Arguments irresponsables du gouvernement du Québec

Les 107 744 enseignantes et enseignants du Québec et leurs 1 216 791 élèves entament leur 5e semaine de rentrée scolaire sous la pandémie. Les travailleurs des écoles primaires et secondaires, dont le personnel enseignant, poursuivent les efforts qu'ils déploient depuis qu'ils sont revenus à l'école pour assurer leur sécurité et celles des élèves. Chaque jour, ils s'assurent de porter leur masque, de demeurer à deux mètres les uns des autres et de leurs élèves. Ils assurent une présence dans les lieux publics pour rappeler aux jeunes de porter leur masque, leur en fournir un en cas d'oubli ou de masque endommagé. Les enseignants ajoutent cette tâche à celle de fournir un enseignement de qualité et des activités pédagogiques dans un contexte où les déplacements sont limités  les élèves ne quittent pratiquement pas leur classe de la journée  et où ces derniers n'ont que peu ou pas accès aux activités culturelles et sportives parascolaires.

Ces efforts se heurtent aux arguments irresponsables du gouvernement du Québec pour s'assurer que les enseignants et les travailleurs de l'éducation ne décideront pas des conditions de la réouverture des écoles pour que la santé et la sécurité de tous et de toutes soit défendue.

Le 24 septembre, le gouvernement a dénombré 722 cas positifs actifs confirmés dans les écoles, soit 632 élèves et 90 membres du personnel. Cela portait à 1163 cas le nombre de cas positifs depuis la rentrée scolaire. À l'heure actuelle, 427 classes ont été fermées à l'échelle du Québec et rien ne laisse croire que le nombre des éclosions et des fermetures de classe va diminuer.

Cela ne convainc pas le gouvernement du Québec qu'il faut mettre en oeuvre la revendication des enseignants d'une distanciation physique entre les élèves dans les classes. Le gouvernement a déclaré que le problème des éclosions était un problème de « transition communautaire » du virus et les écoles ne font pas partie de la communauté selon lui. Le problème viendrait de l'extérieur, ce qui fait que les mesures de sécurité qui sont mises en place hors des écoles, dont la distanciation physique, n'ont pas leur place à l'école.

Pourtant, une école est un milieu de vie où vivent ensemble plus de 8 heures par jour des centaines, voire plus de 2000 personnes dans certaines écoles. Les écoles font partie de la communauté et y jouent un rôle des plus actifs.

Le gouvernement se ferait couper en quatre plutôt que de réduire la taille des classes, et ce refus fait d'ailleurs partie de l'offensive antisociale qui se mène en éducation depuis plus de 30 ans. Observer une distanciation physique dans les classes, réduire leur taille, voudrait dire travailler avec les enseignants, les travailleurs de l'éducation et les élèves pour procéder à ces changements, les évaluer et les améliorer selon l'évolution de la situation. Cela créerait une atmosphère d'enthousiasme et un haut niveau de conscience dans les écoles parmi tous ceux qui y vivent et dans la société dans son ensemble. Les enseignants ne demandent qu'à contribuer à de tels changements pour le bien-être de tous et les étudiants seraient eux aussi enthousiastes à y participer. Les enseignants l'ont dit clairement à de nombreuses reprises et le gouvernement les a ignorés.

L'acharnement du gouvernement à garder tout le pouvoir de prendre les décisions entre ses mains, même si cela n'a pas de sens, l'amène à proposer la criminalisation de la jeunesse comme solution au problème d'enrayer la propagation de la pandémie.

Par exemple, une lettre du Centre de services scolaires de Portneuf (en Mauricie) adressée aux parents d'élèves les a avisés que la Sûreté du Québec a maintenant le mandat de donner des amendes de 560 $ aux jeunes qui ne respectent pas le 2 mètres de distanciation lorsqu'ils sont à l'extérieur. C'est totalement irrationnel de prétendre que si le milieu de vie des élèves ne comprend pas la distanciation physique, celle-ci apparaîtra comme par miracle une fois les élèves sortis des écoles et de retour dans la « communauté », sinon c'est une amende qui règlera le problème.

Le gouvernement du Québec laisse entendre maintenant que si les statistiques sur les éclosions ne vont pas dans le sens qu'il souhaite, y compris dans les écoles, il pourrait bien envisager de les fermer partiellement ou en totalité.

Cette obsession morbide pour la défaite ne représente pas l'esprit des enseignants, des travailleurs de l'éducation ou des élèves ni du public. Les enseignants et les travailleurs de l'éducation ne veulent pas que les écoles ferment. Ils veulent enseigner aux étudiants et les protéger pendant la pandémie. Mais cela ne peut être réalisé qu'en vertu de standards élevés de santé et de sécurité sur lesquels le personnel enseignant et de soutien doit avoir un mot décisif à dire.

Le gouvernement doit abandonner son approche du « c'est ça ou rien » et respecter le droit de ceux qui enseignent aux jeunes et qui entretiennent les écoles de définir les conditions d'exercice de leur profession et métier, y compris et en particulier dans une situation de crise comme la pandémie de la COVID-19.

(Photo : N-H Nadeau)


Cet article est paru dans

Numéro 65 - Numéro 65 - 29 septembre 2020

Lien de l'article:
Arguments irresponsables du gouvernement du Québec - Geneviève Royer


    

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