La situation de l'éducation supérieure en Ontario


Des étudiants de niveau postsecondaire manifestant à Toronto le 18 janvier 2020 contre les coupes budgétaires du gouvernement Ford en éducation.

Forum ouvrier s'est entretenu avec Colleen Burke, présidente de la section locale 1998 du Syndicat des Métallos, sur ce qui se passe à l'Université de Toronto et dans les établissements d'enseignement supérieur en général. Le personnel administratif et technique de l'Université de Toronto, représenté par la section locale 1998 du Syndicat des Métallos, est essentiel au fonctionnement de l'enseignement supérieur. Les cadres supérieurs de l'Université de Toronto et de tout l'enseignement supérieur aiment à dire « Merci pour tout ce que vous faites », mais ils décident avec arrogance quels seront les protocoles de « retour au travail » tandis que les travailleurs n'ont pas leur mot à dire et sont censés réagir aux décrets de la direction.

Forum ouvrier : Commençons par une brève introduction.

Colleen Burke : D'accord. Je suis présidente de la section locale 1998 du Syndicat des Métallos. Nous représentons plus de 8 000 membres - le personnel administratif et technique de l'Université de Toronto, de l'Université Victoria, du Collège St. Michael et de l'École de l'Université de Toronto.

Nos membres travaillent à domicile depuis environ le 20 mars. L'université fonctionne toujours. Bien que la plupart des bâtiments soient fermés, il existe quelques exceptions telles que les édifices des résidences, les services de santé pour ceux qui se trouvent sur le campus, et ainsi de suite.

Organiser le travail de tout le monde pour qu'il se fasse à domicile a été une transition énorme et, bien sûr, il y a des techniciens de laboratoire, des gens de la restauration et d'autres qui ne travaillent pas parce que leur travail ne peut pas être fait à domicile. Beaucoup de contrats se sont poursuivis jusqu'au 30 avril. Ensuite, il y a ceux qui sont employés dans des camps d'été pour enfants ou embauchés pour les huit semaines de remise des diplômes et ainsi de suite. Nous avons également environ 3 000 à 3 500 occasionnels et l'université a également prolongé la garantie de rémunération pour nos membres occasionnels. Ça, c'était très bien.

Nous avons également connu des licenciements temporaires dans quelques départements. Environ 70 personnes à plein temps ont été licenciées pendant 13 semaines. Elles seront admissibles à la prestation canadienne d'urgence et, encore une fois, l'université est intervenue avec 1 000 $ de plus par mois et en payant les deux portions de leurs prestations médicales.

FO : Quels sont les principaux problèmes auxquels le syndicat et vos membres sont confrontés ?

CB : Avant la fermeture, beaucoup étaient inquiets et voulaient travailler à domicile, mais ils ont été empêchés de le faire dans la plupart des cas. Ce n'est que lorsque la province a déclaré une situation d'urgence que l'enjeu du travail à domicile a été résolu. Jusque-là, nous étions très occupés par les problèmes de santé et de sécurité. Même maintenant, nous traitons les problèmes de santé et de sécurité des membres qui fournissent des services aux étudiants sur le campus, dans les résidences, les services de santé pour les étudiants, les services informatiques, etc. Pour les personnes travaillant à domicile, la garde d'enfants est un gros problème. Les gestionnaires s'appuient sur le personnel qui travaille et sont à la fois des parents à domicile. Officiellement, la position de l'université est que les gestionnaires devraient être flexibles, mais certains gestionnaires harcèlent beaucoup nos membres. Nos membres s'inquiètent également des licenciements. Certains départements ordonnent aux gens de prendre des vacances. Le syndicat a accepté cela comme moyen d'atténuer les licenciements.

FO : Est-ce qu'on entend parler de la façon dont vous allez faire la transition vers le retour au travail ?

CB : Le plan de santé et de sécurité pour le retour au travail est un gros enjeu pour le syndicat. L'université a publié une feuille de route sur le retour au travail. Nos comités mixtes de santé et de sécurité n'ont jamais participé à l'élaboration du plan de santé. L'université se réserve cela comme une prérogative de gestion. Il en va de même pour les protocoles de retour au travail. Cela entraînera inévitablement toutes sortes de plaintes après coup. Nous avons un responsable de santé et de sécurité à plein temps, mais ce ne sera pas facile. Notre section locale des Métallos collabore avec d'autres syndicats et d'autres sur le campus pour élaborer des protocoles appropriés de retour au travail dans les divers milieux de travail. C'est ainsi que ça se passe dans tous les établissements d'enseignement postsecondaire, je pense.

La section locale 1998 du Syndicat des Métallos travaille au sein des syndicats et des associations d'employés de l'Université de Toronto (UTEAU), un groupe de coordination informel d'associations étudiantes, de syndicats et d'associations de professeurs sur les trois campus de l'Université. Nous travaillons sur un document commun concernant nos valeurs, nos aspirations, etc. à la lumière de la COVID-19, afin d'identifier nos revendications immédiates à l'université et nos revendications à plus long terme au gouvernement provincial. Les universités sont déjà sous-financées et nous sommes inquiets de ce qui va se passer quand cette crise immédiate sera résorbée.

Les services de garde vont poser un autre sérieux problème. Environ 70 % de nos membres sont des femmes et ce sont elles qui en portent et en porteront le plus gros fardeau. Je connais une membre qui a dû prendre un congé pour raison de stress parce que travailler à la maison pendant qu'elle s'occupait des enfants était trop difficile. Certaines personnes raccourcissent leur semaine de travail en prenant des jours de vacances ici et là. D'autres peuvent opter pour le temps partiel, si possible, car c'est trop compliqué sans services de garde.

Comment les gens vont-ils même se rendre au travail et en revenir en toute sécurité ? Les gens sont à juste titre préoccupés par le transport en commun. Qui est responsable de veiller à la santé des usagers des transports en commun ? Au fur et à mesure que les activités recommencent, ce sera une sérieuse préoccupation.

FO : Y a-t-il autre chose que tu aimerais partager avec nos lecteurs ?

CB : Nous sommes tous très préoccupés par l'impact financier de la pandémie de la COVID-19. Tout le monde au niveau postsecondaire regarde ce qui se passera en septembre. Combien d'élèves se présenteront ? Combien d'étudiants internationaux viendront ? La réalité ici est que les étudiants internationaux sont considérés comme une vache à lait. Les frais de scolarité des étudiants internationaux représentent environ 20 % des revenus en frais de scolarité de l'Université de Toronto. Combien seront prêts à payer un prix exorbitant pour une expérience d'éducation en ligne, c'est-à-dire sans enseignement en classe ?

Il n'y a eu aucune annonce de financement fédéral de soutien à l'éducation postsecondaire. Nous voulons obtenir un soutien financier pour surmonter l'impact de cette pandémie. Je sais que les étudiants veulent également des réductions de frais de scolarité et j'appuie cela. Mais l'enseignement postsecondaire lui-même va avoir d'énormes problèmes sans financement supplémentaire. Et lorsque nous en sortirons, verrons-nous une autre série de mesures d'austérité ?

Cette année 2020 est une année de négociation des conventions collectives à l'Université de Toronto et tous les travailleurs du secteur de l'éducation postsecondaire négocient dans le cadre des mesures d'austérité de 1 % imposées par le projet de loi 124. Curieusement, depuis le début de la pandémie, ces problèmes sont loin d'être les seuls auxquels nous devons faire face.


Cet article est paru dans

Numéro 45 - Numéro 45 - 30 juin 2020

Lien de l'article:
La situation de l'éducation supérieure en Ontario - Entrevue avec Colleen Burke


    

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