Une situation inacceptable dans les centres de soins de longue durée au Manitoba

Le Manitoba fait face à une propagation incontrôlée de la COVID-19, et les responsables et les travailleurs de la santé disent que le système de santé est submergé. Il y a maintenant 7 011 cas actifs, et un nombre record de nouveaux cas et de décès chaque jour. Le Manitoba a 172 décès dus à la COVID-19, la plupart d'entre eux enregistrés pendant la deuxième vague qui a débuté en octobre.

Plus de trente centres de soins de longue durée et de résidences assistées connaissent des éclosions de COVID-19 et au moins 642 cas.

Soixante-quatre décès se sont produits uniquement dans deux centres de soins de longue durée de Winnipeg, Maples et Parkview Place, et les éclosions s'y poursuivent. Les centres appartiennent à Revera, qui est une filiale à part entière de l'office d'investissement des régimes de pensions du secteur public (Investissements PSP), une société d'État fédérale, qui exploite les centres pour le profit. L'étendue des éclosions et la négligence sérieuse envers les patients ont été révélées uniquement après que des membres du personnel aient contacté le 911 le 7 novembre. Les paramédics qui ont répondu aux appels ont trouvé des résidents décédés ou gravement malades, mal nourris et déshydratés. À ce moment-là, le centre Maples avait 121 résidents et 55 membres du personnel qui étaient infectés.

Revera a affirmé que le niveau des effectifs était adéquat au centre Maples, invoquant des niveaux d'effectifs « normaux » pendant le quart de travail du 7 novembre - 19 préposés aux bénéficiaires et 7 infirmières - et l'administration sanitaire a confirmé ces chiffres publiquement. Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui représente les aides-soignants, a émis une déclaration le 8 novembre qui révèle que cette information est fausse, et clarifie qu'en fait il y avait seulement 7 préposés pour 200 patients. Revera a dit que cette « erreur » de sa part était due au fait qu'il parlait des travailleurs qui devaient venir travailler et non de ceux qui étaient au travail pour prodiguer les soins. Le centre Maples n'a pas non plus signalé les décès dus à la COVID comme il est tenu de le faire. Revera a dit qu'il ne l'a pas fait parce que le personnel infirmier fournissait des soins à ce moment-là et n'était pas en train de « remplir des formulaires ».

L'unité des homicides de la police de Winnipeg fait présentement enquête sur les faits, et l'Autorité régionale de santé de Winnipeg (WHRA) fait un examen des conditions de sécurité. Plusieurs ont demandé que la WHRA prenne le contrôle des centres de soins de longue durée, dont l'expérience a montré qu'on ne peut pas leur confier les soins de nos aînés. Il est clair que la recherche du profit l'a emporté sur toute autre chose. Même un niveau d'effectifs « normal » aurait été entièrement inacceptable compte tenu des besoins de soins beaucoup plus grands et alors que tous savent que ce vieux « niveau normal » n'a jamais été suffisant. Alors que des éclosions actives sévissent, permettre que les niveaux d'effectifs tombent en-dessous des exigences établies démontre, selon Forum ouvrier,  que le maintien du contrôle par ceux dont le motif est le profit maximum doit être interdit.

Ceux qui profitent directement de l'insuffisance des effectifs et du refus de s'occuper des résidents/patients et du personnel, de même que ceux au gouvernement qui permettent que ces choses se produisent et plaident l'ignorance doivent rendre des comptes. Les travailleurs doivent identifier et frapper ce mécanisme qui permet que cette situation se poursuive.

Une fois de plus, le refus d'appliquer les recommandations des travailleurs de la santé a mené à une nouvelle tragédie et à des décès qui auraient pu être évités. Le mécanisme qui perpétue cette situation doit être identifié et démantelé. L'appel du SCFP à une enquête sur les centres de soins de longue durée en octobre est demeuré sans réponse de la part du gouvernement, et la même chose s'est produite avec ses recommandations de ratios personnel/patients qui permettraient au personnel de fournir des soins de manière humaine[1]. Le Manitoba requiert 3,6 heures de soins par jour par résident. Le Syndicat des infirmières du Manitoba (MNU), qui réclame depuis des années un meilleur ratio personnel/patients, a souligné que la norme ne reflète pas les soins réellement prodigués mais les soins prévus. Les heures programmées de travailleurs qui sont absents pour des raisons de maladie, qui sont en pause, ou qui font des tâches administratives ou d'autres tâches, sont toutes comptabilisées, plutôt que seulement les heures de soins directs aux patients[2]. La MNU revendique un niveau d'au moins 4,1 heures de soins directs par jour.

Notes

1. On peut lire le rapport (en anglais) en cliquant ici

2. Le 27 octobre, la SCFP a publié une lettre aux responsables de la santé publique, dans laquelle il est dit que « il faut être proactif et faire inspecter ces foyers privés par des fonctionnaires, écrit Shannon McAteer, coordonnatrice du secteur de la santé au SCFP-Manitoba. L'inspection sur l'éclosion au Parkview Place a abouti à des conclusions et des recommandations importantes, notamment à propos de la dotation en personnel et en équipement de protection individuelle, qui peuvent aider cette installation à lutter contre la propagation de la COVID-19. Il ne faut pas laisser les autres établissements en arriver là. »

« Le gouvernement et les exploitants privés ont traîné les pieds auparavant, souligne Shannon McAteer. On ne peut permettre que l'histoire du Parkview Place se répète. Nous demandons aux inspecteurs de la santé publique de procéder immédiatement à des examens en personne dans tous les foyers de soins privés aux prises avec une éclosion et de lancer automatiquement des inspections lors des futures éclosions. Ceci afin de s'assurer que chaque foyer est prêt à prévenir la propagation de la maladie. »

(Photo : OHC)


Cet article est paru dans

Numéro 79 - Numéro 79 - 19 novembre 2020

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