Opposition à l'utilisation de la pandémie pour intensifier l'offensive antisociale

Pour le gouvernement albertain, la pandémie de la COVID-19 devient un prétexte pour faire des compressions en éducation

La ministre de l'Éducation de l'Alberta, Adriana LaGrange, a annoncé le 28 mars que le gouvernement cesserait de financer les enseignants suppléants et le personnel de soutien y compris les éducateurs dans tous les conseils scolaires de l'Alberta pendant les deux derniers mois de l'année scolaire 2019-2020. Le programme scolaire en Alberta de la maternelle à la douzième année est maintenant fourni en ligne.

Le communiqué du gouvernement n'a pas précisé à quelles allocations il mettrait fin. L'attaché de presse de la ministre a ensuite déclaré que 128 millions de dollars étaient retirés du budget de l'éducation et « redirigés » dans des programmes non spécifiés afin de répondre à la pandémie de la COVID-19. Selon la CBC, un porte-parole du gouvernement a dit que les compressions représenteraient une réduction de 14 % de l'allocation de base en éducation et de 51 % de l'allocation du transport.

L'annonce a été faite au moment où les étudiants et le personnel dans plusieurs conseils scolaires (dont les plus importants à Calgary et Edmonton) s'apprêtent à retourner à l'école après la semaine de relâche. Au cours de cette semaine, les commissions et plusieurs membres du personnel se sont concentrés sur comment procéder dans la période qui vient. Dans certains cas, les travailleurs de l'éducation ont déjà commencé à rencontrer les étudiants aux besoins particuliers chez eux et à organiser l'apprentissage en ligne. La décision du gouvernement aggrave une situation déjà difficile d'un système où les travailleurs de l'éducation font tout ce qu'ils peuvent pour s'orienter et se préparer au début des cours en ligne.

Le personnel concerné a été informé qu'il pourra s'inscrire au programme bonifié d'assurance-emploi du gouvernement fédéral et à « d'autres programmes de soutien », ce qui contredit les propos tenus par la ministre le 15 mars lorsque les fermetures d'école ont été annoncées et que, se voulant rassurante, elle avait dit que le financement scolaire ne serait pas touché et que le personnel ne serait pas mis à pied. Le 3 mars, le gouvernement s'est empressé d'adopter une loi exigeant que les conseils scolaires obtiennent l'autorisation du gouvernement provincial pour pouvoir avoir recours aux fonds de réserve, supprimant ainsi cette option.

La décision a été prise sans aucune consultation avec les syndicats ni avec les conseils scolaires. Le communiqué de presse a précisé qu'aucun financement ne serait alloué aux conseils scolaires pour les enseignants suppléants. Comment les élèves vont-ils pouvoir bénéficier d'un enseignement si leur enseignant est malade et ne peut plus travailler, même de la maison ? Est-ce que leurs cours seront tout simplement annulés ? Est-ce qu'aux yeux de la ministre les enfants ayant des besoins particuliers sont sacrifiables et ne mériteraient pas l'aide dont ils ont besoin ? Dans cette crise où les besoins sont si criants, le gouvernement dilapide de façon irresponsable de précieuses ressources. Par exemple, les chauffeurs d'autobus scolaire pourraient être redéployés pour apporter leurs sacs d'épicerie,  des repas ou d'autres nécessités aux gens qui doivent rester en isolement à la maison.

L'irresponsabilité du gouvernement est telle que la ministre de l'Éducation ne sait même pas combien de personnes perdront leur emploi ni même quelles sont leurs tâches. La présidente du Conseil scolaire des écoles publiques d'Edmonton, Trisha Estabrooks, a affirmé que même les conseils scolaires ne connaissent pas les répercussions de ces compressions. « Nous avions fait des plans pour utiliser un très grand nombre de ces membres du personnel qui seront touchés par la décision d'aujourd'hui. Nous avons besoin d'eux, » a-t-elle soutenu.

Le financement scolaire en Alberta se fait en fonction de chaque école. On subventionne chaque école selon le nombre d'élèves inscrits ainsi que d'autres facteurs tels que le nombre d'élèves qui font l'apprentissage de l'anglais ou ayant des besoins particuliers. Les directeurs d'école, en consultation avec le personnel enseignant, peuvent décider d'avoir de plus grandes classes avec plus d'éducateurs ou des classes réduites avec moins d'intervenants. Ces décisions sont prises en tenant compte des besoins des élèves d'une école en particulier. La ministre de l'Éducation est indifférente et ignorante face aux conséquences de ses décisions qui sont prises en présumant que les travailleurs de l'éducation sont un « coût » plutôt qu'une ressource précieuse qui engendre une immense valeur.

Et comme si cela ne suffisait pas, les autorités scolaires doivent préparer leurs budgets 2020-2021 pour la date prévue du 31 mai, sans l'apport du personnel administratif ou de la comptabilité, et sans savoir quel est le nombre exact de membres du personnel qui ont contracté la COVID-19.

Toutes les mises à pieds doivent être arrêtées et inversées immédiatement. Les syndicats doivent être consultés sur la manière dont le personnel peut être mobilisé pour fournir le soutien et l'assistance nécessaires aux étudiants pour qu'ils puissent continuer de suivre leurs cours. Cela inclut la fourniture d'ordinateurs, de logiciels et d'accès à l'Internet à tous les étudiants qui n'en disposent pas. Un gouvernement qui considère les travailleurs et les jeunes comme son plus grand actif identifierait facilement les moyens par lesquels les aides-enseignants et le personnel de soutien pourraient constituer un soutien vital aux familles en temps de crise. Par exemple, tout aide-enseignant qui serait dégagé de ses responsabilités habituelles pourrait être réaffecté au soutien des initiatives de santé publique, en tirant parti des liens et des relations qu'il entretient déjà avec les familles pour veiller à ce que personne ne soit laissé à lui-même en période de pandémie.

Utiliser la pandémie comme prétexte pour réduire le financement à l'éducation est inacceptable et montre que le premier ministre et la ministre de l'Éducation sont tous deux inaptes à gouverner. Les enseignants et le personnel de soutien sont à pied d'oeuvre pour voir comment ils peuvent fournir aux étudiants ce dont ils ont besoin dans ces conditions. Ils se font entendre et exigent que le gouvernement abandonne immédiatement sa décision qui est à la fois inhumaine, destructrice et irresponsable. Ils montrent dans les faits où doit résider le pouvoir décisionnel pour que les décisions soient prises dans l'intérêt des élèves et des travailleurs de l'éducation.


Cet article est paru dans

Numéro 17 - 2 avril 2020

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Opposition à l'utilisation de la pandémie pour intensifier l'offensive antisociale: Pour le gouvernement albertain, la pandémie de la COVID-19 devient un prétexte pour faire des compressions en éducation - Kevan Hunter


    

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