Aucune convention collective signée, aucun progrès dans les négociations
Les conventions collectives des
quelque 550 000 travailleurs syndiqués
du secteur public au Québec sont échues depuis
le 31 mars 2020. Les négociations en vue
de leur renouvellement ont débuté il y a environ
un an. Aucune convention collective n'a encore été
signée et, selon les syndicats, aucune convention
n'est en vue dans un avenir rapproché à moins que
le gouvernement ne se mette à négocier
sérieusement sur la base des revendications
pressantes des travailleurs.
Quelques faits de base
Les travailleurs engagés dans la négociation se
répartissent comme suit : 58 500 de
la fonction publique; 260 000 dans la santé
et les services sociaux; 32 000
enseignants et travailleurs de l'éducation dans
les collèges; et 195 000 enseignants et
travailleurs de l'éducation.
Les négociations se déroulent sur une base
sectorielle et intersectorielle. Les négociations
sectorielles portent sur les conditions de travail
et l'organisation du travail et la liberté
d'action syndicale. C'est là que sont traités des
enjeux comme la tâche de travail, les horaires de
travail, l'affichage des postes vacants, la santé
et la sécurité, le statut des postes à temps
plein/partiel, etc.
Les négociations intersectorielles portent sur
les salaires, le régime de retraite, les régimes
collectifs d'assurance, les droits parentaux et
les disparités régionales pour tous les
travailleurs de tous les secteurs.
Les négociations intersectorielles se font
directement avec le Secrétariat du Conseil du
trésor. Il en est de même pour les négociations
sectorielles de la fonction publique. Les
négociations sectorielles des autres secteurs se
tiennent avec des comités patronaux formés de
représentants d'associations d'employeurs et de
représentants ministériels. Ces comités reçoivent
leurs directives du Secrétariat du Conseil du
trésor.
Pour cette ronde de négociations, il n'y a pas de
front commun syndical. Chaque syndicat mène ses
propres négociations. Cependant, l'Alliance du
personnel professionnel et technique de la santé
et des services sociaux (APTS) et la Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)
ont formé une alliance pour la négociation
intersectorielle. Les syndicats ont conclu un
accord de non-maraudage en vertu duquel ils
s'engagent, pendant la période de négociations, à
ne pas encourager les membres d'un syndicat à se
joindre à un autre syndicat.
La question des salaires
Le gouvernement, depuis
maintenant un an, maintient son offre salariale
à 5 % sur trois ans, plus certains
montants forfaitaires pour certaines catégories
d'emplois. Cela correspond uniquement à
l'inflation et constitue en fait un gel des
salaires. Tous les syndicats ont rejeté l'offre
salariale du gouvernement comme une insulte. Les
travailleurs demandent des augmentations
salariales qui leur permettent de rattraper les
salaires perdus après des dizaines d'années
d'austérité antisociale et d'améliorer leurs
conditions de vie, de maintenir le personnel et
d'attirer du personnel.
Selon l'étude de 2019 de l'Institut de la
statistique du Québec, les travailleurs de la
fonction publique, de l'éducation et de la santé
et des services sociaux, accusent un retard
d'environ 20 % en salaire par rapport aux
autres employés du secteur public (Hydro-Québec
par exemple), et d'environ 18 % sur les
travailleurs syndiqués du secteur privé.
Dans cette négociation, les syndicats s'y
prennent de différentes façons pour revendiquer
leurs augmentations salariales.
L'alliance APTS-FIQ revendique une augmentation
de 12,4 % sur trois ans, ce qui comprend
7,4 % en rattrapage salarial. La CSN
(Confédération des syndicats nationaux) met de
l'avant des demandes salariales à montant
fixe : 2 dollars l'heure la première
année, 0,75 dollar la deuxième
année, 0,75 dollar la troisième année. Elle
veut ainsi effectuer un rattrapage pour les bas
salariés. Pour quelqu'un qui gagne 20 dollars
de l'heure, 3,50 dollars sur trois ans
équivaut à une augmentation salariale
de 17 %.
Dans le but de contrer la désinformation
entretenue par le gouvernement sur les
travailleurs du secteur public « grassement
payés », la FTQ (Fédération des travailleurs
et travailleuses du Québec) a publié ces
statistiques sur la moyenne salariale de ses
quelque 52 000 membres du secteur :
moyenne salariale des employés du secteur
public : 36 155,49 dollars; moyenne
salariale des employés occasionnels et temporaires
du secteur public (autres que
réguliers) : 28 490,15 dollars;
pourcentage de femmes dans le
secteur : 73,7 % .
Conditions de travail
Les revendications concernant les conditions de
travail sont multiples et ne peuvent pas être
traitées en détail dans un bref article.
