Les écoles de l'Alberta rouvrent dans des conditions difficiles

Les écoles ont rouvert en Alberta dans la semaine du 1er septembre. Le début d'une nouvelle année scolaire est toujours une source de grande énergie et d'enthousiasme, et les enseignants sont toujours heureux d'être de retour en classe où les interactions si cruciales à l'apprentissage ont lieu. Les enseignants et tout le personnel ont travaillé très fort en vue de la réouverture dans des conditions extrêmement difficiles imposées par la COVID-19. Ce qui n'a pas rendu la tâche plus facile est le fait qu'ils ont dû composer avec un gouvernement qui est tout à fait indifférent à la question de la sécurité dans les écoles. Ce qui anime les enseignants et tout le personnel est la joie des élèves d'être de retour à l'école et à quel point il est important pour eux de garder les écoles ouvertes.

Déjà, 152 écoles en Alberta ont au moins un cas de COVID-19, 36 écoles ont une éclosion (c'est-à-dire, de 2 à 4 cas), et cinq écoles sont sous « surveillance », ayant cinq cas ou plus. Dans trois écoles, tout indique une transmission interne du virus[1].

CBC rapporte que, le 18 septembre, 67 membres du personnel et 831 étudiants des écoles publiques d'Edmonton étaient en confinement. En date du 21 septembre, 1 400 étudiants et plus de 90 membres du personnel des écoles publiques de Calgary étaient en confinement. Cela ne comprend pas les élèves retenus à la maison et ayant des symptômes qui n'ont pas été déclarés positifs et ne sont pas liés à un cas d'infection.

Ceci aura tout un impact sur la disponibilité des enseignants suppléants requis pour remplacer les nombreuses absences. Lorsque les enseignants sont absents et qu'aucun suppléant n'est disponible, d'autres enseignants doivent s'occuper de ces classes, ne laissant aucun temps pour la préparation des cours. Cela pourrait mener à des surcharges de travail et créer un dépassement des limites prévues à la convention collective sur le temps accordé à l'enseignement. De nombreux enseignants à la retraite qui sont normalement disponibles comme suppléants choisissent de ne pas travailler dans les conditions actuelles.

Le gouvernement a rendu le port du masque obligatoire en tout temps à l'école pour tous les étudiants de la 4e la 12e année. Tout le monde se lave les mains ou utilise du désinfectant régulièrement. Il n'y a pas de distanciation sociale et le gouvernement a rejeté du revers de la main les recommandations des enseignants que les classes soient réduites, prétendant que « ce n'est pas praticable », ce qui veut dire qu'ils comptent continuer de piller les fonds voués à l'éducation pour payer les riches. Rien n'est fait pour améliorer la ventilation, ce qui est pourtant une des directives très claires des autorités de la santé publique.

Le gouvernement Kenney n'assume aucune responsabilité pour la sécurité des élèves. « De l'opinion de l'Alberta, nous n'avons pas l'intention de faire de la microgestion pour nous sortir de cette situation », a dit Kenney. « Nous allons réussir à nous en sortir seulement si les gens assument leur responsabilité individuelle, et c'est ce que nous appelons les Albertains à faire ». Dans la même veine que cette notion de « responsabilité individuelle » et de « choix », les parents et les élèves ont le « choix » d'aller à l'école ou de rester à la maison et de s'inscrire à l'apprentissage en ligne.

Le gouvernement du Parti conservateur uni a réduit le financement de l'éducation et le budget demeure inférieur au niveau de 2019-2020, malgré tous les besoins créés par la COVID-19. Un quart des salles de classe ont plus de 30 élèves. Pour ce qui est de la « microgestion », en fait le gouvernement est en train de concentrer tout le pouvoir et les prises de décision dans le pouvoir exécutif. Par exemple, il a menacé de congédier les conseils scolaires qui ne font pas ce qu'on leur demande, et jeté à la poubelle le travail de milliers d'enseignants qui ont consacré temps et effort à développer un programme dont on a tellement besoin.

