Commentaires de porte-paroles d'organisations de défense des chômeurs et chômeuses

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Forum ouvrier publie ci-dessous les commentaires de trois porte-paroles d'organisations qui ont participé aux actions pour revendiquer une réforme de l'assurance-emploi et qu'il a interviewés à propos de leur travail.

France Simard, Mouvement Action Chômage Lac-Saint-Jean

La pandémie a fait ressortir avec force la lacune profonde d'une loi désuète qui ne correspond pas à la réalité du travail du 21e siècle et qui prive un très grand nombre de personnes sans emploi de prestations d'assurance-emploi auxquelles elles devraient avoir droit. Il faut qu'il y ait une réforme en profondeur de l'assurance-emploi et il faut que nous soyons consultés, on ne veut pas qu'ils la fassent tout seuls de leur côté. On veut être assis à la même table, parce qu'on voit les lacunes sur le terrain, nous avons la réalité-terrain de notre côté. Nous voulons un régime de l'assurance-emploi juste et universel pour tous les citoyens du Canada. Nous avons fait un point de presse le 7 décembre où nous avons présenté les revendications de la campagne, avec l'appui de la CSN et de la FTQ qui ont joint leurs voix à la nôtre.

France Simard en conférence de presse à Chicoutimi le 7 décembre 2020

En ce qui concerne la pandémie, celle-ci a amené son lot de surplus de travail. Nous avons eu tous des surplus de travail épouvantables. Il y a eu beaucoup de changements dans les programmes, surtout au début. Tout le monde a agi de bonne foi, mais le départ a été boiteux. Service Canada a fermé ses portes pendant un bout de temps. Maintenant ils offrent les services, mais de manière très réduite alors ils se tournent vers nous. Nous avons connu une grande augmentation de gens à qui il fallait répondre, il fallait répondre aux interrogations d'à peu près tout le monde. Il a fallu apprendre les programmes très vite. Une fois que la PCU (Prestation canadienne d'urgence) a été installée, les choses se sont calmées. Nous avons fait beaucoup plus d'aide individuelle que d'habitude. Ce n'est pas notre point majeur. Nous sommes financés pour faire de la défense collective, mais depuis le mois de mars notre accent a été sur l'aide individuelle. Nous avons réussi à passer au travers et à répondre à tout le monde. Personne ne voulait vivre une crise comme celle-là, mais elle est là. Nous avons été capables de relever le défi. Je suis fière de mon équipe, une équipe petite mais solide. On voit qu'on n'a pas travaillé pour rien depuis toutes ces années.

Fernand Thibodeau, Aide et soutien aux travailleuses et travailleurs des secteurs saisonniers (ASTS, dans le nord du Nouveau-Brunswick)

Le 7 décembre, nous sommes allés placer des arbres de Noël devant le bureau du centre d'emploi, avec des clochettes noires pour illustrer le problème du trou noir. La situation de nos gens s'est améliorée un peu avec les programmes d'urgence du gouvernement fédéral, mais il ne faut pas oublier que le problème de l'assurance-emploi n'est pas réglé, entre autres le problème du trou noir. Dans la région où nous sommes actifs, la péninsule acadienne, Baie-Sainte-Anne, Pointe-Sapin, etc., entre 60 et 70 % des gens travaillent dans des industries saisonnières, comme les usines de poisson, la pêche, la tourbe, la forêt, le tourisme et d'autres industries.

