« Nous faisons cela pour pouvoir continuer à fournir le service »

Alain Robitaille est le président de la section locale de Montréal du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes.

La situation évolue assez vite. Ce qu'on tente de faire c'est de réduire à la source les risques de contagion. Ils ne seront jamais réduits à zéro, nous en sommes conscients, mais nous avons tous un rôle à jouer pour réduire les risques de contagion le plus possible pour que nos travailleurs restent au travail parce que la société doit continuer à rouler. Ils doivent rester au travail dans des conditions qui sont le plus appropriées possible dans les circonstances que nous vivons dans le moment.

Nous avons négocié avec l'employeur que nous n'avons plus de contact directement avec le client. Nos facteurs/factrices sonnent à la porte, s'il y a une signature, on oublie la signature, on donne directement l'envoi au client. Si le client n'est pas là, on tente de déposer le colis en lieu sûr. En dernier recours seulement, on envoie cela dans les comptoirs postaux, on laisse une carte pour que les gens se rendent dans les comptoirs postaux. On ne veut pas bifurquer la problématique vers les gens qui sont commis aux comptoirs parce qu'ils sont à risque eux aussi.

Nous avons une multitude de héros sur nos planchers de travail qui restent et font face à cette crise-là. Il faut le souligner, ce sont des héros qui tiennent le fort malgré le risque imminent.

On se dit qu'en bout de ligne, la poste va devenir de plus en plus importante dans l'avenir parce que si les gens restent à la maison, c'est certain qu'il y aura expansion du volume de colis. Les gens vont commander les produits dont ils ont besoin en ligne. Nous allons devenir de plus en plus essentiels. Si la poste ne peut plus être livrée, on a de la misère à voir pourquoi un travailleur d'épicerie voudrait aller au travail, pourquoi le travailleur de la ville rentrerait à l'usine d'épuration, pourquoi le travailleur qui amasse les vidanges rentrerait au travail. Nous sommes ensemble à faire face à la situation et avons tous un rôle à jouer.

Nous sommes contents qu'à la suite de notre négociation avec l'employeur, celui-ci , compte tenu du risque le plus fort qui est encore celui d'une contagion par quelqu'un qui revient de voyage qui infecte des gens qui n'ont pas voyagé, appelle tous les gens qui doivent revenir de vacances. Il leur demande s'ils sont revenus de leur voyage à l'étranger, États-Unis compris. et, si oui, ils sont envoyés en quarantaine obligatoire, payés pendant 14 jours. Si un travailleur a des symptômes sur le plancher de travail, c'est une quarantaine 14 jours, payée. Pas besoin d'aller voir son médecin.

Pour les gens qui ont besoin de gardiennage, nous avons une disposition dans notre convention collective qui prévoit des congés spéciaux avec 100 % du salaire, qui n'affectent pas les autres congés, ou les vacances. La haute direction a autorisé les superviseurs à autoriser des périodes de cinq jours de congés spéciaux.

La fréquence du nettoyage des succursales, les endroits communs, a été haussée. Dans le plan mécanisé, il y a une personne par quart de travail qui ne fait que désinfecter les zones communes, donc trois personnes par jour qui ne font que ça.

Dans la section locale de Montréal, la direction qu'on prend c'est de faire tout en notre pouvoir pour que les gens puissent rester au travail. Nous les informons de leurs droits, dont le droit qui est fondamental au plus haut point en ce moment, le droit de refus, le droit de refuser un travail qui te met à risque. Ce droit pousse les travailleurs à s'occuper de leurs problématiques et à tenter de les régler. Face à un droit de refus, le Code canadien du travail est clair. Ils doivent enquêter, ils ne peuvent pas mettre quelqu'un d'autre à faire ce travail tant qu'il n'y a pas une enquête et qu'il n'y a pas de mesures de prises ou une résolution d'enquête qui dit que ce n'était pas fondé.

Le droit de refus va nous permettre, je pense, de travailler dans un milieu de travail qui est le plus sain possible.

On sait qu'il va y avoir plusieurs problèmes de gestion, beaucoup de colis qui s'accumulent sur les planchers, et on sait que le stock va devoir sortir. On sait ce que les employeurs font dans ces circonstances-là, quand il y a de l'argent qui dort sur le plancher, comme on dit, quand il y a un peu de panique. Ils forcent les travailleurs à travailler plus fort, à être plusieurs dans les mêmes cages, à travailler dans les mêmes camions, alors le droit de refus prend encore plus d'importance.

Nous informons les travailleurs de leurs droits, la quarantaine payée, un congé spécial, le droit de refus, le droit à l'assurance-invalidité si des maladies vous mettent à risque dans le futur de contracter le coronavirus et d'en mourir.

Nous le faisons pour pouvoir continuer à fournir le service. Ce n'est pas juste une question de solidarité syndicale mais de solidarité sociétale

(Photo : STTP)


Cet article est paru dans

Numéro 14 - 26 mars 2020

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« Nous faisons cela pour pouvoir continuer à fournir le service » - Alain Robitaille


    

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