On ne peut pas confier notre système de santé publique à Kenney et son gouvernement

La publication aujourd'hui du Plan de mise en oeuvre de l'étude de rendement des Services de santé de l'Alberta (SSA) est, en somme, la plus grande trahison des Albertains, tous gouvernements confondus.

« Une fois de plus, le premier ministre et son gouvernement ont annoncé des plans conformément à leur ordre du jour agressif de privatisation des soins de santé », dit Sandra Azocar, la directrice générale de Friends of Medicare. « Le gouvernement du PCU de Kenney continue de faire preuve de mépris total envers les femmes et les hommes qui travaillent en première ligne en santé. Compte tenu du rôle central qu'ils ont joué dans la réponse de la province à la pandémie, ce plan dans son ensemble est insultant pour les travailleurs de la santé, et c'est une trahison des patients qui en dépendent. »

Les changements agressifs tels qu'énoncés dans le plan de mise en oeuvre proposé arrivent sans grande surprise et représentent un pas de plus dans le plan du gouvernement de privatiser notre système de santé. Nous les avons vu faire un pas dans cette direction lorsqu'ils ont publié le rapport MacKinnon en septembre 2019, puis un autre pas géant avec la publication de l'Étude de rendement des SSA en février. Les deux rapports recommandaient une restructuration massive de notre système de santé par le biais de privatisations majeures, et sont grandement basés sur les données de l'Institut Fraser, dont la fiabilité a récemment été remise en cause par la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans sa décision importante dans la cause Cambie :

« Ce n'est pas certain si des conclusions générales peuvent être tirées des études de l'Institut Fraser, même si ces études servent de façon générale comme source de données fiables (ce que je remets sérieusement en doute). »

Malgré les importants questionnements quant à la fiabilité des deux rapports, le gouvernement de l'Alberta n'a pas hésité à les mettre à profit et à les utiliser comme arsenal idéologique pour accélérer le processus de privatisation de notre système de santé par la sous-traitance et la réduction des services de santé disponibles pour les Albertains.

L'étude sur les SSA, faite par le cabinet comptable américain Ernst & Young (EY) au coût de plus de 2 millions de dollars, avait comme cible de trouver les failles dans le système. Ce rapport a pondu 57 recommandations qui, selon leur estimé, pourraient engendrer 1,9 milliards de dollars en épargnes, bien qu'EY ait fait une mise en garde à l'effet que ces chiffres ne reflétaient pas des épargnes concrètes, ni attendues ni même réalisables, et le ministre de la Santé Shandro, à l'époque, avait affirmé que ce ne serait pas toutes les recommandations qui seraient réalisables ou mises en oeuvre.

À la suite de la publication du rapport de l'étude sur les SSA, le ministre de la Santé Shandro l'a confié à une équipe de mise en oeuvre des SSA, qui devait faire un rapport avant 100 jours sur ses propres recommandations. Comme cette date a été reportée de cinq mois en raison de la réponse de la province à la pandémie, rien n'a été rendu public avant aujourd'hui. Le plan de 82 pages présente des compressions importantes dans tout le système de santé publique, conformément aux recommandations faites dans la première étude d'EY. Bien que le ministre de la Santé ait affirmé publiquement que la mise en oeuvre serait déterminée par les Services de santé de l'Alberta et guidée par les meilleures pratiques opérationnelles, à la suite de la fuite d'un document obtenu par la CBC, il a été révélé que le ministre Shandro avait en effet ordonné à SSA de produire des plans pour la mise en oeuvre de toutes les recommandations du rapport EY, à l'exception de quelques-unes qu'il aurait décidé de ne pas retenir.

La proposition comprend des plans pour avoir recours à la sous-traitance pour les services alimentaires, environnementaux et de buanderie, retirer des clauses dans la convention collective des infirmières, l'introduction d'un copaiement pour les soins à domicile, augmenter le recours aux services chirurgicaux privés, et, au rural, reconfigurer les départements d'urgence, de soins intensifs, de maternité et d'obstétrique  entre autres. Ce plan peut facilement détourner nos dollars, services et personnels de santé vers des compagnies privées qui seront subventionnées par les fonds réservés à la santé publique. Mais le plus inquiétant, c'est que le gouvernement prévoit la perte de 11 000 emplois en soins de santé, ce qui va toucher près de 16 000 travailleurs partout dans la province.

À la conférence de presse d'aujourd'hui, le ministre Shandro a dit qu'il n'y aurait pas d'impact pour les infirmières ni les travailleurs de première ligne pendant la pandémie, mais ses propos viennent contredire la lettre reçue ce matin par les Infirmières et infirmiers unis de l'Alberta, qui affirme clairement que SSA a l'intention d'aller de l'avant avec les mises à pied annoncées de 500 postes équivalents temps plein en soins infirmiers, ce qui représente le licenciement de 750 infirmières, selon un estimé d'IIUA.

« Plutôt que de construire sur une base solide notre système de santé, ce gouvernement choisit de le vendre au plus offrant sans présenter aux Albertains le moindre plan d'affaires pour montrer comment les ‘épargnes' proposées vont avoir un impact sur les patients et les soins auxquels ils pourront avoir accès », a dit Azocar. « Plutôt que de reconnaître l'importance vitale de nos prestataires de soins, ils préfèrent couper 11 000 bons emplois alors que de nombreux Albertains n'ont déjà pas d'ouvrage. Les Albertains se demandent si c'est bien la reprise qu'ils espéraient pour leur province. Franchement, nous exigeons plus. »

Le plan de SSA, tel que mené par le ministre Shandro, va engendrer rien de moins que la décimation de nos soins de santé publique. Peu importe comment le ministre Shandro tente de nous faire avaler la pilule, la sous-traitance est beaucoup plus qu'un changement d'employeur, c'est un changement dans comment nous dispensons les soins de santé et c'est un pas tout droit vers les soins de santé privés. Alors que nous continuons de mesurer les répercussions immédiates et à long terme de cette pandémie, le gouvernement albertain tente de nous convaincre que la voie vers l'avant est dans la mise à pied de milliers de travailleurs de la santé et dans la privatisation de nos soins de santé. Les Albertains sont en mesure de savoir plus que quiconque à quel point on ne peut faire confiance à ce gouvernement.

(13 octobre 2020)


Cet article est paru dans

Numéro 70 - Numéro 70 - 15 octobre 2020

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