Les travailleurs en lockout tiennent bon

Le lockout injuste des travailleurs de la raffinerie Co-op en Saskatchewan entre dans son sixième mois


Les travailleurs de la raffinerie Co-op en lockout tiennent un rassemblement de voitures devant l'édifice de la législature de la Saskatchewan, le 7 mai 2020.

Les membres de la section locale 594 d'Unifor qui travaillent pour les Coopératives fédérées (FCL) sont maintenant en lockout depuis le 5 décembre 2019. Les 730 travailleurs ont été mis en lockout après avoir voté contre l'offre de la compagnie durant les négociations et émis un préavis de grève de 48 heures. La compagnie avait préparé son geste depuis des mois et avait bâti un camp pour les scabs qui ont été amenés très rapidement de l'extérieur de la province. La production s'est poursuivie avec les cadres et les scabs et elle a été réduite à la mi-avril à cause de la baisse de la demande dans le cadre de la pandémie.

Dès le début, la compagnie s'est appuyée sur l'État et la police dans une tentative après l'autre de diminuer l'impact du piquetage du syndicat, en commençant par une injonction en décembre qui limitait le piquetage, un harcèlement constant et l'arrestation de plusieurs travailleurs sur les lignes de piquetage. Pendant toute cette dure lutte des travailleurs pour défendre leur droit de négocier des salaires et des conditions de travail acceptables, contre les demandes toujours plus poussées de concessions de la compagnie sur les pensions et d'autres aspects qui ont été négociés dans le passé, les travailleurs ont reçu l'appui des membres de sections locales d'Unifor et d'autres syndicats au pays.

Le 5 mars, le syndicat a déposé deux plaintes auprès de la Commission des relations de travail de la Saskatchewan pour pratique déloyale de travail: une pour espionnage industriel et l'autre pour négociation de façade. Dans ses plaintes, le syndicat décrit différentes actions de la compagnie, qui a suivi les travailleurs jusqu'à chez eux, a retenu de l'argent qu'elle leur devait, et, en ce qui concerne la négociation, a négocié juste pour la forme (une « négociation de façade ») sans faire d'effort pour négocier une convention collective. Dans ses discussions avec le syndicat une fois le lockout décrété, la compagnie est revenue à la charge avec des demandes de concessions qui avaient été abandonnées auparavant lorsque les travailleurs avaient abandonné certaines de leurs demandes. Il n'y a eu encore aucune audience sur ces deux plaintes.

Le syndicat a réclamé l'intervention du gouvernement et la nomination d'un médiateur qui produirait un rapport, lequel serait exécutoire et mettrait fin au conflit. En février, les médiateurs Vince Ready et Amanda Rogers ont été nommés. Le 19 mars, après 20 jours de discussion avec la compagnie et le syndicat, les médiateurs ont remis leur rapport qui n'était pas exécutoire. Leur proposition de résolution comprenait des changements au régime de retraite qui auraient forcé les travailleurs à payer des millions de dollars dans le régime à même leurs salaires. Bien que le rapport des médiateurs favorisait grandement la compagnie, les travailleurs, en l'espace de quelques jours, ont voté à 98 % en sa faveur afin de mettre fin au lockout et de retourner au travail.

La compagnie a immédiatement rejeté le rapport et a demandé d'autres concessions. Le président de la section locale 594, Kevin Bittman, a réitéré la position du syndicat, qu'il était trop tard, que le « rapport des médiateurs était le processus que les travailleurs et la compagnie avaient accepté, nous l'avons ratifié et le gouvernement de Scott Moe doit le mettre en oeuvre. » Le syndicat a continué de demander au gouvernement de la Saskatchewan de Scott Moe de rendre les recommandations des médiateurs exécutoires et de forcer la compagnie à mettre fin au lockout.

Le 28 avril les membres de la section locale 594 d'Unifor ont voté à 89 % contre « la meilleure offre finale » que la compagnie a tenté d'imposer depuis son rejet du rapport des médiateurs. Dans le communiqué de presse du 29 avril d'Unifor, le président de la section locale 594 a écrit :

« Le premier ministre a engagé les médiateurs les plus expérimentés au pays. Il doit maintenant
faire ce qui est logique et appliquer les recommandations des médiateurs. » Les travailleurs poursuivent leur travail d'information et de mobilisation.

Le 7 mai, plus de 300 véhicules ont convergé vers l'immeuble de la législature de la Saskatchewan en appui aux travailleurs en lockout, et de nombreux membres de la section locale 594, leurs familles, et leurs sympathisants ont participé à l'action. Les véhicules ont encerclé la législature, sous le bruit des klaxons et arborant drapeaux, bannières et pancartes. Le même jour, étant empêchés de tenir un piquetage efficace au site CCRL de Regina, les membres de la section 594 ont dressé une ligne de piquetage au site Co-op Bulk Fuel à Moose Jaw, un site qui n'est pas visé par l'ordonnance de la cour qui restreint le piquetage à la raffinerie. La GRC s'est tout de suite présentée pour faire du harcèlement, et, le lendemain, elle a menacé de porter des accusations de méfait si les piqueteurs entravaient l'entrée et la sortie des personnes au site.

L'avocat du travail de la Saskatchewan, Ronni Nordal, a décrit la situation en ces termes : « Il semble que, le 8 mai 2020, la CCRL (Coopérative des consommateurs de la Raffinerie Limitée) peut continuer d'exploiter la raffinerie avec ses travailleurs de remplacement, tandis qu'il a été déclaré illégal que les membres de la section locale 594 d'Unifor exercent tout droit à un piquetage efficace. Le droit de piqueter en Saskatchewan a été réduit à se tenir sur le côté de la route et à faire un signe de la main aux automobilistes, à moins qu'un conducteur ne choisisse volontairement de s'arrêter pour parler aux travailleurs en lockout. Le cycle est complet, la loi protège le droit de l'employeur à bâtir un camp pour loger les travailleurs de remplacement au beau milieu d'une pandémie, tout en faisant usage de toute sa force pour faire en sorte que le piquetage n'ait aucun impact sur les opérations de l'employeur. » [1]

Les membres en lockout de la section locale 594 d'Unifor font tout ce qu'ils peuvent pour mobiliser l'opinion publique en appui à leurs justes demandes. Ils appellent à la continuation du boycottage de la Co-op et demandent que des messages d'appui soient envoyés à leur page Facebook et ils organisent d'autres actions.

Non aux concessions antiouvrières !
Tous en appui aux travailleurs de la raffinerie FCL de Regina !

Note

1. « Right to Picket All But Dead in Saskatchewan : RCMP Moves In to Protect Co-Op in Protracted Lockout », Ronni Nordal, Canadian Law of Work Forum, 8 mai 2020


Cet article est paru dans

Numéro 35 - Numéro 35 - 19 mai 2020

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