La destruction par les
gouvernements de l'industrie forestière et de
l'environnement naturel
Pas de retour en arrière- un changement de paradigme en gestion forestière
- Peter Ewart -
Les effets des changements climatiques sur les
forêts, les paysages, les emplois et les
communautés de la Colombie-Britannique sont de
plus en plus évidents dans toute la province, y
compris l'infestation par des insectes comme le
dendroctone du pin (qui a entraîné la mort de
millions d'hectares de forêt de pins de la région
intérieure de la Colombie-Britannique), les graves
incendies de forêt, les sécheresses, les
inondations et d'autres problèmes. L'épidémie de
dendroctone du pin, à elle seule, a entraîné la
perte de milliers d'emplois forestiers et la
fermeture de dizaines d'usines, et les changements
climatiques ont d'autres effets négatifs sur les
forêts et l'économie.
En réponse à ces menaces, le gouvernement
provincial a publié une « Évaluation stratégique
des risques climatiques » en
juillet 2019 qui a identifié 15 risques
climatiques, dont plusieurs « ont le potentiel de
créer des effets catastrophiques pour les
communautés de la Colombie-Britannique[1].
»
Cependant, l'évaluation des risques du
gouvernement comporte un trou béant. Malgré une
abondance de preuves, il n'a pas tenu compte de
l'impact de la coupe à blanc des forêts et des
autres pratiques actuelles de gestion forestière
sur la gravité et la fréquence d'au moins 9
des 15 risques climatiques identifiés. Pour
combler cette lacune, le Sierra Club BC a commandé
un rapport du scientifique forestier Dr Peter Wood
intitulé « Forêts intactes, communautés en
sécurité » et qui a pour objectif d'évaluer «
le rôle que la gestion forestière peut jouer dans
l'atténuation ou l'aggravation de ces risques[2]. »
Le rapport du Sierra Club
de la Colombie-Britannique commence par noter
qu'au cours du siècle dernier, « les forêts de la
Colombie-Britannique ont été exploitées à un
rythme insoutenable » et que, par conséquent,
« seulement 3 % des forêts anciennes à
haute productivité de la Colombie-Britannique
restent intactes ». Ces forêts anciennes «
créent leur propre microclimat frais et humide à
mesure qu'elles vieillissent, ce qui aide à
prévenir les incendies de forêt ». La canopée
élevée et complexe des arbres crée de l'ombre et
capture la brume côtière, « permettant la création
de lits de mousse profonds et d'une végétation
luxuriante de sous-bois avec de la biomasse en
décomposition », qui peuvent tous abaisser
les températures printanières de ces forêts
jusqu'à 2,5 degrés.
En effet, les forêts anciennes agissent comme des
éponges géantes, « absorbant et retenant
facilement l'eau, protégeant la neige de la fonte,
puis libérant lentement l'eau sur une longue
période ». Cela a conduit certaines forêts
pluviales tempérées à ne plus subir d'incendies de
forêt depuis plusieurs milliers d'années. Même
dans les forêts plus sèches et plus sujettes aux
incendies de forêt de la région intérieure de la
Colombie-Britannique, des microclimats sont créés
qui retiennent l'humidité plus longtemps. Une
étude américaine a révélé que « des niveaux plus
élevés de protection des forêts étaient associés à
des valeurs de gravité des incendies plus faibles,
même si cela était également associé à des niveaux
plus élevés de biomasse et de charge de
combustible ». En plus d'être plus
résistantes au feu, les forêts anciennes et
intactes sont moins sujettes à la sécheresse que
les forêts plus jeunes et, par conséquent, les
écosystèmes « contiennent des niveaux élevés de
biodiversité, de complexité structurelle et de
développement des sols ».
Le rapport soutient que la coupe à blanc détruit
le microclimat forestier existant et expose le sol
forestier à une lumière directe accrue du soleil,
ce qui entraîne des températures plus extrêmes et
l'assèchement des débris ligneux. Pas moins
de 40 à 60 % de la biomasse d'une
forêt sont laissés pour compte sous forme d'arbres
coupés et même d'arbres entiers. Malgré la
réglementation, ces matériaux peuvent souvent
rester au sol pendant des années. Tous ces déchets
secs et inflammables aggravent sérieusement les
risques d'incendie de forêt, tout comme la vitesse
du vent qui est connue pour augmenter après la
coupe à blanc.
