Des militants à Montréal demandent
que les gouvernements agissent sur la question du logement
À moins d’une semaine de la fin de la campagne électorale, le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) et les comités logement de sa circonscription ont bruyamment interpellé le chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, devant son bureau de campagne sur l’avenue du Parc à Montréal. Pendant ce temps le bureau du premier ministre était occupé par des gens de la circonscription déçus de l’absence d’engagements du Parti libéral pour améliorer la situation des ménages locataires ayant des besoins pressants.
Le FRAPRU explique :
Selon les organismes, les locataires de Montréal sont aux prises avec une grave crise du logement qui risque de perdurer si des mesures fortes ne sont pas mises en oeuvre rapidement. Dans Villeray et Parc-Extension, quartiers très majoritairement habités par des locataires à revenus modestes et représentés jusqu’ici par le chef libéral, la rareté de logements locatifs, la hausse rapide du prix des loyers, la spéculation immobilière et les évictions frauduleuses rendent leur situation très précaire. Plusieurs ne réussissent plus à se loger dans un secteur qu’ils habitent pourtant depuis des années. La FRAPRU rappelle que déjà, avant la pandémie et les hausses de loyer des dernières années, 16 100 ménages locataires de l’arrondissement Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension vivaient dans un logement inabordable et 6445 vivaient dans un logement de taille insuffisante. « La crise sanitaire a exposé les graves conséquences de l’insalubrité et du surpeuplement sur la santé physique et mentale des locataires dans la circonscription de monsieur Trudeau, et en particulier pour le développement des enfants et la sécurité des femmes victimes de violence. On espérait que ça mène à un plus grand intérêt de sa part, mais ce n’est pas arrivé », déplore Amy Darwish, coordonnatrice au Comité d’action de Parc-Extension (CAPE). « Nous ne pouvons pas nous contenter de demi-mesures face à l’ampleur des besoins, tant dans Parc-Extension que dans Villeray. Beaucoup plus doit être fait pour soutenir les locataires à faible revenu dans ces deux quartiers », insiste Amy Darwish.
L’Association des locataires de Villeray et le CAPE reproche au député Trudeau les mesures inadéquates que son gouvernement sortant et le Parti libéral du Canada proposent aux ménages mal-logés. « Promettre une sortie de crise par l’accession à la propriété privée, c’est un affront aux locataires qui risquent ni plus ni moins de se retrouver à la rue ! », proteste Charles Castonguay, organisateur communautaire à l’Association des locataires de Villeray. « On ne peut déjà pas se fier au marché locatif privé pour prendre soin des ménages démunis, il faut que la réponse soit politique, que l’État s’engage. Cette réponse-là, elle passe par le logement social, et on veut des engagements clairs de monsieur Trudeau en la matière », insiste-t-il.
Depuis le début de la campagne, le FRAPRU interpelle les partis voulant former le prochain gouvernement afin qu’ils prennent des engagements clairs en faveur du logement social. Or, malgré les nombreuses critiques adressées à la Stratégie nationale qu’il a mise en place, le Parti libéral n’a pas pris d’engagements clairs en ce sens.
Les groupes notent qu’une des seules mentions des problèmes rencontrés par les locataires dans la plateforme libérale concerne les rénovictions. Or, ils font valoir que les mesures permettant de s’y attaquer réellement sont de compétence provinciale. Même la promesse d’imposer une surtaxe lors d’une augmentation excessive de loyer serait difficilement réalisable sans un registre provincial des loyers permettant de vérifier la véracité des déclarations des propriétaires.
Cependant, le financement du logement social qui, lui, est une compétence partagée, serait une façon concrète pour le prochain gouvernement de lutter contre la crise du logement, rappelle le FRAPRU. « Le logement social est la seule formule qui soit abordable de façon pérenne et qui permette de diminuer significativement le nombre astronomique de ménages locataires ayant des besoins urgents », soutient Catherine Lussier, organisatrice au FRAPRU.
« Sous la gouverne des Libéraux, Ottawa a enfin reconnu le droit à un logement suffisant dans la Loi sur la Stratégie nationale sur le logement adoptée en 2019, mais les mesures proposées dans la plateforme libérale ne traduisent pas une volonté de faire réellement progresser ce droit », ajoute-t-elle.
Le FRAPRU dénonce au passage le Parti conservateur du Canada qui n’offre pas mieux aux locataires à faible et à modeste revenus. « Les propositions conservatrices promettent aussi des avantages fiscaux aux constructeurs de logements « abordables », mais sans préciser, ni les ménages, ni le coût du logement visés », indique Catherine Lussier.
Le FRAPRU et ses groupes membres montréalais demandent aux partis en lice de s’engager à investir 3 milliards $ par année, de manière récurrente, dans le financement de nouveaux logements sociaux. De tels investissements permettraient la réalisation de 7000 logements sociaux par année au Québec, ce qui a déjà été le cas par le passé. Ils contribueraient ainsi au grand chantier de 50 000 logements sociaux en 5 ans (dont 22 500 à Montréal) que le FRAPRU revendique auprès des deux paliers de gouvernement.