Le gouvernement du Québec présente de «nouvelles offres»
aux travailleurs du secteur public

Un abus de pouvoir pour nier les besoins des travailleurs et leur droit de décider


Journée de grève au Collège Ahuntsic le 30 mars 2021

Les quelque 550 000 travailleuses et travailleurs des secteurs de la santé, de l'éducation et des services sociaux essaient toujours de renouveler leurs conventions collectives sur la base de revendications qui améliorent leurs conditions de travail et la livraison des services dont les gens dépendent et qui notamment s'attaquent à la propagation de la COVID-19. Ils en ont plus qu'assez d'être humiliés aux tables de négociation qui n'en sont pas alors que leurs demandes sont si pressantes pour eux et le public.

Le 30 mars, des syndicats affiliés à la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) dans le secteur collégial ont tenu une première journée de grève.

Le 31, soit un an après l'échéance de leur contrat de travail, les travailleurs des syndicats du secteur public ont organisé une journée d'action nationale sous le thème « On sonne l'alarme ». La même journée, Sonia Lebel, ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor, a tenu une conférence de presse où elle a présenté ce qu'elle a appelé ses nouvelles offres et a dit que « pour la première fois, dans le cadre de ses négociations [le gouvernement consacre] des montants propres aux enjeux sectoriels. » En fait, la conférence de presse a été une nouvelle tentative de destruction de l'opinion publique où la ministre a prétendu que le gouvernement fait tout pour résoudre la crise du secteur public et que les syndicats manquent de solidarité sociale.

La ministre a commencé son point de presse en soulignant que ce sont les 550 000 travailleuses et travailleurs du secteur public qui assurent des services essentiels à la population du Québec. Du même souffle, elle a dit que « la rémunération globale des employés de l'État s'élève à environ 40 milliards de dollars, soit près de 60 % des dépenses de programmes du gouvernement. Vous comprendrez que le renouvellement des conventions collectives et des nouvelles mesures qui sont mises en place par celles-ci a une incidence majeure sur le plan budgétaire du Québec » et elle a ajouté que « chaque augmentation de 1 % équivaut à une hausse récurrente des dépenses de 400 millions de dollars. »

C'est le même mantra qui est agité par les gouvernements néolibéraux depuis plus de 30 ans qui n'a fait qu'accroître la crise dans les programmes sociaux et les services publics qui sont considérés comme un coût pour la société et non comme une contribution extraordinaire à l'économie et une grande humanisation de la société.

En fait, la ministre n'a aucune intention de discuter économie ou finances publiques ou mobilisation des revenus nécessaires pour investir adéquatement dans les services et les travailleurs qui les dispensent. Elle ne voit ni ne propose d'alternative à une économie qui paie les riches dans laquelle la valeur créée par les programmes sociaux et les services publics n'est pas remboursée par les grands intérêts privés qui reçoivent, gratuitement, une main-d'oeuvre en santé et instruite, sans parler des milliards en profits privés qu'ils tirent directement de leur contrôle des services. Les travailleurs ont de multiples propositions concernant, par exemple, la restriction du profit privé dans les services qui prive ces derniers de revenus vitaux, mais ces propositions sont rejetées d'emblée.

Les discours sur la « capacité de payer » des Québécois surviennent seulement lorsque les travailleurs présentent leurs revendications pour des salaires et des conditions qui leur sont acceptables et améliorent la prestation des services.

Qui sait, peut-être les Québécois n'ont-ils pas non plus la capacité de payer pour des vaccins ou des équipements de protection individuelle ? Cet argument de la « capacité de payer » est une honte parce qu'il fait fi des besoins du peuple et de la société qui doivent être comblés et de la discussion publique sur les moyens d'y arriver. Il nie le facteur humain/conscience sociale qui doit être déployé pour élaborer des solutions prosociales qui commencent par la résistance des travailleurs à l'offensive antisociale et les revendications qu'ils mettent de l'avant en parlant en leur propre nom.

On a vu aussi poindre une fois de plus dans la conférence de presse de la ministre la menace de décréter les conditions de travail et les salaires des employés du secteur public. À la question d'un journaliste à propos de son « niveau de patience » face aux syndicats et jusqu'à quel point elle était prête à « étirer ça » avant de faire « des ultimatums », la ministre a répondu : « Bien, vous avez donné la réponse à votre question, le plus rapidement possible. C'est le message que j'ai lancé aux chefs syndicaux [...] je pense, c'est dans l'intérêt de tous de régler de façon rapide, aussi rapidement que possible [...]. Moi, je continue à penser qu'on peut avoir une entente négociée. »

La gouvernance par décret est un des traits essentiels de l'offensive antisociale des trente dernières années et plus et la crise actuelle ne fait que la renforcer. Elle prive de l'espace juridique pour faire entendre leur voix en particulier celles et ceux qui produisent les biens et assurent les services.

On ne peut que rejeter avec mépris cette arrogance ministérielle et intensifier notre lutte importante pour avoir le mot décisif dans la détermination des conditions et des services que nous considérons acceptables pour nous-mêmes et le public.




Première journée de grève des syndicats du secteur collégial (de haut en bas)
à Sorel-Tracy, à Limoilou et à Valleyfield, le 30 mars 2021

(Photos: CSQ)


Cet article est paru dans

 Numéro 28 - 14 avril 2021

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