L'Association des enseignants et enseignantes de l'Alberta (ATA) mène actuellement un sondage hebdomadaire, un projet de recherche pour avoir le pouls de la pandémie, en partenariat avec les médecins albertains et des spécialistes en maladies infectieuses. L'ATA rapporte que plus de 90 % des enseignants vivent des niveaux extrêmement élevés d'anxiété et d'épuisement. Les étudiants sont aussi affectés par le stress, non seulement par crainte de tomber malades ou d'amener la COVID-19 à la maison, mais à l'idée de porter le masque en tout temps et de rester assis à leur place pendant de longues périodes. Comme l'hiver approche à grands pas et qu'il fera bientôt trop froid pour dîner à l'extérieur ou pour que les enseignants sortent dehors avec leurs classes, la situation deviendra encore plus stressante.


Quarante-deux pour cent des infections à la COVID-19 en Alberta sont liées en ce moment aux écoles (cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Dans ce contexte, les enseignants et les travailleurs de l'éducation, les parents et les citoyens préoccupés assument leur responsabilité sociale. Les enseignants ont pris des initiatives: ils ont notamment fabriqué leurs propres cloisons protectrices, organisé un retour progressif, un niveau à la fois, et fait en sorte que les enseignants se promènent d'une classe à l'autre pendant que les élèves sont stationnaires. Ils ont dû résoudre un grand nombre de problèmes et l'ont fait en peu de temps.

L'information doit être disponible sur les mesures à prendre lorsque les élèves sont identifiés comme ayant la COVID-19 pour qu'il puisse y avoir un discours public et une confiance dans le système. Lorsqu'un élève va à l'école et qu'il a la COVID-19, quels sont les critères pour décider qui doit se confiner ? Combien de temps y a-t-il entre le moment où l'élève passe un test de dépistage, obtient un résultat positif et que les autres élèves reçoivent la consigne de se confiner ? En l'absence d'une autorité publique qui fournit cette information, les étudiants, les parents et les enseignants se tournent vers le site Web de l'organisation Appuyons nos étudiants pour obtenir les données sur la COVID-19 dans les écoles. Cette information devrait être facilement accessible en tant que partie d'une campagne d'éducation publique et de redevabilité des autorités.

Les enseignants et les responsables de l'éducation prennent la parole. Le directeur de l'école secondaire Bowness à Calgary a publiquement mis au défi Jason Kenney et la ministre de l'Éducation Adriana LaGrange de venir passer une journée à l'école, porter un masque, se désinfecter, s'asseoir dans une salle de classe normale et suivre un élève pendant une journée.

La façon d'agir du gouvernement porte à penser que ses défaillances sont intentionnelles, qu'il cherche à créer un climat où les gens en arrivent à croire que le système public n'est pas à la hauteur et ne peut garantir une éducation sécuritaire. Ce que dit Kenney c'est que si vous ne voulez pas que votre enfant soit dans une classe de 35 ou 40 élèves, vous avez le « choix, c'est une question de responsabilité individuelle. » « Choisissez » l'école à la maison, ou si vous en avez les moyens financiers, une école privée ou à charte, et si vous ne pouvez pas vous le permettre, alors débrouillez-vous avec vos problèmes.

Les solutions viennent lorsque les gens assument leur responsabilité sociale comme ils le font présentement. Jamais il n'a été aussi important de fournir l'information et de développer la discussion sur comment aller de l'avant. La notion qu'il y a, d'une part, ceux qui gouvernent et, de l'autre, ceux qui sont gouvernés n'est pas acceptable dans une société moderne. Les membres du corps politique ont le droit de participer directement aux prises de décision qui touchent leur vie et celles de leurs collègues, de leurs familles et voisins ainsi que le corps politique.

Note

1. Pour les plus récentes données sur les cas de COVID-19 dans les écoles albertaines, visitez le site Web.

(Photos : K. Hertlein, A. Toombes, K. Campbell)


Cet article est paru dans

Numéro 65 - Numéro 65 - 29 septembre 2020

Lien de l'article:
Les écoles de l'Alberta rouvrent dans des conditions difficiles - Kevan Hunter


    

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