Privatisation de l'infrastructure
publique
La Banque de l'infrastructure du Canada et les stratagèmes pour payer les riches
Le gouvernement Trudeau soutient que tous les
prêts de la Banque de l'infrastructure du Canada
(BIC) pour les travaux publics doivent comprendre
une entente pour céder le contrôle local et les
revenus futurs à un partenariat public-privé
(PPP). Cette exigence de privatisation est encore
une autre manoeuvre pour payer les riches. Pour
les monopoles et les cartels, les PPP sont une
source garantie de profits sans risques et un pas
de plus vers un plus grand contrôle de l'économie.
La BIC a présentement 35 milliards de
dollars qui sont disponibles pour le développement
et l'entretien d'infrastructures, dont les
municipalités, le Québec, les provinces et les
territoires ont grandement besoin. Le diktat de
Justin Trudeau de former un « partenariat »
avec de puissants intérêts privés si les
gouvernements locaux veulent un prêt de la BIC
ouvre la porte à la privatisation de travaux
publics actuels et à venir, et à la perte de
revenus et de contrôle que cela entraîne.
En pratique, la privatisation des travaux publics
voudra dire que des intérêts privés exproprieront
sous forme de profit une partie de la nouvelle
valeur créée par les travailleurs du secteur
public. Cette valeur ajoutée expropriée échappera
au secteur public et il en sera de même pour son
contrôle. Par le biais des PPP, la richesse
sociale et le contrôle de l'économie deviennent
encore plus concentrés dans les mains d'une
poignée d'oligarques mondiaux.
L'entreprise publique, y compris
l'infrastructure, devrait être une source majeure
de revenu pour les gouvernements. Avec l'adoption
du néolibéralisme, la privatisation s'impose
partout et les gouvernements cherchent du revenu
ailleurs, habituellement dans une imposition
régressive des particuliers et des frais
d'usagers, et en imposant des compressions dans
les programmes sociaux et les services publics. Ce
qui est criminel, c'est que les autorités
publiques d'une économie moderne dans un pays
aussi vaste que le Canada n'ont pas besoin de
financement privé pour de futurs projets publics.
Elles peuvent emprunter de l'argent des banques et
du trésor publics avec l'unique engagement de
rembourser ces sommes empruntées sur la base de la
future valeur produite par les travailleurs dans
la construction de ces projets.
La pression de Justin Trudeau pour privatiser
l'infrastructure de Mapleton
Certaines municipalités, bien qu'ayant
grandement besoin d'investissements publics pour
l'infrastructure publique, sont réticentes
lorsqu'il s'agit de « former des partenariats avec
les entreprises privées » au sein de PPP,
malgré l'insistance du gouvernement Trudeau. De
nombreuses études ont démontré que les PPP
engendrent un fardeau sur les finances publics et
une perte de contrôle local.
Comme plusieurs autres municipalités, le canton
de Mapleton, en Ontario, a un besoin urgent
d'améliorer sa station d'épuration des eaux usées.
La BIC, qu'on pourrait appeler la Banque de la
privatisation, a offert un prêt de 20
millions de dollars pour financer le projet, tout
en soutenant qu'un PPP devait prendre le contrôle
des aqueducs. Même avant que l'entente ne soit
conclue, le gouvernement Trudeau annonçait que le
« projet pilote » de l'infrastructure de
Mapleton – le prêt de la BIC et le PPP – était le
nouveau modèle à suivre pour les autres
municipalités. L'arrangement financier prévoyait
permettre au « partenaire » privé PPP
d'exproprier un certain profit à partir de la
vente de l'eau de la municipalité et d'obtenir le
contrôle de sa gestion. Il en résulterait des
pertes de revenu annuelles pour les aqueducs
publics locaux et moins de contrôle pour opérer
des changements. Après avoir étudié le prêt de la
BIC et l'offre de PPP, le canton de Mapleton a
annoncé qu'il trouverait les fonds par ses propres
moyens, vraisemblablement par une obligation
municipale, ce qui serait moins onéreux et, en
plus, le service public de la municipalité
pourrait continuer d'en assumer le contrôle. Il a
donc annulé l'entente de PPP de la BIC, mais non
sans avoir à défrayer 367 000 dollars en
frais juridiques liés à la rupture de ce contrat
et cela, sans aucune offre d'aide du gouvernement
fédéral.
Les municipalités espéraient que la BIC
proposerait une alternative à la méthode
habituelle de financer les investissements en
infrastructure par des obligations municipales
obtenues auprès de prêteurs privés. Cependant, la
condition du gouvernement Trudeau voulant que le
prêt de la BIC soit jumelé avec un PPP était
toujours le même pacte avec le diable, quoique
sous une autre forme.
Les obligations municipales des prêteurs d'argent
privés mondiaux siphonnent les municipalités
depuis des décennies. Même devant cette impasse,
certaines municipalités, dont Mapleton, préfèrent
faire un pacte avec un diable qu'ils connaissent
plutôt qu'avec des PPP parasitaires. Ainsi, elles
conservent au moins un semblant de contrôle local
et les études confirment que la perte éventuelle
de revenus due aux paiements d'intérêts était
moins élevée qu'avec les PPP.
