Les organismes de défense du droit au logement prennent la parole

Depuis la fin du mois de mars, différentes organisations de défense des droits ont proposé des mesures concrètes pour venir en aide aux ménages locataires qui ne seront pas en mesure de payer les prochains mois de loyer. Elles n'ont pas accepté la réponse du premier ministre Legault qui demandait aux propriétaires d'être « compréhensifs » envers les locataires dans l'incapacité de payer leur loyer au 1er avril. « On ne peut laisser cet arrangement entre les mains des individus car il existe sur le marché immobilier de nombreuses compagnies à numéros qui seront peu enclines à attendre pour le paiement du loyer », ont-elles indiqué. Elles demandent au gouvernement d'agir.

Le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), actif depuis plus de 40 ans pour la défense du droit au logement, a publié les demandes suivantes pour que le gouvernement du Québec prenne action :

-interdise toute tentative d'éviction imputable au non-paiement du loyer d'avril 2020 (ainsi que pour chaque mois supplémentaire qui sera déclaré comme urgence sanitaire) ;

-plus largement, qu'il suspende toutes les audiences à la Régie du logement et les exécutions de jugement menant à l'éviction de locataires, jusqu'à ce que les mesures de confinement soient levées et que les locataires aient rétabli leur capacité de payer leur loyer ;

-allonge d'un mois la période dont disposent les locataires pour répondre à l'avis de renouvellement du bail ;

-envisage que tous les baux en vigueur soient prolongés pour une période correspondant minimalement à la durée de l'urgence sanitaire ;

-mette en place un programme de suppléments au loyer d'urgence pour les ménages locataires à faibles revenus.

En ce qui a trait au gouvernement fédéral, le FRAPRU rappelle que « De son côté, le gouvernement Trudeau doit :

-mettre en place un fonds de dépannage spécial pour soutenir les locataires dans l'incapacité de payer l'entièreté ou une partie de leur loyer ;

-rendre disponibles les sommes nécessaires à la réparation des logements sociaux existants financés par le passé par votre gouvernement et qui sont actuellement barricadés en raison de leur mauvais état. »

Le réseau FADOQ, qui représente plus de 535 000 personnes âgées de plus de 50 ans, a fait part aussi de ses préoccupations le 3 avril dernier face aux hausses de loyer imposées à des aînés vivant en résidences privées pour aînés (RPA). Il réclame que « tous les avis d'augmentation de loyer soient reportés à une date ultérieure [et] qu'aucun frais accessoire ne soit facturé aux aînés vivant en RPA s'il s'agit de mesures de prévention pour freiner la propagation de la COVID-19. »

« Nous avons reçu de nombreux signalements de nos membres à ce sujet. Par ailleurs, la situation actuelle fait en sorte que les locataires ne peuvent pas obtenir de l'aide en personne de la part des CAAP (centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes du Québec). Cette situation est aberrante et nous demandons qu'un gel des baux soit envisagé dès maintenant », déclare la présidente du Réseau FADOQ, Gisèle Tassé-Goodman.

Le 1er avril, une lettre signée par 34 avocats et avocates et étudiants en droit parue dans Le Droit soulignait que la défense de la dignité humaine est au coeur de ces demandes :

« Pour les raisons énumérées et pour des considérations élémentaires de dignité humaine, nous, les juristes, avocat-es et étudiant-es en droit soussigné-es, demandons une annulation des loyers directement affectés par la crise sanitaire, soit au moins pour avril et mai 2020, ainsi que des mesures d'aide matérielle ou financière permettant à toutes et tous - locataires et locateurs confondus - de se pourvoir des biens nécessaires à la vie et de ne pas se trouver pénalisé-es à la fin de la crise en raison de défauts de paiement accumulés. »

Ils ont ajouté de plus : « nous pensons qu'il serait souhaitable de profiter du contexte pour voir émerger des solutions durables et pérennes à une crise du logement et à une précarité chronique de locataires qui est bien antérieure au contexte de pandémie. Être à la hauteur de la situation, c'est également faire preuve de courage politique et d'asseoir les bases d'une société plus juste sur le long terme. »


Cet article est paru dans

Numéro 22 - 17 avril 2020

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