L'orientation générale est la suivante :
Une charge de travail acceptable
La charge de travail est intenable, causée par
plus de 30 années de compressions budgétaires
qui ont causé des départs massifs, des absences
pour blessures et maladies, des chambardements
d'horaires, etc. Les demandes sont variées :
par exemple, des ratios acceptables personnel
soignant/patients; embauche de personnel; quarts
de travail stables avec des tâches bien définies,
etc.
L'arrêt du temps supplémentaire obligatoire
La transformation de postes à temps partiel en
postes à temps plein et la valorisation des
postes à temps plein
L'un est impossible sans l'autre. Lorsque les
postes à temps plein, comme c'est le cas en ce
moment, signifient temps supplémentaire
obligatoire, incapacité de prendre les congés
fériés et d'autres congés négociés, les gens ne
postulent pas sur ces emplois.
L'arrêt de la mobilité entre les
établissements de santé, des équipes de travail
stables
C'est particulièrement important dans la santé où
la mobilité de la main-d'oeuvre entre les
établissements en temps de pandémie est non
sécuritaire pour les travailleurs et les patients
et où elle affecte aussi la qualité des soins.
L'amélioration de la santé et de la sécurité
Le secteur de la santé est devenu le premier
secteur au Québec en ce qui concerne les accidents
de travail et les maladies contractées au travail.
Pourtant le secteur de la santé n'est même pas
considéré secteur prioritaire par la Loi sur
la santé et la sécurité du travail, ce qui
fait que les mécanismes prévus par la Loi pour les
secteurs prioritaires comme les comités mixtes de
santé et de sécurité et les représentants en
prévention n'existent même pas dans le secteur.
Les travailleurs réclament des mesures de
prévention sur lesquelles ils ont un mot décisif à
dire.
Chez les enseignants, les revendications sont
centrées sur la réduction de la taille des classes
pour des conditions propices à un enseignement et
des apprentissages de qualité. Dans les conditions
de la COVID-19, cette revendication prend un
caractère particulièrement urgent pour la sécurité
du personnel, des élèves et des communautés. Les
enseignants revendiquent aussi des services aux
élèves qui correspondent à leurs besoins, une
tâche de travail humainement viable, la
reconnaissance de leur profession
(particulièrement par des salaires acceptables) et
une réduction du niveau de précarité dans l'emploi
tel que le travail à temps partiel et occasionnel.
Rejet des revendications des travailleurs et
demandes de concessions du gouvernement et des
employeurs
Alors que leurs revendications sont justes,
favorables à leurs membres, aux services et à la
société, les travailleurs du secteur public
affrontent une fin de non-recevoir de la part du
gouvernement et des associations d'employeurs.
Les travailleurs rapportent qu'après un an, les
négociateurs gouvernementaux et patronaux se
présentent encore aux tables en disant qu'ils
n'ont pas le mandat de négocier sur la base des
demandes des travailleurs. Ils invoquent le cadre
budgétaire serré du gouvernement pour refuser
d'aborder les revendications syndicales ou les
rejeter carrément. Ils disent que les
revendications sur les conditions de travail
seront abordées en comité mixte uniquement une
fois que les conventions collectives seront
signées !
Les travailleurs sont aussi renversés de voir que
le gouvernement et les représentants des
employeurs se présentent aux tables avec des
demandes de concessions. Par exemple, alors que le
gouvernement proclame sur la place publique qu'il
veut mettre fin à la mobilité du personnel entre
les établissements d'un même CISSS ou CIUSS, c'est
précisément cette demande de mobilité qui est mise
de l'avant aux tables.
Ou encore cette demande gouvernementale et
patronale de l'établissement du paiement du temps
supplémentaire sur la base de la moyenne d'heures
travaillées pendant une semaine de travail,
laquelle serait maintenant prolongée par les
employeurs selon leur bon vouloir. Au lieu de
payer le temps supplémentaire pour les heures
effectuées par un travailleur au-delà des heures
normales de travail telles que définies, une
personne pourrait travailler douze ou seize heures
pendant une journée et être payée à taux
simple ! Ce vol serait qualifié de «
réduction du temps supplémentaire » !
Dans ce contexte, aucune convention collective
n'a été signée jusqu'à présent et aucune nouvelle
convention collective n'est en vue alors que le
temps presse et que la situation est urgente.
Cet article est paru dans
Numéro 73 - Numéro 73 - 27 octobre 2020
Lien de l'article:
Aucune convention collective signée, aucun progrès dans les négociations
Site Web: www.pccml.ca
Email: redaction@cpcml.ca
|