Les travailleurs et travailleuses de la santé ont droit au plus haut niveau de protection possible
- Entrevue avec Marjolaine Aubé -
Marjolaine Aubé est la présidente du
Syndicat des travailleuses et travailleurs du
CISSS (Centre intégré de santé et de services
sociaux) de Laval-CSN.
Forum ouvrier : Quelle est la
situation au CISSS de Laval en ce qui concerne les
éclosions de COVID-19 ?
Marjolaine Aubé : Nous nous
relevons d'une éclosion au CHSLD Idola-Saint-Jean
pendant laquelle 31 patients ont été infectés
de même que 35 préposés aux bénéficiaires,
dont des préposés à l'entretien ménager. Seize
patients sont décédés, les autres se sont
rétablis. Il n'y a pas eu de décès parmi les
employés, ils se sont rétablis, mais certains ont
des séquelles, comme des maux de tête, des
essoufflements, de la fatigue chronique. Les
employés et les patients à Idola-Saint-Jean se
sont fait dépister trois fois par semaine. Pour
l'instant, la crise s'est résorbée.
Au CHSLD Fernand-Larocque, nous avons eu deux
travailleurs infectés.
Pour l'instant, nous n'avons pas d'autres cas
d'infection. Nous craignons cependant une reprise
des éclosions à la suite de la période des Fêtes
si les règles de la Santé publique ne sont pas
respectées.
FO : Quelles sont vos
principales demandes en ce moment pour freiner la
COVID-19 ?
MA : Notre principale demande
c'est que des équipements de protection
individuelle adéquats soient fournis aux
travailleurs et travailleuses de la santé. Nous
avons en tête principalement les masques N95 pour
contrer la transmission du virus par voie
d'aérosols, la transmission aérienne. Il y a de
plus en plus de
chercheurs et d'organisations qui disent que la
COVID est transmise également par aérosols,
particulièrement dans des pièces fermées,
surpeuplées et sans ventilation adéquate.
L'Organisation mondiale de la santé, l'Agence de
la santé publique du Canada et d'autres
organisations ont fait état du risque de
transmission par voie d'aérosols. Dans notre
CISSS, plusieurs systèmes de ventilation sont
vétustes, en particulier dans nos CHSLD et encore
plus dans notre Centre-Jeunesse. Nous voulons que
le masque N95 soit accessible à l'ensemble du
personnel de la santé. Pour l'instant, l'Institut
national de santé publique du Québec (INSPQ) nie
toujours le problème.
Nous avons eu la confirmation qu'à Laval, dans un
entrepôt, il y a présentement un inventaire
de 415 000 masques N95. L'inventaire est
contrôlé par le gouvernement. Nous avons droit
d'avoir des masques N95 dans certains cas
seulement, par exemple aux soins intensifs si le
patient est intubé. Nous avons offert à la PDG de
faire
un projet-pilote à Laval. Nous voulons fournir à
tout le personnel des zones rouges des masques N95
pour voir si cela fera une différence. Nous
espérons que le projet-pilote aura lieu. Nous
demandons aussi des rapports de ventilation
partout, une évaluation de la qualité de l'air.
Nous avons porté plainte à la CNESST (Commission
des normes,
de l'équité, de la santé et de la sécurité du
travail) au sujet de la zone rouge à
Fernand-Larocque et ils ont dû améliorer la
qualité de l'air.
En ce qui concerne la CNESST, la CSN a déposé une
requête en cour pour délier les inspecteurs de la
CNESST de l'INSPQ. La plainte n'est pas dirigée
contre la CNESST, mais elle vise à lui redonner
son pouvoir en vertu de la Loi sur la santé et
la sécurité du travail (LSST). Les
inspecteurs de la CNESST nous disent que ce n'est
plus la loi qui prime dans leur travail mais les
recommandations de l'INSPQ, qui changent
régulièrement. Or la LSST exige des employeurs
qu'ils prennent toutes les protections nécessaires
pour assurer la santé et la sécurité des
travailleurs et des travailleuses.
Nous revendiquons aussi la création d'une
entreprise publique au Québec de production des
ÉPI, des équipements de laboratoires et de
respirateurs. Il n'est pas normal d'être à la
merci de qui que ce soit quand il est question
d'avoir les équipements nécessaires. Nous devons
être autosuffisants dans ce domaine. Cette
proposition a été mise de
l'avant par un conseiller syndical de la CSN et
l'exécutif du syndicat CSN au Centre universitaire
de santé McGill et nous l'appuyons totalement.
FO : Veux-tu dire quelque
chose en conclusion ?
MA : Notre slogan est « On
lâche rien ! » Nous sommes au combat
pour obtenir les masques N95 et nous sommes au
combat pour tout ce qui concerne la santé et la
sécurité des travailleurs et travailleuses et du
public.
Cet article est paru dans
Numéro 79 - Numéro 79 - 19 novembre 2020
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