Les organisations de défense des travailleurs migrants revendiquent le statut de résident permanent face à l'exploitation croissante
- Diane Johnston -
Le 8 juin, l'Alliance des travailleurs
migrants pour le changement (MWAC) a publié, au
nom de plus de 1 000 travailleurs, un
rapport de plaintes de 28 pages
intitulé :
Unheeded Warnings : COVID-19 and Migrant
Workers in Canada. Le rapport porte
sur des plaintes qui n'ont pas été entendues par
les autorités fédérales et provinciales et les
consulats, avant les récentes flambées de la
COVID-19 qui ont entraîné deux décès de
travailleurs et amené au moins deux autres aux
soins intensifs. » [1]
La coauteure et coordinatrice des campagnes de la
MWAC, Karen Cocq, a noté dans un communiqué de
presse publié le même jour : « La plupart des
travailleurs à qui nous avons parlé savaient
qu'ils tomberaient malades à cause de leurs
conditions de vie et de travail, mais ne pouvaient
pas s'exprimer car cela signifiait la résiliation
de leur contrat, l'itinérance, la perte de
revenus, la déportation et l'incapacité de revenir
à l'avenir. » Elle conclut que « pour
empêcher que cette crise sérieuse ne s'aggrave, il
est nécessaire que tous les migrants obtiennent
immédiatement le statut de résident
permanent ».
Le rapport situe ces abus dans la longue histoire
d'avertissements non respectés sur plusieurs
décennies qu'ont lancés les travailleurs migrants
au sujet des lois canadiennes sur l'immigration et
le travail temporaires.
Par le biais du
communiqué de presse, nous apprenons que « les
plus grandes éclosions de la COVID-19 se sont
produites chez Scotlynn Farms, l'une des plus
grandes exploitations agricoles de l'Ontario. Un
travailleur migrant a dit : « Ils nous
traitent comme des robots. Ils ne se soucient que
du travail que nous faisons et de l'argent qu'ils
gagnent grâce à notre travail. Scotlynn Farms dit
qu'ils ont pris soin de nous, mais lorsque le
premier travailleur est tombé malade ici, ils
n'ont rien fait. Nous, les travailleurs, nous nous
sommes réunis et avons appelé l'ambulance. »
Le travailleur a ajouté : « Ce n'est pas
juste qu'ils nous traitent comme ça. Nous avons
besoin de l'égalité des droits et du statut de
résident permanent. »
Selon Sonia Áviles, organisatrice de la MWAC, qui
gère l'une des lignes directes où les plaintes ont
été déposées : « Le gouvernement fédéral a
donné près d'un milliard de dollars aux
entreprises agroalimentaires, tandis que les
migrants qui produisent les aliments tombent
malades et meurent. » Ce qui est nécessaire,
ajoute-t-elle, c'est que « le gouvernement fédéral
et le gouvernement provincial se rendent sur place
pour voir ce qui se passe et corrigent les choses
pour assurer la protection des travailleurs avant
que plus de personnes ne décèdent - ce qui
signifie des inspections non annoncées, des
mesures de distanciation sociale et le statut de
résident permanent. »
Le communiqué de presse indique également
qu'en 2017, les travailleurs migrants
représentaient 41,6 % de tous les
travailleurs agricoles de l'Ontario et plus
de 30 % de ceux du Québec, de la
Colombie-Britannique et de la Nouvelle-Écosse.
« Les employeurs utilisent la COVID-19 pour
enfermer les travailleurs migrants, refuser de les
laisser sortir même pour faire l'épicerie ou
envoyer des fonds chez eux, tout en les
menaçant », note Kit Andres, organisateur de
la MWAC, qui gère la ligne d'assistance
téléphonique où les plaintes ont été reçues. « Les
travailleurs, a-t-il déclaré, ont besoin du statut
de résident permanent pour pouvoir faire valoir
leurs droits. »
La MWAC a envoyé au gouvernement fédéral
plusieurs lettres concernant des migrants qui sont
également restées sans réponse.
Depuis le début de la pandémie, note le
communiqué, plus de 6 000 personnes ont
signé une pétition ici demandant
qu'on
leur octroie un statut complet d'immigration à
leur arrivée et le Réseau des droits des migrants
a envoyé au gouvernement fédéral plusieurs lettres
concernant les migrants qui ont également été
ignorées.[2]
Certaines des principales conclusions du rapport
sont les suivantes :
- L'absence de statut de résident permanent ne
permet pas aux travailleurs de faire valoir leurs
droits ;
- Les employeurs ne prennent pas de précautions
concernant la COVID-19 ;
- Le vol des salaires est monnaie courante, sous
forme de retenues et de salaires impayés ;
- Les fermetures des frontières ont entraîné une
perte de revenu et les travailleurs ont été
contraints de se rendre au Canada, car aucun
soutien du revenu n'était disponible ;
- Les travailleurs ne pouvaient pas se distancer
socialement et ne recevaient pas de nourriture ni
un revenu décent ou d'informations de la santé
publique pendant la quarantaine ;
- Les conditions de logement se sont
considérablement dégradées après la mise en
quarantaine et des restrictions plus grandes ont
été imposées à la mobilité des travailleurs ;
- L'intimidation, la surveillance, les menaces et
le racisme ont considérablement augmenté ;
- Le travail s'est intensifié considérablement
pendant la COVID-19.
Le Réseau des droits des migrants organise
le 14 juin à midi un rassemblement virtuel
pour obtenir un statut complet d'immigration pour
tous. Voir le calendrier des événements ci-dessus
ou pour plus d'informations, cliquer ici
Notes
1. L'Alliance des
travailleurs migrants pour le changement (MWAC)
est une organisation et une coalition. En tant que
coalition, 28 organisations membres appuient
le fait que les travailleurs s'organisent,
partagent les ressources et plaident ensemble pour
des changements à la politique d'immigration et de
la réglementation du travail. La MWAC est une
coalition de groupes de travailleurs agricoles
dirigée par des migrants, des travailleurs
sociaux, des sans-papiers, des étudiants
internationaux et des organisations locales et
nationales. En tant qu'organisation, la MWAC
appuie les travailleurs migrants qui s'organisent
dans des zones ou des secteurs non organisés.
Actuellement, l'alliance se concentre à appuyer
les travailleurs migrants qui s'organisent dans la
région de Niagara et voit à l'organisation des
étudiants migrants. La MWAC est un membre du
Réseau des droits des migrants dont elle forme le
secrétariat - la plus grande coalition canadienne
pour la justice des migrants, dont elle est
membre.
2. Le Réseau des droits des
migrants se définit comme une « alliance
pancanadienne pour lutter contre le racisme et
pour la justice envers les migrants ». Il se
décrit comme « un réseau de groupes autoorganisés
de réfugiés, de migrants et d'alliés ».
(Photos: Migrant Workers
Alliance for Change, Justice for Migrant
Workers)
Cet article est paru dans
Numéro 40 - Numéro 40 - 11 juin 2020
Lien de l'article:
Les organisations de défense des travailleurs migrants revendiquent le statut de résident permanent face à l'exploitation croissante - Diane Johnston
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