Rhonda Bruce, assistante en réadaptation et vice-présidente régionale pour l'Intérieur de la Colombie-Britannique du Syndicat des employés d'hôpitaux
Lorsque la pandémie nous a frappés, tous les
sites de soins de longue durée (SLD) devaient
avoir un plan de sécurité lié à la COVID-19. Je
suis représentante en santé-sécurité au travail et
j'ai examiné le plan avec notre gestionnaire. Nous
pensions que les mesures de sécurité liées à la
COVID-19 étaient adéquates et nous n'avons eu
aucune
éclosion, du moins, pas avant Noël.
La première éclosion dans
notre communauté s'est déclarée dans la résidence
annexée à l'hôpital. La résidence n'avait aucun
plan de sécurité précis. Lorsque la COVID-19 a
frappé, le système fonctionnait déjà sur la base
du temps supplémentaire. Il n'y avait pas assez de
personnel. Chaque site devait avoir un plan pour
embaucher du
personnel supplémentaire, comme le prévoyait le
plan de sécurité lié à la COVID-19, mais ce n'est
qu'après cinq jours d'éclosion que l'Autorité de
la santé a demandé plus d'infirmières autorisées
(IA) et d'infirmières auxiliaires autorisées
(IAA). Il n'y a eu aucun ajout de personnel pour
ce qui est des aides-soignants et des préposés à
l'alimentation ou à l'entretien. Le problème,
c'est que les IA et les IAA ne dispensent des
soins pratiques que dans les cas les plus
compliqués. Pour la plupart des résidents, les
soins pratiques – nourrir, vêtir, laver,
assister le patient pour aller à la toilette,
l'aider dans sa mobilité – sont faits par les
aides-soignants. Des 59 résidents, 53 ont
eu un test positif et 22 sont décédés. À un
certain moment, lors d'un quart de travail de
nuit, une seule aide-soignante a dû s'occuper
de 59 résidents, dont plusieurs étaient
malades. Cette travailleuse est en arrêt de
travail en ce moment à cause du stress et elle
n'est pas la seule.
Une travailleuse en loisirs, qui organise des
sorties, des jeux et
des activités sociales pour les résidents, a
été réaffectée aux résidents en fin
de vie pour que ceux-ci puissent communiquer avec
les membres de leur
famille, prenant avec elle un iPad au chevet des
résidents pour
qu'ils puissent communiquer avec leur famille dans
les dernières
heures de leur vie. Elle s'est écroulée. Elle a
dit : « Mon emploi en tant qu'aide aux
loisirs est
d'organiser des activités et des jeux amusants. Je
ne suis pas
formée pour ce qu'on m'a demandé de faire ».
Pendant la première éclosion, les aides-soignants,
en
plus de leurs tâches régulières, ont
été affectés à la préparation des
corps des
résidents décédés, un travail normalement
réalisé par un préposé à la morgue.
Ils ont trouvé cela particulièrement difficile.
Une éclosion s'est déclarée à mon endroit de
travail le 5 janvier. Je n'étais pas inquiète
parce que nous avions notre plan de sécurité, mais
je dois avouer que rien ne pouvait nous préparer à
ce que nous allions devoir faire. Sur mon
aile, 10 patients sur 11 ont eu un test
positif à la COVID-19. On nous a donné des
directives
sur comment mettre et enlever notre ÉPI –
blouses, gants, masques et lunettes – ce qui
doit être fait dans un certain ordre et
méthodiquement. Le problème, c'est que nous étions
déjà en pénurie de personnel. Les résidents
devaient être isolés et manger dans leur chambre,
et certains devaient recevoir des soins spéciaux
parce qu'ils avaient des
symptômes. C'est donc dire qu'à chaque fois que
nous entrions dans la chambre d'un résident, la
procédure pour l'ÉPI ajoutait 10 minutes à
notre intervention. Une aide-soignante s'occupait
de 11 résidents, dont 10 ont eu un test
positif. Vous vous rendez compte ? Il
faut 20 minutes seulement pour mettre et
enlever
l'ÉPI pour livrer et reprendre les plateaux,
multiplié par 11 résidents en
isolement – plus de trois heures par repas.
C'était impossible.
Un sérieux problème est que les travailleurs
n'ont pas été partie prenante des discussions sur
les mesures à prendre par le Contrôle des
infections sur comment assurer la sécurité des
résidents et leur propre sécurité. Le Contrôle des
infections est venu et a donné ses ordres, mais le
« comment faire » n'a jamais été discuté et
nous n'avions
pas suffisamment de personnel. Les deux premières
semaines ont été épuisantes et nous ne pouvions
assurer le soin dont les gens avaient besoin. Dès
que nous avons eu le personnel nécessaire, nous
avons pu travailler calmement. Il n'y a pas eu de
contamination après que le personnel a été
augmenté, les gens pouvaient prendre le temps
qu'il
fallait, parler avec les résidents, passer du
temps avec eux.
Dans un contexte d'éclosion de la COVID-19, vous
vivez avec un taux accru d'anxiété en tout temps.
Il y a un stress constant et une préoccupation
pour vos résidents qui sont confinés dans leur
chambre, loin de leur famille et de tout contact
social à l'exception du personnel. Il y a une peur
toujours présente d'être infecté, de propager la
maladie aux résidents, à votre famille.
Il y avait une seule infirmière pour le contrôle
des infections dans la partie sud de l'Autorité de
la santé au moment de l'éclosion. Maintenant,
après une deuxième éclosion, il y en a six, mais
il a fallu un an pour y arriver.
Nous avions aussi besoin
de sessions de débreffage. Si nous en avons eu,
c'est que nous les avons exigées. Nous en avions
besoin pour gérer notre stress et son impact sur
nous, surtout sur les travailleurs ayant des
problèmes de santé comme l'asthme, la haute
pression, des maladies auto-immunes, des
situations familiales complexes. Nous
avons fait notre possible pour nous entraider, par
exemple en veillant à ce qu'une travailleuse dont
la mère avait le cancer soit affectée à une tâche
où elle ne serait pas en contact direct avec les
résidents. J'ai obtenu un débreffage pour mon
unité et cela a beaucoup aidé. Le débreffage est
important pour les travailleurs qui vivent un
traumatisme et
on en a besoin tout de suite et non plusieurs mois
plus tard comme ce fut le cas, sans parler des cas
où il n'y en a pas eu.
Nous sommes en mode post-éclosion et sur un pied
d'alerte constant. Nous devons faire en sorte de
ne pas devenir complaisants et nous sommes
préoccupés par les variants. Depuis la fin de la
première moitié environ de la période d'éclosion,
nous avons suffisamment de personnel. Cela a été
maintenu et cela doit être maintenu jusqu'à la fin
de cette pandémie.
Cet article est paru dans
Numéro 33 - 26 avril 2021
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