Un vaste appui pour les travailleuses en grève des centres de la petite enfance
au Québec
Un appel à prendre position contre une loi de retour au travail
- Ma place au travail -
L'organisation de parents « Ma place au travail » qui demande
que l'accès aux garderies devienne un droit garanti par la loi appelle
les parents à appuyer fermement la lutte des travailleuses et des
travailleurs des Centres de la petite enfance (CPE) à la défense de
leurs droits. Forum ouvrier reproduit la lettre que l'organisation
recommande aux parents d'envoyer à des ministres du gouvernement du Québec.
La lettre est écrite en réponse à la déclaration de la Présidente du
Conseil du trésor qu'une loi de retour au travail fait partie des «
outils » que le gouvernement a à sa disposition pour mettre fin à
la grève dans les CPE.
***
À l'intention de : Mathieu Lacombe - député de Papineau à
l'Assemblée nationale du Québec, ministre de la Famille ; Sonia
LeBel - députée de Champlain, présidente du Conseil du trésor ;
François Legault, premier ministre du Québec.
Objet : Réaction à la grève illimitée du réseau des CPE
Cette
lettre a pour but d'exprimer l'appui sans réserve des parents tels que
représentés par Ma place au travail envers les éducatrices et le
personnel de soutien des CPE.
Si le gouvernement désire éviter aux familles les conséquences d'une
grève générale illimitée, nous l'encourageons vivement à régler cette
situation par une entente négociée plutôt qu'en ayant recours à
l'application d'une loi spéciale.
Le casse-tête que pourrait engendrer ce débrayage ne justifie pas
l'imposition d'une mesure qui brime le droit de revendiquer
l'amélioration des conditions de travail et la valorisation du réseau
public de services de garde à la petite enfance. Nous craignons qu'en
contraignant les travailleuses et travailleurs des CPE à retourner au
travail, vous
exacerbiez le conflit : qu'arrivera-t-il s'ils et elles se
découragent au point de quitter le réseau qu'elles s'évertuent à
protéger ? Leurs conditions de travail doivent être impérativement
améliorées.
La pénurie de places abordables et de qualité en services de garde
éducatifs à l'enfance nuit à la conciliation travail/famille depuis de
nombreuses années. Les bris de services se multiplient en raison de
l'exode du personnel des CPE. La qualité des services se détériore avec
chaque départ. À cela s'ajoute l'angoisse qu'éprouvent des milliers de
parents en attente d'une place, ou du désespoir qui habite ceux et
celles contraints à sacrifier leurs carrières, leurs études ou leur
santé mentale en réponse à cette crise.
Ce sont surtout nos enfants qui en paient le prix. Ceux à besoins
particuliers qui ne reçoivent pas les services spécialisés dont ils ont
besoin. Ceux qui doivent composer avec des changements abrupts et
continuels qui fragilisent leur intégration dans un milieu de garde, dûs
aux départs d'éducatrices. Ceux qui n'ont qu'un temps limité pour
interagir avec ces dernières, épuisées par la surcharge de travail
engendrée par le manque de temps pédagogique pour compléter les dossiers
des enfants. Les travailleuses et travailleurs sont la clé de voûte des
CPE et nous réclamons que le gouvernement reconnaisse le rôle essentiel
qu'ils et elles jouent dans la vie de nos tout-petits.
Nous
nous opposons à ce que le gouvernement justifie ses tactiques de
négociation à partir des difficultés que nous éprouvons actuellement à
concilier nos responsabilités familiales et professionnelles. Nous le
prions plutôt d'adhérer aux changements proposés par celles et ceux
chargés d'assurer le bien-être, la sécurité et le développement
harmonieux de nos enfants. Ce faisant, nous vous demandons de leur
accorder les ressources nécessaires pour y parvenir. Vous parlerez en
notre nom si vous acquiescez à leurs demandes.
Au Québec, nous avons hérité d'un réseau de services éducatifs
publics de qualité, fondés sur un modèle de gouvernance par les parents
et pour la communauté. Aboutissement des luttes de regroupements
féministes et populaires, nos CPE ont permis d'assurer le développement
global de nos enfants en plus d'accroître notre richesse économique
collective. Grâce à eux, le Québec s'est hissé au sommet du palmarès
mondial du taux d'employabilité chez les femmes âgées de 20
à 54 ans.
Nous espérons de tout coeur que le gouvernement répondra aux demandes
des employé(e)s en CPE, qui sont également celles des parents qui ont
la chance de les fréquenter, mais aussi de ceux qui espèrent un jour que
leur enfant s'y épanouisse.
Cordialement,
D'un parent fatigué, mais solidaire
Cet article est paru dans
Numéro 116 - 6 décembre 2021
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