Les travailleurs de l'Ontario demandent le retrait d'un projet de loi antiouvrier

Les travailleurs de la construction
défendent leur droit de s'organiser

Sous prétexte d'ouvrir l'Ontario aux affaires et d'éliminer la bureaucratie, le gouvernement ontarien de Doug Ford a déposé le 6 décembre 2018 le projet de loi 66, la Loi de 2018 visant à rétablir la compétitivité de l'Ontario. Le projet de loi modifie 18 lois existantes et est une attaque de grande envergure contre les travailleurs et l'ensemble des Ontariens, qui affecte tous les aspects de leur vie.[1]

Un des principaux aspects du projet de loi est son attaque contre les travailleurs de la construction. L'annexe 9 modifie la Loi de 1995 sur les relations de travail de sorte que les municipalités et certains conseils locaux, conseils scolaires, hôpitaux, collèges, universités et organismes publics soient réputés être des employeurs extérieurs à l'industrie de la construction.

Cela veut dire que les syndicats qui représentent des employés de ces agences et institutions publiques, qui sont employés ou susceptibles d'être employés dans l'industrie de la construction, ne les représentent plus. Toute convention collective qui lie l'employeur et le syndicat cesse de s'appliquer dans la mesure où elle s'applique à l'industrie de la construction.

En agissant ainsi, le gouvernement se prépare à désyndiquer sur une échelle de masse les travailleurs de la construction et le travail de construction qui se fait dans les institutions publiques, et à mettre fin aux conventions collectives ayant force de loi sans le consentement ou la permission des travailleurs concernés. Il s'agit d'une attaque frontale contre les salaires et les conditions de travail des travailleurs de la construction, contre le droit de s'organiser et d'être membre d'un collectif et de travailler dans le secteur de la construction dans des conditions salubres et sécuritaires qui ont reçu l'approbation générale des travailleurs de la construction et de leurs collectifs. Et cela se passe au moment où les décès et les blessures continuent d'être en hausse dans le secteur de la construction en Ontario.

Les travailleurs de l'Ontario dénoncent cette attaque et le projet de loi 66 dans son ensemble. Des syndicats de la construction ont émis des déclarations qui condamnent cette attaque contre les travailleurs du secteur.

Qui a dit quoi

Le Conseil des charpentiers et menuisiers de l'Ontario (CDCO) écrit ce qui suit dans sa déclaration du 11 décembre 2018 :

« Le projet de loi 66 est censé être la tentative la plus récente du gouvernement de rendre l'Ontario plus concurrentielle. Il semble cependant qu'en ce qui concerne la construction, le premier ministre Doug Ford veuille le faire en s'attaquant aux travailleurs ordinaires. Certaines parties du projet de loi vont éliminer les droits de négociation dans la construction et des conventions collectives qui existent depuis longtemps entre les travailleurs de la construction et différents employeurs du secteur public comme les municipalités, les commissions scolaires, les hôpitaux, les universités et d'autres institutions similaires. Bref, la capacité des travailleurs de la construction, qui travaillent pour ce type d'employeurs, de négocier librement des négociations collectives pour leur travail de construction va être éliminée par la loi.

« Notre syndicat entretient des relations productives avec ce type d'employeurs, comme la ville de Toronto, souvent depuis des dizaines d'années et ces relations sont conçues pour que les employeurs soient satisfaits du point de vue qualité-prix et que les travailleurs gagnent décemment et honnêtement leur vie. Il semble que le premier ministre ne veuille pas maintenir ce type de relations », écrit Mike Yorke, le président et le directeur des affaires publiques du CDCO.

« Ce gouvernement s'attaque maintenant à tous les travailleurs de la construction et à leurs droits fondamentaux. Notre syndicat entend lutter pour ses membres et leurs droits par tous les moyens à sa disposition. La Cour suprême du Canada a dit clairement que le droit à la négociation collective est protégé par la Charte canadienne des droits et libertés, et si nous devons nous rendre jusqu'en Cour suprême pour que le gouvernement de Doug Ford le reconnaisse, c'est exactement ce que nous allons faire », écrit Tony Iannuzzi, le dirigeant du Conseil.

Au nom du Conseil du travail du district de Toronto et de York, auquel sont affiliés plusieurs syndicats de la construction de Toronto, son président John Cartwright a fait parvenir une lettre ouverte le 8 janvier au premier ministre de l'Ontario dans laquelle il écrit :

« Dans un des ses derniers gestes de l'année 2018, votre gouvernement conservateur a déposé un projet de loi qui propose de déchirer toutes les conventions collectives des syndicats de la construction signées avec les villes, les commissions scolaires, les universités et les hôpitaux. Il s'agit là d'une attaque frontale contre les droits des travailleurs de cette province, dont vous n'avez jamais parlé pendant la campagne électorale.

