Le président américain Joe Biden est prêt à avoir recours à la
Garde nationale dans les ports privés de Los Angeles et de Long Beach
sur la côte ouest du pays où, depuis le 16 novembre, 84
navires attendent d'être déchargés. Il y a aussi un arriéré de
conteneurs devant être transportés aux entrepôts. Lorsqu'on lui a
demandé
le 31 octobre, lors d'une assemblée publique sur CNN, s'il
envisageait avoir recours à la Garde nationale, le président Biden a
répondu : « Oui, absolument, certainement je le ferais. Mais en
plus, il faut faire entrer ces navires et les décharger. » Il a
aussi dit qu'il se servirait des hommes et des femmes de la Garde
nationale
comme camionneurs pour transporter les biens des ports aux entrepôts,
ajoutant une menace à sa réponse : « La réponse est oui, si on ne
peut pas bouger..., augmenter le nombre de camionneurs, c'est ce que
nous sommes en train de faire. »
Les deux terminaux à conteneurs de Los Angeles et de Long Beach sont
de propriété privée et traitent près de 40 % de toutes les
marchandises entrant aux États-Unis. Le président a aussi clairement
démontré quels intérêts il sert : « Je veux remettre les ports en
marche, et je veux que les chemins de fer et le terminal ferroviaire et
les camions dans les ports soient prêts à bouger, parce que j'ai Walmart
et d'autres qui disent 'Nous allons transporter du matériel du port à
nos entrepôts'. »
Avant l'assemblée publique, Joe Biden avait rencontré des représentants
de Walmart et de compagnies semblables pour discuter de forcer les
travailleurs portuaires à travailler un horaire de 24 heures par
jour, 7 jours sur 7. Cela contrevient aux conventions
collectives existantes des près de 5 000 travailleurs
portuaires
de Los Angeles et de Long Beach, qui sont membres de la section
locale 13 du Syndicat international des débardeurs et magasiniers
(SIDM), mais cela a été accepté à la suite des pressions intenses du
président et des grandes entreprises. Les travailleurs portuaires
luttent aussi pour obtenir de l'équipement de protection individuel (ÉPI)
suffisant et
des conditions de travail sécuritaires, compte tenu des préoccupations
qui persistent en raison de la COVID-19. À cause du manque d'ÉPI et de
conditions sécuritaires, plus de 700 membres ont contracté la
COVID-19 et au moins 13 sont décédés. Maintenant que le travail se
fait 24/7, les inquiétudes au sujet de la sécurité
persistent, ce que Biden a totalement ignoré.
On peut se demander pourquoi – compte tenu qu'il dit « vous devez
faire entrer ces navires et les décharger » – il ne parle pas
d'utiliser les ports publics à San Francisco et à Oakland, qui
fonctionnent 24 heures par jour, 7 jours par semaine depuis
longtemps déjà. Il n'y a pas d'arriéré dans ces ports. Les navires
pourraient y
accoster tout aussi facilement, mais ils ne le font pas. Tout est
concentré sur les ports de Los Angeles et de Long Beach. La section
locale 10, qui représente les travailleurs portuaires d'Oakland et de
San Francisco, a dit que les travailleurs sont prêts et attendent. Elle
remet en cause la décision des expéditeurs – les compagnies comme
Walmart, et
maintenant le président Biden – de refouler des navires à Los Angeles et
à Long Beach. À tout le moins, les conditions ont été créées pour
donner libre cours aux menaces et au recours potentiel à la Garde
nationale contre les travailleurs portuaires et les camionneurs.
En outre, le problème auquel les camionneurs sont confrontés – comme
les millions de travailleurs qui démissionnent de leur travail – est l'absence de
conditions de travail sécuritaires, de salaires et d'avantages sociaux
qu'ils jugent acceptables. Le salaire minimum fédéral de 7,25 dollars,
très inférieur au seuil de pauvreté, n'a pas été augmenté depuis
plusieurs années, quoique 29 États ont un taux supérieur, soit
généralement 10 dollars l'heure ou moins. Même la revendication
de 15 dollars l'heure, que certains monopoles de restauration
rapide offrent maintenant, laisse les familles dans une situation de
pauvreté à cause des augmentations importantes du coût de la nourriture,
de
l'essence, des logements et des soins de santé.
Le transport de conteneurs de marchandises des ports aux entrepôts de
détail requiert près de 2 millions de camionneurs aux États-Unis. Selon
Joe Biden et les monopoles du camionnage, il y a une « pénurie » de
près de 80 000 camionneurs. Comme partout ailleurs cependant,
que ce soit dans les soins de santé, dans les
établissements de restauration rapide, les magasins à un dollar ou dans
plusieurs autres endroits de travail, le problème demeure les conditions
non sécuritaires et les bas salaires, y compris le temps
supplémentaire obligatoire et l'absence de régimes d'assurance-santé.
Avant 1980, en moyenne, un camionneur syndiqué gagnait plus
de 96 000 en dollars d'aujourd'hui, et il produisait beaucoup
plus en valeur saisie par les propriétaires privés. En 1974, le
membership du syndicat des Teamsters, le principal syndicat à
représenter les camionneurs, était de plus de 2 millions de
membres.
Aujourd'hui, il y a moins de 75 000 membres syndiqués. Le
salaire médian des camionneurs est d'environ 45 260
dollars, et 40 % d'entre eux n'ont pas d'assurance-santé. C'est en
grande partie le résultat de la dérèglementation de l'industrie
en 1980, qui a fortement accru la monopolisation et miné les
salaires et les conditions de travail des camionneurs, en plus d'ouvrir
la voie à plus de compagnies non syndiquées.
Les camionneurs portuaires se joignent aux millions d'autres
travailleurs qui refusent de travailler dans de telles conditions. Les
travailleurs de la restauration rapide et des magasins à un dollar, par
exemple, démissionnent en groupes, placardant les portes d'enseignes
disant « Fermé parce que nous démissionnons ». La majorité des
démissions ont lieu dans les emplois à bas salaires qui n'ont pas
d'assurance-maladie, dans des conditions où les travailleurs ont affaire
au public et où la COVID-19 est toujours un problème. Parmi les
personnes qui démissionnent, il y a les travailleurs des services de
garde, qui ne gagnent très souvent que 13 ou 14 dollars
l'heure. Environ de 3 à 4 millions de personnes démissionnent à
chaque mois.
Les millions de démissions sont une forme de résistance, comme le
sont les grèves déclenchées par des milliers de travailleurs. Les
travailleurs prennent position en refusant de travailler à moins d'avoir
des conditions sécuritaires, des salaires plus élevés et des régimes
d'assurance-santé. Ils expriment aussi leur conscience sociale en
exigeant des
conditions sécuritaires pour tous.