Manitoba
Le corps professoral de l'Université du Manitoba en grève à la défense de ses droits et de l'éducation publique
Les professeurs, chargés de cours et libraires,
plus de 1 200 membres de l'Association
du corps professoral de l'Université du Manitoba
(UMFA), ont déclenché la grève le 2 novembre
après que les négociations entre l'association et
l'administration de l'université ont abouti à une
impasse. La principale pierre d'achoppement
touche aux augmentations salariales nécessaires
pour recruter et retenir le personnel dont les
salaires ont été gelés depuis 2016. Ce gel
fait en sorte que, selon les données de
Statistique Canada, les salaires du personnel
d'enseignement à temps plein à l'université
arrivent, au deuxième rang des salaires moyens les
plus bas sur les 15
plus grandes universités canadiennes qui se
consacrent à la recherche.
Ligne de piquetage des travailleurs en grève
devant la législature du Manitoba à
Winnipeg,
9 novembre 2021
Plus tôt cette année, la Cour d'appel du Manitoba
a confirmé la décision du tribunal de première
instance qui avait jugé que le gouvernement avait
agi de façon illégale du fait qu'il s'était ingéré
dans les négociations à l'université en 2016.
Cependant, l'UMFA rapporte que l'université n'a
pas encore indemnisé les membres de l'UMFA
pour les augmentations de salaires qui avaient été
illégalement retirées de la table de négociation.
L'UMFA rapporte que le président de l'Université
du Manitoba, Michael Benarroch, après avoir
confirmé que les salaires avaient baissé de 8 % si
l'on considère l'inflation, « a avoué que le
gouvernement l'avait une fois de plus enjoint à
offrir des augmentations salariales conformes à la
Loi sur la viabilité des services publics
».
Le
gouvernement du Manitoba a déposé la Loi sur
la viabilité des services publics
en 2017. Elle a été adoptée à l'Assemblée
législative et, bien qu'elle n'ait jamais été
appliquée, elle a été invoquée comme «
mandat » pour imposer des restrictions
salariales aux travailleurs du secteur public. Le
plafond salarial est
de 0 % pour chacune des deux premières
années d'une entente de 4 ans. En 2020,
un juge de la Cour du Banc de la Reine avait
décidé que la loi violait le droit
des 120 000 membres du syndicat du
secteur public à une négociation collective en
bonne et due forme. Le gouvernement en a appelé de
la décision et, en
octobre, la Cour d'appel du Manitoba a infirmé la
décision de la Cour de première instance. Le
Partenariat à la défense des services publics, un
groupe de syndicats représentant plus de
100 000 travailleurs du Manitoba, fera une
demande d'autorisation d'appel auprès de la Cour
suprême du Canada.
Dans un bulletin d'information publié avant le
déclenchement de la grève, l'UMFA a informé les
étudiants :
« La séance actuelle de négociation touche à
plusieurs questions, y compris l'équité, la
diversité et l'inclusion, les services de garde,
la propriété intellectuelle et plus encore. Le
point le plus important sont les salaires. Les
salaires de l'UMFA sont gelés depuis 2016,
une mesure prise dans le cadre de l'ordre du jour
d'austérité enchâssé dans la
loi non promulguée, Loi sur la viabilité des
services publics (LVSP), qui a été invoquée
pour geler les salaires dans le secteur public.
Alors que la loi a servi à justifier les gels
salariaux pour les membres de l'UMFA, les autres
travailleurs du secteur public comme les
infirmières et les travailleurs d'Hydro ont pu en
arriver à des ententes
supérieures à ce qui était proposé dans la
LVSP. »
La
grève jouit de l'appui de l'Union des étudiants de
l'Université du Manitoba, de plusieurs groupes
d'étudiants sur le campus, du Syndicat des
infirmières du Manitoba et d'autres syndicats
ainsi que de la Fédération du Travail du Manitoba.
Le sous-financement et les bas salaires à
l'université affectent non seulement la communauté
universitaire mais la société dans son ensemble.
Un Rassemblement pour la santé a été organisé
devant l'Assemblée législative du Manitoba
le 9 novembre par des chargés de cours de la
faculté des soins infirmiers dont les 54
professeurs sont membres
de l'UMFA. Le même jour, une lettre signée
par 40 personnes de la faculté des soins
infirmiers a été livrée à Audrey Gordon, ministre
de la Santé et des Soins aux aînés et ministre de
la Santé mentale, du Mieux-être et du
Rétablissement, laquelle souligne la nécessité de
créer « une échelle de traitement qui va attirer
de nouveaux professeurs
et retenir les professeurs actuels qui seront en
mesure de relever le défi de préparer les
infirmières au système de santé en crise en raison
de la pénurie d'infirmières, d'une pandémie et
d'une violence interpersonnelle et une détresse
morale à la hausse aux premières lignes. »
Les auteurs de la lettre soulignent que, dans les
deux dernières
années, 15 % des membres de la faculté
de soins infirmiers ont pris leur retraite ou ont
quitté la faculté et que les enseignants en soins
infirmiers et les professeurs adjoints gagnent des
salaires qui sont inférieurs à ceux des
infirmières licenciées. Ils ont fait valoir que la
grève a des répercussions sur « tous les secteurs
de la
main-d'oeuvre, particulièrement le secteur de la
santé » puisqu'une grève prolongée «
retardera la remise de diplômes à près de 110
étudiants en soins infirmiers au
printemps 2022, aggravant davantage la
pénurie du personnel infirmier qui sévit au
Manitoba ».
Dans le secteur de la santé, le public a pu
constater les pénuries de personnel qualifié, mais
ce ne sont pas uniquement les soins de santé qui
sont touchés. L'ingérence du gouvernement par son
imposition de salaires qui ne correspondent même
pas au coût de la vie accroît les difficultés
liées au recrutement et à la rétention dans les
services publics, y
compris les éducateurs, et l'impact est
considérable. La revendication de l'UMFA que le
gouvernement cesse son ingérence est juste et
jouit d'un vaste appui.
Par sa grève, le corps professoral de
l'Université du Manitoba défend ses droits et ceux
des étudiants, et affirme que ses conditions de
travail sont les conditions d'apprentissage des
étudiants. Il défend et lutte aussi pour le
système d'éducation public duquel dépend toute la
société.
Cet article est paru dans
Numéro 106 - 12 novembre 2021
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