs et
travailleuses ont tenu une conférence de presse où
ils ont déclaré que la rencontre n'avait pas été
organisée pour résoudre le problème de faire
progresser les négociations. Ils ont dit que
c'était une opération de relations publiques de la
part du gouvernement pour diviser les travailleurs
et dresser le public contre eux.
Les dirigeants syndicaux
ont réfuté l'affirmation du gouvernement qu'il a
présenté une offre de 8 % d'augmentation
salariale sur trois ans. En fait, le gouvernement
offre 5 % sur trois ans et un 3%
additionnel en montant forfaitaire qui n'augmente
pas les salaires et ne contribue pas aux régimes
de retraite, ce qui n'a rien à voir avec une
augmentation de salaire. Ils ont dénoncé la
tactique de diviser pour régner du gouvernement
par des offres différenciées selon les différents
secteurs d'emploi. Ils ont dit que les
travailleurs du secteur public forment un tout, un
collectif qui travaille ensemble à chaque jour
pour fournir les services à la population et que
chacun d'entre eux est important.
Les dirigeants syndicaux ont réitéré que la crise
d'attraction et de rétention dans les services
publics est grave et ne peut être résolue que par
l'augmentation des salaires et l'amélioration des
conditions de travail de chacun. Ils ont souligné
qu'avec des offres aussi insuffisantes, il n'est
pas possible de rebâtir les services publics qui
ont été saccagés par plus de trente années de
coupures et de privatisation et que ce n'est donc
pas possible de se préparer pour la prochaine
crise. Finalement, ils ont dit que si le
gouvernement désire réellement une résolution
rapide comme il le dit, il doit donner à ses
négociateurs un véritable mandat de négocier pour
que des discussions sérieuses se tiennent entre
les syndicats et le gouvernement et abordent les
justes revendications des travailleurs du secteur
public.
Le premier ministre Legault et la présidente du
Conseil du trésor ont tenu eux aussi une
conférence de presse quelques heures après la
rencontre avec les dirigeants syndicaux. Il est
apparu clairement que le premier ministre savait
très bien que les syndicats allaient rejeter son
offre et que son objectif était de tenter de
dresser la population contre les travailleurs et
les travailleuses du secteur public. François
Legault y est allé du mantra néolibéral usé à la
corde que la pandémie a créé une situation
budgétaire très difficile pour le Québec, rendant
le retour à l'équilibre budgétaire dans un proche
avenir très difficile. Il a déclaré qu'en tant que
« gestionnaire de l'argent des
contribuables », il serait impensable pour
lui d'offrir plus parce que cela nécessiterait
d'augmenter les impôts, ce qu'il se refuse à
faire.
Alors que les Québécois reconnaissent la valeur
immense pour l'économie que créent les
travailleurs et les travailleuses du secteur
public, le gouvernement Legault refuse de
reconnaître la réclamation que les travailleurs et
les travailleuses du secteur public font à la
valeur qu'ils créent. Le gouvernement n'a aucune
intention de prendre ses responsabilités envers
leur bien-être ou celui des services publics ou
même de tenir une discussion publique sur comment
financer les services publics. Les paroles faciles
au sujet de défendre les intérêts des soi-disant
contribuables ne peuvent pas masquer que son
gouvernement s'attaque à ceux qui livrent les
services lorsqu'il met en péril les services et
ceux qui les livrent.
Avec son «
offre »,
le gouvernement nie aussi la réalité de la crise
profonde qui affecte les services publics,
notamment le problème d'attraction et de rétention
de la main-d'oeuvre, le problème d'une intense
pénurie de main-d'oeuvre dans les services,
largement causée par le refus d'offrir des
salaires et des conditions de travail que les
travailleurs trouvent acceptables. L'exode du
personnel des services publics, que ce soit par le
changement de carrière, le recours à la retraite
anticipée ou la migration vers les agences privées
de main-d'oeuvre, est devenu un enjeu critique
pour les travailleurs, les services et la
population. Des lits sont fermés dans les hôpitaux
alors qu'on en a tellement besoin à cause du
manque de personnel, largement dû à cet exode. Le
gouvernement cherche délibérément à satisfaire les
agences privées, ce qui a aggravé la crise causée
par l'offensive antisociale. C'est vraiment
criminel de sa part, et c'est précisément ce
problème auquel les employés du secteur public
essaient de s'attaquer en revendiquant de
meilleurs salaires et de meilleures conditions de
travail. La
tentative du premier ministre de dresser le public contre les
employés du secteur public est pitoyable. Il a dit qu'il a
été très patient jusqu'ici avec les travailleurs
du secteur public, que sa patience commence à s'effriter et
qu'il s'attend à une résolution des négociations
d'ici quelques semaines. Il faut mettre les négociations «
derrière nous », a-t-il dit, ce qui est vraiment
malhonnête quand on sait que c'est le gouvernement qui refuse de
négocier de bonne foi. Ses paroles sont perçues comme une
menace de nouvelles attaques, y compris d'une loi pour
décréter les salaires et les conditions de travail des
employés du secteur public. Cela s'ajouterait aux
arrêtés ministériels qui existent
déjà dans la santé et les services sociaux qui
permettent de déclarer nulles et non avenues les conventions
collectives du secteur et de changer unilatéralement les
conditions de travail. Tous
ne vont pas tarder à voir ce que fait François Legault
avec les « impôts du peuple », soit de payer les
agences privées par le biais de contrats lucratifs pour fournir
de la main-d'oeuvre pour occuper les emplois du secteur public.
Cet article est paru dans
Numéro 43 - 12 mai 2021
Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/FO2021/Articles/FO06431.HTM
Site Web: www.pccml.ca
Email: redaction@cpcml.ca
|