Une révision frauduleuse de l'indemnisation des travailleurs

Le 14 août, le gouvernement albertain a arrêté d'accepter les soumissions à sa révision législative de l'indemnisation des travailleurs accidentés qui a commencé le 10 juillet. Pendant toute la procédure, le gouvernement a agi dans le plus grand secret. Le 10 juillet, le ministère de l'Emploi et de l'Immigration a publié ses « directives pour faire des soumissions écrites » à la révision avec un calendrier de 30 jours pour les soumissions, sans faire de communiqué de presse ou d'annonce publique.

Le document annonçant la révision affirme : « Le [système d'indemnisation des travailleurs accidentés] doit demeurer viable, abordable et équitable pour les travailleurs et l'employeur, aujourd'hui et dans les années à venir. »

Il y est dit qu'une révision approfondie de la Loi sur l'indemnisation des travailleurs accidentés et du système lui-même avait eu lieu en 2016 et 2017, que la loi et le système avaient subi des changements majeurs en 2018, et que plusieurs recommandations du comité de révision étaient entrées en vigueur. On y affirme aussi que « Depuis que le nouveau système est entré en vigueur, plusieurs partenaires ont soulevé de sérieuses préoccupations au sujet de l'accessibilité, de la viabilité et de la lourdeur administrative ».  Les mots à la mode de l'offensive antisociale tels que  « partenaires », « viable », « alléger la lourdeur administrative » et « réduire la paperasserie » servent à dissimuler le but des changements au système d'indemnisation dont la vie a démontré qu'ils sont entièrement intenables en ce qui concerne la santé et la sécurité de la population et l'environnement naturel.

Le système d'indemnisation des travailleurs fut un « compromis historique » par lequel les travailleurs ont renoncé au droit d'intenter une action contre leur employeur en cas d'accident ou de maladie industrielle. En échange, on devait s'occuper d'eux lorsqu'ils se blessaient. En vertu du système, les travailleurs ne peuvent pas intenter de poursuite contre leur employeur. Entretemps, un grand nombre de travailleurs accidentés sont marginalisés socialement et obligés de subvenir à leurs propres besoins. Ils doivent souvent compter sur l'assistance sociale ou le Programme de revenu assuré pour les personnes gravement handicapées (AISH). Il s'agit d'une violation du droit des travailleurs qui permet aux employeurs d'échapper à leurs responsabilités et de les nier.

Le questionnaire en ligne était composé de dix-neuf sujets que les personnes interrogées devaient discuter ou commenter. D'après les sujets proposés, il est clair que le Parti conservateur uni réagit exclusivement aux plaintes et aux revendications des « partenaires », autrement dit des intérêts privés, qui cherchent à réduire les indemnisations et à réduire ou éliminer la responsabilité des employeurs liée aux travailleurs blessés et aux conditions de travail insalubres. Les problèmes des petits employeurs auxquels on pourrait trouver des solutions sont mélangés avec le refus des conglomérats d'assumer leurs responsabilités sociales.

La pandémie a mis en lumière l'urgence de répondre aux revendications des travailleurs accidentés pour un système d'indemnisation qui couvre chaque travailleur accidenté ou malade en raison de son travail pour toute la période de temps pendant laquelle il ne peut pas travailler.

L'Alberta a connu les plus importantes éclosions de COVID-19 de tous les endroits de travail du Canada. Seulement à Cargill, 981 travailleurs ont eu un résultat positif et il y a eu plus de 1 500 cas liés à l'usine. On a dit que ce fut la plus grande éclosion de toutes les usines d'Amérique du Nord mais, en fait,
on n'a pas encore un rapport adéquat au sujet des autres usines de transformation de viande et des autres usines des États-Unis.

Les travailleurs de la santé et de la production et de la transformation alimentaires ont été et sont toujours plus à risques de contracter la COVID-19 que l'ensemble de la population. De nombreux problèmes de demandes d'indemnisation des travailleurs requièrent une solution depuis longtemps. La pandémie de la COVID-19 a mis en lumière à quel point une réforme prosociale est nécessaire, comme en témoigne la situation dans les soins de santé et la transformation alimentaire.


La réouverture des écoles de l'Alberta a aussi mis en relief le fait que les enseignants albertains ne sont pas couverts par l'indemnisation des accidentés du travail. En plus, la situation des enseignants suppléants est particulièrement précaire car non seulement ils ne sont pas couverts par le régime d'indemnisation mais ils n'ont pas de congés de maladie payés ou de prestations d'invalidité. C'est une situation qui doit être prise en compte et rectifiée sans délai.

La révision menée par le gouvernement albertain au service des oligarques mondiaux, qui veulent avoir la voie libre pour attaquer le droit des travailleurs à des conditions de travail saines et sécuritaires, vise clairement à empêcher les travailleurs d'agir comme une force organisée pour défendre leurs droits et les droits de tous. Cela n'a rien à voir avec une discussion sur ce qui est requis pour protéger les êtres humains et leur société. Les conclusions déjà toutes faites auxquelles vont mener les questions et les méthodes du gouvernement ne rendront pas l'ordre du jour du gouvernement légitime. Le processus ne produit pas le consentement des gouvernés. Cela ne doit pas passer !

Les travailleurs ont des droits en tant que producteurs de la richesse, et le seul objectif légitime du système d'indemnisation des travailleurs doit être de veiller à ce que les droits des travailleurs soient défendus. L'objectif doit être l'indemnisation des travailleurs en raison de blessures ou de souffrances liés aux problèmes de santé au travail, et non l'indemnisation de l'employeur.


Cet article est paru dans

Numéro 55 - Numéro 55 - 20 août 2020

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