Les infirmières du Québec défendent leur droit de prendre la parole sur les problèmes vitaux liés à la lutte contre la pandémie


Plusieurs photos affichées sur la page Facebook de la FIQ rendent hommage
aux travailleurs de la santé.

Dans son communiqué de presse du 16 mai, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec-FIQ critique sévèrement l'annonce faite par la ministre de la Santé et des Services sociaux d'instaurer une boîte courriel confidentielle entre le ministère et les travailleurs et travailleuses de la santé. Ceux-ci sont invités à envoyer des messages de dénonciation ou faire état de leur satisfaction face à différentes mesures prises dans la lutte à la pandémie de la COVID-19.

La FIQ écrit dans son communiqué :

« La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec-FIQ est exaspérée des gestes superficiels du gouvernement qui tente de faire croire qu'il écoute les professionnelles en soins. Réagissant à l'annonce d'une nouvelle boîte courriel, ironiquement baptisée ‘On vous écoute', la FIQ estime que cette initiative, loin de mettre fin à l'omerta qui sévit dans le réseau de la santé, vise à limiter les prises de parole des professionnelles en soins dans l'espace public.

« 'Depuis le début de l'année, c'est la troisième fois que la ministre annonce la fin de l'omerta et que ça ne veut strictement rien dire. Le gouvernement dit qu'il veut des nouvelles du terrain, mais il ne respecte pas les professionnelles de terrain, il ne les entend pas, il les méprise, il bafoue leurs droits à coup d'arrêtés et aujourd'hui, il trouve encore un autre moyen de les faire taire', affirme Nancy Bédard, présidente de la FIQ.

[...]

« 'La ministre dit qu'elle veut savoir où ça se passe précisément. Comment se fait-il qu'elle ne le sache pas ? Est-ce qu'on pense vraiment qu'en acheminant des commentaires au Ministère ça va redescendre dans les établissements et que les problèmes vont être réglés ? Est-ce que ces courriels-là seront gérés comme ceux du site Je contribue ? [site du gouvernement où des personnes se portent volontaires pour aller aider dans les établissements de santé - La FIQ a souvent souligné qu'elle attend toujours les milliers de volontaires annoncés qui doivent venir aider ses équipes. Note de FO] La fin de l'omerta devrait signifier que les professionnelles en soins sont enfin libres de parler sans craindre les représailles et non que l'on mette à leur disposition une boîte courriel qui servira à étouffer leurs dénonciations', déclare Mme Bédard. »

La FIQ rappelle qu'elle a établi le site fiqsante.qc.ca/jedenonce dans lequel ses membres et le public dénoncent les situations inacceptables qui se produisent et auquel la ministre peut accéder.

Elle demande à la ministre de donner l'ordre aux administrateurs des hôpitaux de cesser leurs avis disciplinaires contre les professionnelles de la santé qui prennent la parole, plutôt que de créer cette boîte courriel. Elle demande aussi à la ministre et au gouvernement de cesser de procéder par décrets et arrêtés ministériels et d'écouter la voix des professionnelles, de négocier avec les professionnelles en soins et de respecter leur jugement clinique et de leur fournir les équipements nécessaires.

En effet, le gouvernement du Québec, au nom de l'urgence sanitaire, procède constamment par arrêtés ministériels, au lieu d'écouter la voix des travailleurs et des travailleuses de la santé et des services sociaux. Il s'est notamment donné le pouvoir, par arrêté ministériel, de modifier unilatéralement les conventions collectives et les conditions de travail du personnel de ces services. Au centre de l'action du gouvernement est le refus de reconnaître la lutte et la force organisée des travailleurs, qui rendent encore plus puissante la contribution essentielle qu'ils font déjà en produisant les biens et fournissant les services dont dépend la société, en tout temps et en période de crise comme c'est le cas en ce moment. Ce caractère organisé, qui permet le déploiement du facteur humain/conscience sociale pour résoudre les problèmes à l'avantage des travailleurs et de la société, est considéré comme une entrave à l'entière remise du pouvoir à des intérêts privés étroits et à leurs organes exécutifs arbitraires.

Il n'est pas étonnant que la ministre indique clairement que cette mesure de boîte courriel fait partie d'un plan plus large de mise au silence des travailleurs et des travailleuses. Dans le communiqué qui annonce la mesure, la ministre écrit : « Il s'agit d'une première action qui s'inscrit dans une démarche globale visant à mieux encadrer les pratiques entourant la confidentialité et les communications publiques, notamment sur les médias sociaux. En effet, la ministre de la Santé et des Services sociaux envisage de déposer, à l'automne prochain, une politique cadre qui s'appliquerait sur l'ensemble du territoire québécois et qui serait accompagnée d'un mécanisme de communication des enjeux non résolus. »

On ne peut dire plus clairement que l'autorité politique actuelle cherche à utiliser la crise de la pandémie pour accroître son propre pouvoir au détriment d'une recherche de solutions aux problèmes, où la prise de parole par ceux qui font le travail et protègent nos vies, pour déterminer ce qui doit être fait pour le bien-être de tous, est essentielle à la solution des problèmes.

L'opposition de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec-FIQ à cette mesure du gouvernement du Québec est juste et légitime.


Cet article est paru dans

Numéro 35 - Numéro 35 - 19 mai 2020

Lien de l'article:
Les infirmières du Québec défendent leur droit de prendre la parole sur les problèmes vitaux liés à la lutte contre la pandémie


    

Site Web:  www.pccml.ca   Email:  redaction@cpcml.ca