Les forêts de seconde pousse présentent également
un risque, car elles sont plus inflammables que
les anciennes et ces jeunes arbres sont plus
rapprochés les uns des autres. Les risques sont
accrus étant donné que la réglementation
forestière exige qu'après la coupe à blanc, les
entreprises forestières fassent l'épandage sur les
aires de coupe de bois des herbicides comme le
glyphosate qui tuent les essences de bois dur
comme le tremble et le bouleau. Ces bois durs sont
moins inflammables que les essences de résineux
et, s'ils ne sont pas enlevés, peuvent servir à «
bloquer » efficacement les feux de forêt[3].
Avant la
colonisation, les peuples autochtones utilisaient
fréquemment le feu comme outil pour réduire les
risques d'incendies de forêt et maintenir la
biodiversité, ainsi que pour cultiver des plantes
médicinales et alimentaires. Le rapport souligne
que, bien que les régimes de feux puissent jouer
un rôle important « dans le maintien de la santé
de l'écosystème pour de nombreux types de
forêts », ils devraient avoir lieu en
collaboration avec les décideurs autochtones et
bénéficier de l'incorporation de leurs
connaissances traditionnelles dans la gestion des
incendies de forêt.
La coupe à blanc, en particulier sur les pentes
raides, a également une incidence sur la capacité
d'un bassin hydrographique à modérer le débit de
l'eau et peut entraîner une grave érosion, des
inondations et des glissements de terrain.
L'inondation massive de la communauté de Grand
Forks en 2018 en est un exemple récent. La
dégradation de l'approvisionnement en eau de la
communauté est un autre résultat de la coupe à
blanc, comme cela s'est produit dans la ville de
Peachland, dans le sud de la région intérieure.
L'érosion et les glissements de terrain ont
bouleversé et dégradé l'eau de Peachland pendant
des mois, qui était auparavant fournie par
filtration naturelle. En conséquence, la ville a
été obligée de payer 24 millions de dollars
pour une usine de traitement des eaux. En vertu de
la loi canadienne, les communautés n'ont pas le
droit à l'eau potable et « les sociétés
forestières ne sont pas légalement tenues de tenir
compte des impacts en aval comme les inondations
lorsqu'elles récoltent des arbres dans les bassins
versants ». Cette exemption légale demeure en
vigueur lorsque l'exploitation forestière sur les
pentes et à proximité des bassins versants
communautaires augmente. À cet égard, pour voir
toute l'étendue de l'exploitation forestière dans
toute la province, consultez : les cartes «
Seeing Red » sur le site Web de Conservation
North[4].
Parmi ses mesures recommandées, le rapport du
Sierra Club de la Colombie-Britannique appelle à
la participation des décideurs autochtones à un
processus de gouvernement à gouvernement ainsi
qu'à la révision de toutes les lois en utilisant
comme référence la Loi sur la Déclaration sur
les droits des peuples autochtones de la
Colombie-Britannique. Il recommande
également une « approche des impacts
cumulatifs » qui prend en compte l'impact des
opérations forestières, ainsi que des secteurs
minier, agricole et d'autres secteurs industriels.
Il appelle à la protection immédiate de la petite
quantité de forêts anciennes intactes qui
subsistent et à la gestion des forêts de seconde
venue pour restaurer la résilience et se rétablir
grâce à l'exploitation sélective, à l'éclaircie, à
l'élimination des broussailles et à de nouveaux
systèmes de sylviculture comme alternatives à la
coupe à blanc. Tout cela « améliorera la capacité
totale de transport de carbone de ces forêts et
leur rôle dans la lutte contre les changements
climatiques ».
Surtout, le rapport recommande de s'éloigner d'un
paradigme centré sur le bois et de privilégier la
santé des écosystèmes et la biodiversité (avec le
bois comme l'un des nombreux avantages), et que
cette hiérarchisation soit inscrite dans la
législation.
En examinant le rapport, une chose est claire.
Nous avons besoin de forêts saines pour qu'il y
ait des emplois sûrs et des communautés stables,
ainsi que pour réaliser les nombreuses
utilisations et valeurs de la ressource
forestière. Atteindre ces objectifs est possible,
mais cela nécessite une nouvelle direction.
Notes
1. Ministère
de l'Environnement et de la Stratégie sur les
changements climatiques de la
Colombie-Britannique. « Preliminary strategic
climate risk assessment for British Columbia -
summary of results ». Juillet 2019.
2. Wood,
Peter. « Intact forests, safe
communities », Sierra Club BC,
février 2021.
3. Stop the Spray
BC.
4. Conservation
North.
Cet article est paru dans
Numéro 19 - 19 mars 2021
Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/FO2021/Articles/FO06192.HTM
Site Web: www.pccml.ca
Email: redaction@cpcml.ca
|