La pandémie sert de prétexte à des
stratagèmes antiouvriers
La défense des droits des travailleurs est essentielle à l'arrêt de la propagation de la pandémie
- Pierre Chénier -
Les travailleurs et les travailleuses de la santé
du Québec défendent
leurs droits et déclarent
qu'ils sont la solution et qu'un meilleur système
de santé est
nécessaire.
La crise de la COVID-19 continue d'être utilisée
comme
prétexte par les dirigeants des gouvernements pour
attaquer les
travailleurs et le peuple et privatiser davantage
les soins de santé et
les services sociaux. Trente ans et plus
d'offensive antisociale ont
mené à la normalisation de pratiques qui
détournent une quantité
massive de fonds publics des soins aux patients
vers les coffres des
multinationales de la construction et des services
de soutien, y
compris les services alimentaires, l'entretien
ménager, l'informatique,
le personnel soignant et autres. Ils ont mené
aussi à la prolifération
des entreprises privées pour le profit dans les
soins aux aînés. Le
système est en crise et les normes pour lesquelles
les travailleurs se
sont battus sont érodées. Cette offensive
antisociale prend de
l'ampleur dans les conditions de la crise de la
COVID-19 et a un effet
dramatique sur la vie des gens et augmente le
danger pendant la
deuxième phase de la pandémie qui est déjà parmi
nous.
Par exemple, le nombre de démissions parmi le
personnel
soignant a énormément augmenté partout au Québec.
Rien
qu'à Montréal, les syndicats représentant les
travailleurs et
travailleuses du Centre intégré universitaire de
santé et de services
sociaux (CIUSSS) de l'Est-de-l'île-de-Montréal
disent que plus
de 1 800 travailleurs ont démissionné
depuis le début de
cette année. Il s'agit de travailleurs de toutes
catégories -
infirmières, personnel d'entretien ménager,
travailleurs des services
alimentaires, employés de bureau et de soutien
administratif, etc. Ils
quittent le secteur, prennent une retraite
anticipée (avec la pénalité
qui est imposée sur leurs prestations de retraite)
ou restent dans le
secteur mais vont travailler pour des agences de
recrutement privées.
S'ils vont travailler pour des agences privées,
les travailleurs
sacrifient de nombreux avantages sociaux et en
plus les revenus qu'ils
reçoivent de l'agence n'ouvrent pas droit à une
pension. Les
travailleurs vont vers les agences privées pour
avoir accès à ce que
celles-ci appellent la liberté de choix en matière
d'heures de travail.
Cela signifie que leurs heures sont prévues à
l'avance par contrat et
ne peuvent pas être prolongées par des heures
supplémentaires
obligatoires.
Les travailleurs signalent également que de plus
en plus
d'agences de recrutement privées sont engagées
dans le trafic d'êtres
humains. Par un système de sous-traitance en
cascades, l'agence qui
passe un contrat avec l'autorité publique offre le
contrat en
sous-traitance à d'autres qui l'offrent eux aussi
à d'autres, et le
résultat final est qu'il y a de nombreux
travailleurs de la santé qui
sont sans papiers, sans aucun droit. Les
nombreuses manifestations de
travailleurs migrants sans statut permanent ou
sans papiers ont
amplement montré les mauvais traitements
systématiques auxquels ces
travailleurs sont soumis en tant que main-d'oeuvre
sacrifiable et le
rôle que jouent les agences de recrutement
privées. Le nombre de
travailleurs non syndiqués et précaires dans le
secteur de la santé
augmente constamment.
Alors que les agences de recrutement privées
prolifèrent
dans le contexte de la crise du secteur public de
la santé, il est de
plus en plus courant que les gestionnaires des
centres de santé et de
services sociaux intégrés publics deviennent
eux-mêmes propriétaires
d'agences de recrutement privées. Une couche se
forme au sein de la
direction du système public de soins de santé, qui
est encouragée à
devenir propriétaire d'agences privées afin
d'augmenter le nombre de
travailleurs embauchés par son intermédiaire et
démanteler les normes
et la continuité des soins de santé. Par exemple,
les agences de
recrutement privées peuvent envoyer des
travailleurs dans un
établissement de santé un jour et dans un autre le
lendemain, faisant
des travailleurs des vecteurs potentiels de la
propagation du virus.
De plus, les conventions collectives des
travailleurs du
secteur public québécois sont terminées depuis
le 31 mars et les
syndicats rapportent que les négociations ne vont
nulle part parce que
le gouvernement rejette les revendications des
travailleurs et tente
d'imposer des concessions qui ne feront
qu'aggraver davantage la
situation dans le secteur.
Par
exemple, la Fédération de la santé du Québec a
révélé certaines des
demandes de concessions du gouvernement. L'une de
ces exigences est de
redéfinir les heures supplémentaires en calculant
la moyenne des heures
de travail sur plus d'une semaine. La semaine de
travail en cours est
définie comme une semaine de cinq jours. Toutes
les heures en plus des
heures régulières convenues doivent être
rémunérées au taux des heures
supplémentaires. Faire une moyenne des heures de
travail sur plus de
cinq jours permettra aux employeurs de payer des
taux réguliers même
lorsque les travailleurs font du temps
supplémentaire. Pendant ce
temps, au nom de la « flexibilité », le
gouvernement veut créer
des horaires de travail dans lesquels le nombre de
jours pourrait
varier d'une semaine à l'autre. Ce ne sont pas
seulement de graves
attaques économiques contre les travailleurs mais
aussi des
provocations, qui contribuent à l'épuisement
professionnel et aux
démissions du personnel soignant..
Les travailleurs et les travailleuses de la santé
rejettent cette provocation et ce chantage et
insistent pour que des
améliorations immédiates soient apportées aux
soins de santé et aux
services sociaux sur la base de leurs
revendications. Les travailleurs
défendent leur capacité à agir collectivement par
le biais de leur
organisation de défense et à parler d'une seule
voix pour se défendre
et protéger les personnes dont ils prennent soin.
L'action collective
des travailleurs et leur mise en oeuvre des
mesures de sécurité est un
facteur clé pour arrêter la propagation du virus.
La situation montre
clairement la nécessité de changer la direction
des soins de santé et
des services sociaux, pour éliminer complètement
le profit privé du
système.
Alors que les travailleurs intensifient leur
lutte pour
leurs droits et les droits de tous, Forum
ouvrier ouvre ses
pages pour faire entendre leur voix.
Cet article est paru dans
Numéro 71 - Numéro 71 - 20 octobre 2020
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