Un syndicat de la Nouvelle-Écosse refuse de participer à l'enquête secrète du gouvernement provincial sur la résidence Northwood
Dans un communiqué du 30 juillet, le Syndicat
des employés du gouvernement et des employés
généraux de la Nouvelle-Écosse (NSGEU) a annoncé
qu'en raison de la nature secrète de l'enquête sur
la résidence Northwood, le président du NSGEU,
Jason MacLean, a décidé de ne pas y participer.
Northwood Manor est un immense centre situé à
Halifax, avec près de 600 résidents et plus
de 400 travailleurs pour s'occuper d'eux et
où 53 résidents sont morts de la COVID-19 ce
printemps. Des centaines d'autres résidents ont
été infectés de même que plusieurs travailleurs. À
la fin de juin, le gouvernement de la
Nouvelle-Écosse a annoncé qu'il procédait à une
enquête sur les décès dus à la COVID-19 dans ce
centre de soins de longue durée pour personnes
âgées. Les membres du NSGEU, qui ne travaillent
normalement pas à Northwood Manor, y ont été
redéployés au plus fort de la pandémie, par arrêté
ministériel.
« Le processus d'examen de Northwood annoncé
le 30 juin interdit à quiconque comparaît
devant le comité de partager publiquement les
informations sous peine de menace d'amendes et de
peines de prison », explique le président du
NSGEU dans le communiqué de presse. À la fin de
juillet, MacLean a été invité à partager
l'expérience des membres du NSGEU qui ont
travaillé à Northwood pendant la première vague
d'éclosion de la COVID-19 avec le comité d'examen.
Quelques heures à peine avant cette réunion, le
NSGEU a reçu un courriel d'un membre du personnel
du comité déclarant que « toute information sur
l'amélioration de la qualité est protégée contre
la divulgation en vertu de la Loi sur la
protection de l'information sur l'amélioration
de la qualité ». Cela signifie que
toute information transmise au comité devient
immédiatement un secret et ne peut être rendue
publique sous aucune forme, excluant même ce qui
est prévu en vertu de la Loi sur la liberté de
l'information de la province. La personne
qui divulgue des informations est passible d'une
amende pouvant aller
jusqu'à 10 000 $ et d'une peine
d'emprisonnement allant jusqu'à six mois.
« Le NSGEU a accepté l'invitation de travailler
avec le comité d'examen afin que nous puissions
partager les expériences de nos membres, dit
MacLean. Le NSGEU se tient aux cotés des 53
familles qui ont perdu des êtres chers au cours de
la première vague de la pandémie de la COVID. Nous
croyons sincèrement que l'intérêt public est mieux
servi par une enquête publique, en divulguant
pleinement toutes les informations, afin que les
familles, les personnes âgées, le personnel et les
Néo-Écossais obtiennent les réponses qu'ils
méritent. » À la lumière du secret entourant
le processus d'examen actuel, indique le
communiqué de presse, le président du NSGEU a pris
la décision de ne pas parler au comité. Le NSGEU
renouvelle également son appel au premier ministre
Stephen McNeil à établir une enquête publique
complète sur le décès des 53 résidents de
Northwood ce printemps.
Le NSGEU publie son propre rapport sur la
catastrophe de Northwood
Le 4 août, le NSGEU a publié un rapport
relatant ce qu'il appelle la négligence et les
retards du gouvernement qui ont contribué à la
tragédie de Northwood Manor[1]. Le rapport
intitulé Neglecting Northwood (négligence
à Northwood) s'appuie sur des documents internes
obtenus de l'autorité de la Santé de la
Nouvelle-Écosse et du ministère de la Santé et du
Mieux-être en vertu de la Loi sur la liberté
de l'information de la province. Le rapport
comprend également des informations recueillies
auprès des membres du NSGEU qui ont été déployés à
Northwood pendant l'épidémie. Il s'accompagne d'un
document FOIPOP (liberté de l'information et
protection de la vie privée) de 840 pages qui
comprend des enregistrements, documents et
communications liés à l'éclosion de la COVID-19 à
Northwood Manor.