On peut se demander pourquoi une institution
publique fédérale, la BIC, exigerait d'une autre
institution publique, une municipalité, qu'elle
s'engage envers des partenaires privés mondiaux
alors qu'il serait possible d'en arriver à une
entente qui ferait en sorte qu'il n'y aurait
aucune dette envers les prêteurs privés et aucune
perte de contrôle local et de futurs revenus.
Pourquoi la BIC n'offrirait-elle pas aux
municipalités des prêts sans intérêt, exigeant
uniquement des frais administratifs et le futur
remboursement du principal lorsque
l'infrastructure nouvelle ou restaurée
commencerait à produire de la valeur ?
Évidemment, pour qu'un tel
arrangement fonctionne sans perte pour le
gouvernement fédéral, celui-ci devrait lui-même
arrêter d'emprunter aux prêteurs privés et adopter
la pratique digne d'un gouvernement moderne qui
est de se prêter lui-même de l'argent qu'il
rembourserait ou de renflouer ses coffres sur la
base de la valeur produite par l'éventuel
développement de l'économie. Mais une telle
direction viendrait à l'encontre de l'exigence
néolibérale voulant que tout projet économique,
tant privé que public, doit servir les intérêts
privés de l'oligarchie mondiale et concentrer la
richesse sociale et le pouvoir dans les mains de
quelques-uns.
Ce que les Libéraux de Justin Trudeau et la BIC
appellent leur « modèle de financement
novateur » n'est autre chose qu'une manoeuvre
pour payer les riches, pour céder les fonds et les
projets publics à de puissants intérêts privés.
Même les 35 milliards accordés à la BIC comme
fonds de démarrage laissent songeur puisqu'ils
proviennent du revenu général du gouvernement, qui
est renfloué grâce à des emprunts sans précédent
des prêteurs mondiaux.
Par le biais de ces emprunts gouvernementaux à
des intérêts privés et la prolifération de PPP,
les fonds publics pour les programmes sociaux et
l'infrastructure et tout revenu public subséquent
sont engloutis dans les coffres des riches. Les
déficits et la dette nationale augmentent et les
experts et les analystes médiatiques sèment la
panique et exigent des compressions aux programmes
sociaux, de nouveaux frais d'usager toujours plus
élevés pour les services publics et une plus
grande imposition des particuliers.
C'est ainsi que le contrôle local
d'infrastructures publiques créées après des
années d'édification nationale se désagrège à la
suite de la destruction nationale par des
oligarques mondiaux qui s'immiscent dans chaque
cellule de l'économie et siphonnent de plus en
plus de valeur pour garnir leurs coffres. Il
s'ensuit que les autorités publiques locales et le
peuple se retrouvent avec moins d'argent pour les
travaux publics et les programmes sociaux, et
moins de contrôle sur leur vie, s'enfonçant dans
un gouffre qui s'approfondit à leurs dépens.
La promesse électorale de Justin Trudeau
s'envole en fumée
Lors de l'élection fédérale de 2015, le
Parti libéral de Justin Trudeau s'était engagé à
ce que la BIC vienne en aide aux municipalités
pour construire et entretenir leurs
infrastructures défaillantes. Justin Trudeau n'a
jamais mentionné que les prêts de la BIC seraient
conditionnels à des obligations envers les PPP
permettant de céder le contrôle et l'argent à des
intérêts privés mondiaux. Après l'accession au
pouvoir de son parti, il a fait appel à Larry
Fink, un des principaux oligarques du cartel
d'investissement BlackRock, et à d'autres
oligarques de cet acabit, qui ont exercé des
pressions et organisé pour ouvrir les
municipalités et d'autres secteurs de l'économie
aux investisseurs mondiaux. Ils ont insisté qu'un
PPP devait être lié à chaque prêt de la BIC, ce
que le gouvernement Trudeau a accepté. Ces
exigences et autres mesures de destruction
nationale vont à l'encontre de l'édification
nationale et du droit du peuple de contrôler
l'économie et toutes les questions qui affectent
sa vie.
La
BIC offrait l'occasion de tenter quelque chose de
différent, une agence publique de financement sans
liens directs avec les prêteurs privés et leurs
versements d'intérêts faramineux à la suite des
emprunts du gouvernement fédéral et aux
obligations municipales. Une telle direction
ferait en sorte que les travaux publics seraient
financés par les emprunts gouvernementaux sans que
ne s'en mêlent les cartels privés, que ce soit
sous forme de prêteurs d'argent ou de PPP. Le
contrôle et le profit de l'infrastructure réalisée
resteraient dans les communautés et engendreraient
un plus grand revenu pour les municipalités et des
frais d'usager réduits pour le peuple. Cette
nouvelle direction ne devait pas se matérialiser
et, en fait, le gouvernement ne fait qu'aggraver
la situation.
Les voix pour une nouvelle direction pour
l'économie et l'édification nationale
s'amplifient. À qui l'économie ? Au
peuple ! Qui décide ? Le peuple !
Qui contrôle ? Le peuple ! Joignez-vous
à la discussion et au mouvement pour une nouvelle
direction de l'économie.
Cet article est paru dans
Numéro 19 - 19 mars 2021
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