« À Toronto, cela va décimer les droits de négociation de presque tous les syndicats de métiers, qui existent souvent depuis cent ans et plus. Le fait que vous décidiez que vous possédez l'autorité de déchirer ces ententes d'un simple trait de plume est vraiment incroyable. La Cour suprême a rejeté de pareilles lois antisyndicales ces dernières années, parce que, contrairement à votre gouvernement, elle reconnaît que la Charte protège les droits fondamentaux du travail. Les droits du travail sont un aspect fondamental d'une société juste.

« La ville de Toronto possède la main-d'oeuvre de construction la plus productive d'Amérique du Nord, une main-d'oeuvre qui est le produit de plusieurs générations d'immigration et d'un engagement profond envers l'apprentissage et le perfectionnement des compétences. Les centres de formation des syndicats ont un bilan enviable en matière de diplomation à l'apprentissage et de perfectionnement des compétences, qui est un processus qui dure toute une vie. Les membres des syndicats et les entrepreneurs syndiqués contribuent financièrement pour faire en sorte que ces compétences essentielles soient transmises d'une génération à l'autre. La performance en matière de sécurité dans la construction syndiquée est très supérieure à celle du secteur non syndiqué.

« Le projet de loi comprend plusieurs autres aspects qui comprennent de graves lacunes et doivent eux aussi être retirés. Je vous demande d'abandonner totalement le projet de loi 66. »

Le Conseil des métiers du bâtiment et de la construction de l'Ontario (PBCTCO) écrit dans sa déclaration du 12 décembre :

« Les changements apportés par le projet de loi réduisent la protection pour les travailleurs et les consommateurs, mettent notre environnement en péril et affaiblissent les normes du travail », écrit Patrick Dillon, l'agent d'affaires du Conseil. « Le premier ministre Ford dit qu'il gouverne 'pour les gens ordinaires' mais les changements qui sont proposés vont bénéficier au monde des affaires de l'Ontario plutôt qu'aux Ontariens qui travaillent dur.

« Un des aspects les plus graves du projet de loi est l'intrusion massive du gouvernement dans la libre négociation collective », écrit Dillon. « L' intrusion dans la libre négociation collective est l'emblème d'un gouvernement qui manifeste une tendance autocratique claire. Ce projet de loi a été présenté sans qu'on ait consulté les travailleurs et les syndicats qui vont en subir les conséquences draconiennes. Il va sans dire que ce gouvernement n'a pas informé les électeurs de ses politiques antisyndicales pendant la campagne électorale. »

Dans une déclaration émise le 6 décembre, la Fédération des travailleurs et des travailleuses de l'Ontario (FTO) écrit :

« Le projet de loi déclare que les entités publiques comme les municipalités, les hôpitaux, les universités et les écoles sont des 'employeurs extérieurs à l'industrie de la construction ', ce qui pave la voie à ce que les secteurs non syndiqués des métiers de la construction présentent des soumissions pour les projets d'infrastructure publique et obtiennent les contrats de construction.

« Les métiers de la construction qui sont syndiqués sont des leaders en matière de santé et de sécurité. En rendant les métiers non syndiqués admissibles aux projets de construction publique, Doug Ford met la sécurité des travailleurs en péril et bafoue les conventions collectives négociées », écrit le président de la FTO, Chris Buckley. « En réduisant les normes de sécurité au profit de la grande entreprise, le gouvernement joue avec la vie des Ontariens. Lorsqu'il y a trop d'enfants dans une garderie privée, les enfants font face à des risques inutiles. Lorsqu'on rend les gardes-fous facultatifs, des travailleurs sont tués dans des accidents aux endroits de travail. Avec ce projet de loi, le gouvernement qui prétend être du côté des « gens ordinaires » place une fois de plus le tout puissant dollar au-dessus de la vie des Ontariens. »

Note 

1. Pour de plus amples informations sur le projet de loi 66, lire « Le coût humain de la campagne du gouvernement Ford contre la « paperasserie tueuse d'emplois », Pierre Chénier, dans le numéro du 26 janvier 2019 du Marxiste-Léniniste.


Cet article est paru dans

Numéro 3 - 31 janvier 2019

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Les travailleurs de l'Ontario demandent le retrait d'un projet de loi antiouvrier : Les travailleurs de la construction défendent leur droit de s'organiser


    

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