Le rapport Neglecting Northwood détaille
les décisions clés qui, selon le NSGEU, ont mis le
personnel et les résidents en danger. Cela
comprend :
- des années de compressions dans les
établissements de soins de longue durée sans
comprendre les risques que cela crée pour la
santé et la sécurité de ceux qui y vivent et y
travaillent ;
- le refus de tenir compte des inquiétudes
soulevées par Northwood sur le contrôle des
infections et de financer des propositions qui
auraient éliminé la pratique de la double et de
la triple occupation des chambres ;
- le retard dans l'utilisation de l'équipement
de protection individuelle, comme les masques,
alors que la Colombie-Britannique avait mis en
oeuvre les pratiques de sécurité dans ses
établissements de soins de longue durée trois
semaines plus tôt ; et
- l'absence d'une action rapide
une fois que le premier cas de COVID a été
identifié dans l'établissement.
« Ce rapport ne fait qu'effleurer la surface de
ce qui s'est passé à Northwood. Il soulève
beaucoup d'autres questions auxquelles il ne peut
répondre, écrit MacLean dans un communiqué du
syndicat le 4 août. Cacher des erreurs
signifie que nous ne pouvons pas apprendre de ces
erreurs. Stephen McNeil doit faire preuve de
leadership et donner au personnel, aux résidents
et aux familles ce qu'ils méritent : une
enquête publique complète. Rien de moins n'est
inacceptable. »
Réponse provocatrice du premier ministre aux
préoccupations
des Néo-Écossais
Le gouvernement de la
Nouvelle-Écosse répète qu'il ne tiendra pas
d'enquête publique sur les décès et sur la
situation générale dans les établissements de
soins de longue durée de la province, bien que
c'est ce que demandent les travailleurs de la
santé, les familles des résidents et le public. À
la suite de cet examen qui est mené par un comité
d'amélioration de la qualité composé de deux
membres nommés, le gouvernement ne rendra
publiques que les recommandations et non les
détails de l'enquête elle-même. Pour justifier son
refus de tenir une enquête publique et sa décision
de recourir plutôt à ce processus prévu par la Loi
sur la protection de l'information sur
l'amélioration de la qualité, le premier
ministre avance l'argument fallacieux que son
gouvernement a choisi la meilleure approche pour
que l'enquête procède le plus rapidement possible
afin que les recommandations soient rendues
publiques aussitôt que possible. Il déclare
également que ce type d'examen permet de protéger
les renseignements personnels des résidents de
Northwood. Les travailleurs rejettent cet argument
intéressé. Ils y voient un moyen d'empêcher les
travailleurs, les patients et leurs familles,
ainsi que les Néo-Écossais en général, de
s'exprimer et d'être entendus publiquement afin
que leurs solutions soient également rendues
publiques.
Confronté à la position du NSGEU de ne pas
participer et aux propos du président du NSGEU qui
dit que l'examen ressemble à une « manoeuvre de
camouflage », le premier ministre McNeil a
dit que la position de MacLean est de la «
rhétorique », ce qui, selon lui, n'aide
personne. Il a ajouté : « C'est la vie des
gens dans le système de santé que nous essayons
d'améliorer », comme si les travailleurs qui
fournissent les services et protègent les patients
et résidents étaient un obstacle à la résolution
des problèmes du système de santé et comme si son
gouvernement n'avait pas à rendre de comptes pour
les décès survenus à Northwood. Le premier
ministre a ajouté qu'il enquêterait pour savoir
s'il a le pouvoir discrétionnaire, en vertu de la
Loi sur la protection de l'information
sur l'amélioration de la qualité, de
permettre aux personnes qui souhaitent participer
à l'examen de rendre leur témoignage public. Mais
c'est précisément ce à quoi les Néo-Écossais et
l'ensemble des Canadiens s'opposent : le fait
que les gouvernements se donnent le pouvoir
arbitraire discrétionnaire de prendre toutes les
décisions, y compris qui a le droit de parler et
d'être entendu, et nient les préoccupations,
l'expérience et la voix des travailleurs de
première ligne qui protègent la population pendant
cette pandémie. Aucun des problèmes auxquels la
société est confrontée ne peut être résolu de
cette façon.
Note
1. Pour lire le rapport Neglecting
Northwood, cliquer
ici
Le rapport FOIPOP au complet est accessible ici.
Cet article est paru dans
Numéro 53 - Numéro 53 - 6 août 2020
Lien de l'article:
Un syndicat de la Nouvelle-Écosse refuse de participer à l'enquête secrète du gouvernement provincial sur la résidence Northwood
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