Fernand Thibodeau, porte-parole de l'ASTS

Un problème que nous avons c'est que les bureaux de l'assurance-emploi ont rouvert, mais ils sont limités dans leurs services. Ils t'assignent un agent qui te rappelle dans les 24-48 heures. Très souvent quand les gens qui ont besoin de faire une demande d'assurance-emploi vont pour ouvrir leur dossier sur Internet, ils ne peuvent pas l'ouvrir, souvent c'est écrit que leur dossier est expiré, plusieurs ne reçoivent pas leur relevé d'emploi de leur employeur, alors c'est nous qu'ils viennent voir pour faire une demande d'assurance-emploi. Il y a des gens qui sont analphabètes, qui ont des troubles d'apprentissage, aussi il y beaucoup de crainte de faire des erreurs dans sa demande car l'assurance-emploi est extrêmement judiciarisée. J'ai fait moi-même environ 400 demandes d'assurance-emploi. Je dois faire cela chez moi parce que notre comité ne reçoit pas de financement du gouvernement provincial. Nous sommes tous des bénévoles. Nous aidons aussi les gens sur d'autres questions, comme les montants auxquels les gens âgés sont admissibles au niveau provincial en ce qui concerne la COVID-19, on les aide à renouveler leurs plaques d'immatriculation, entre autres choses. Je peux dire en toute franchise que cette année, si le comité de l'ASTS n'avait pas été là pour les gens, cela aurait été un cauchemar.

La pandémie a jeté un éclairage sur ce qu'on dit depuis plusieurs années, que le programme de l'assurance-emploi est désuet. On veut que le gouvernement travaille avec nous pour effectuer une réforme complète de l'assurance-emploi.

Line Sirois, Action-Chômage Côte-Nord

Le 7 décembre, nous avons fait un point de presse devant les bureaux de Service Canada à Forestville. Nous avons fait ce que nous avons toujours fait, nous avons amené un arbre de Noël décoré de trous noirs. Nous étions avec la CSN. Nous avions convoqué les médias, et nous avons demandé que les mesures que le gouvernement Trudeau a mises en place de façon temporaire pour la pandémie deviennent des mesures permanentes. Dans cette réforme temporaire, le gouvernement Trudeau a établi à 420 heures le nombre d'heures de travail requises pour se qualifier à l'assurance-emploi, on ne veut pas revenir à des exigences allant jusqu'à 700 heures de travail pour se qualifier comme cela se produit dans notre région. Le gouvernement a dit qu'il doit consulter avant de faire une réforme de l'assurance-emploi. Oui il faut que tout le monde soit consulté, mais pendant ce temps les mesures temporaires mises en place en raison de la pandémie doivent devenir des mesures permanentes. Nous voulons une réforme en profondeur, et nous ne voulons pas que cela finisse en promesse électorale.

Action à Forestville le 7 décembre 2020. Line Sirois est la quatrième à partir de la gauche.

Présentement le taux de chômage est en train de baisser. Nous avons dit aux journalistes que peu importe que le taux de chômage baisse ou augmente, nos gens qui vivent du travail saisonnier ne travailleront pas plus ou moins d'heures. Plus le taux de chômage officiel est bas, plus le travailleur doit travailler d'heures pour se qualifier et il a droit à moins de semaines de prestations. À l'inverse, plus le chômage est élevé, le nombre d'heures de travail pour se qualifier est plus bas et le travailleur a droit à plus de semaines de prestations. Nous voulons que cela cesse, qu'on élimine le taux de chômage comme critère pour identifier les heures de travail requises et le nombre de semaines de prestations, et établir le même nombre d'heures et le même nombre de semaines pour tout le monde de manière suffisante entre autres pour que le phénomène du trou noir, qui est très fort chez nous, soit éliminé.

Dans notre travail dans les conditions de la pandémie, nous donnons beaucoup d'informations téléphoniques. Nous recevons peu les gens au bureau parce que nous sommes capables de régler les dossiers par téléphone. Nous recevons beaucoup d'appels de gens qui attendent encore leurs prestations d'assurance-emploi, qui n'ont pas reçu encore de réponse de Services Canada. Le transfert ne s'est pas très bien fait entre la PCU et l'assurance-emploi à partir de la fin du mois de septembre (la PCU s'est terminée à la fin septembre 2020 en faveur de mesures temporaires de l'assurance-emploi qui augmentent l'admissibilité par rapport aux critères habituels extrêmement contraignants – Note de FO). Il semble que Service Canada manque de personnel.

Nous continuons la bataille pour la défense des droits de tous les chômeurs.

(Photos : MEPAC, ASTS, Action-Chômage Côte Nord)


Cet article est paru dans

Numéro 85 - Numéro 85 - 17 décembre 2020

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Commentaires de porte-paroles d'organisations de défense des chômeurs et chômeuses


    

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