Les commentaires inacceptables du premier ministre du Québec et du ministre du Travail


  5 000 personnes ont marché dans les rues de Trois-Rivières en solidarité avec les travailleurs d'ABI en lockout le 25 mai 2019.

S'adressant aux médias, le premier ministre du Québec François Legault a ignoré de manière méprisante la plainte formelle déposée par le Syndicat des Métallos auprès de l'OIT et a accusé une fois de plus les travailleurs d'ABI d'être trop payés. Pendant ce temps, dans ce qui semblait être une reprise du numéro du « bon flic, mauvais flic », son ministre du Travail a dit qu'il reconnaît que les travailleurs ont le droit de déposer une plainte formelle comme ils l'ont fait auprès de l'OIT mais qu'ils doivent comprendre que les propos de Legault viennent de sa préoccupation pour l'économie en tant que premier ministre de l'économie.

Selon le premier ministre Legault et son ministre du Travail, le fait que les travailleurs soient privés d'une façon de régler leur conflit avec un cartel mondial, d'une manière qui respecte leur dignité, leur bien-être et leurs droits, ne constitue pas un problème pour la société québécoise. Ce sont les gestes du cartel Alcoa et du gouvernement qui ont créé cette situation où les travailleurs ont dû porter plainte auprès d'un organisme de relations de travail des Nations unies.

Il semble que chaque fois qu'il entend les mots « travailleurs d'ABI », le premier ministre part à l'attaque contre ces « travailleurs qui gagnent 90 000 $ par année ». Ce comportement grossier jette la honte sur lui et ses ministres. Ces déclarations et ces gestes, qui nient le problème réel qui se pose dans les relations de travail et la défense des travailleurs lorsqu'ils affrontent de puissants empires privés comme Alcoa/Rio Tinto, jettent le discrédit sur le gouvernement et remettent en question son aptitude à gouverner au nom de son propre peuple.

Les travailleurs ont été choqués d'apprendre que lors de sa rencontre avec des dirigeants syndicaux à l'occasion du Premier Mai, Legault a dit que les travailleurs feraient mieux de garder des emplois à 75 000 dollars plutôt que d'en perdre à 90 000 dollars parce que ces salaires rendent les « coûts de production » non concurrentiels avec ce qu'ils sont ailleurs. Et ceci provient de la bouche de celui que le ministre du Travail appelle le premier ministre de l'économie. Ses soi-disant coûts de production ne sont rien d'autre que le point de vue égocentrique du premier ministre et des propriétaires qui demandent qu'une plus grande partie de la valeur que produisent les travailleurs soit transformée en profit d'entreprise et retirée du Québec, au détriment des travailleurs, de leurs communautés et de l'économie du Québec.

Les commentaires de Legault démontrent que sa vision des choses est celle des oligarques mondiaux qui possèdent et contrôlent l'économie et non celle de ceux qui font le travail et produisent le produit social. Sa vision d'une économie moderne est celle de l'oligarchie financière mondiale, qui ne se soucie pas du peuple et de son bien-être, des emplois et de l'environnement social et naturel mais uniquement du rendement maximum sur leur investissement. Pour contrer ce point de vue régressif des riches oligarques, il faut une réglementation, une restriction et une lutte organisée constante des travailleurs sinon ces oligarques ont le champ libre et causent d'immenses problèmes au peuple et à l'économie.

La vision de Legault s'exprime aussi à sa manière d'opposer « emplois bien payés » et « emplois pas si bien payés ». Cette position fait partie du mantra antisocial officiel d'être « ouvert aux affaires » de l'oligarchie financière dans tout le Canada. L'objectif de ce mantra est d'éviter un investissement d'affaires qui développe l'économie à l'avantage de tous d'une manière socialement responsable et d'ouvrir le pays à une exploitation de ses ressources humaines et matérielles qui se fait au détriment des intérêts et des droits de tous.

Cette façon de dresser les travailleurs d'un pays ou d'une région contre ceux d'un autre pays ou d'une autre région est maintenant chose courante parmi les cartels mondiaux qui possèdent de multiples installations de production et entreprises et une immense richesse sociale et ont leurs représentants dans les gouvernements. Ils peuvent déplacer ou menacer de déplacer leurs entreprises et leurs installations partout où cela sert leurs intérêts privés étroits. Il faut que la classe ouvrière organisée lutte sans relâche pour restreindre par une politique pratique le pouvoir de l'oligarchie financière.

L'économie dont parle Legault est le monde d'intrigues, de collusion et de rivalité des monopoles privés mondiaux qui servent leurs propres intérêts privés au détriment du peuple et de sa société. Si cette économie de l'oligarchie financière n'est pas contestée et restreinte dans ses actions, les résultats sont destructeurs et comprennent des crises récurrentes et la négation des droits de tous.

Le premier ministre Legault et son ministre du Travail visent par leurs commentaires à protéger les attaques d'Alcoa contre les travailleurs, leur communauté et la société québécoise et à rendre plus difficile aux travailleurs de défendre leurs droits. C'est le grand mérite de la section locale 9700 du Syndicat des Métallos et de ses membres de persister avec courage dans leur lutte pour leurs droits. Ils continuent de mobiliser de l'appui, y compris financier, à leur juste lutte et à envoyer des représentants rencontrer les travailleurs partout au Québec pour expliquer leur lutte et gagner la bataille devant le tribunal de l'opinion publique. Lors d'une action récente le 11 juin, les travailleurs d'ABI ont organisé une ligne de piquetage à Bécancour alors que le ministre québécois de l'économie Pierre Fitzgibbon présentait un discours devant la Chambre de commerce. Les travailleurs avaient demandé à le rencontrer pour discuter de l'impact du lockout sur les travailleurs et leur communauté et le ministre avait d'abord accepté de leur parler. Il a ensuite annulé la rencontre et plusieurs y ont vu un geste vindicatif ordonné par le gouvernement Legault en réponse à la plainte déposée par les Métallos auprès de l'OIT.

La lutte continue et les actions des travailleurs organisés d'ABI sont importantes à la fois pour leur conflit contre le cartel Alcoa/Rio Tinto et pour établir des liens de solidarité militante entre les travailleurs de tous les secteurs à la défense de leurs droits et de leur dignité.

(Photos : FO, Métallos)


Cet article est paru dans

Numéro 22 - 20 juin 2019

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