44e élection générale
Une élection très irresponsable
Les directeurs de scrutin sont au bout du rouleau et l’élection n’en est qu’à son dixième jour. Imaginez ceci. Pour un seul bureau de directeur du scrutin dans la région de Toronto, il faut 900 employés. Il faut embaucher plus de 250 000 travailleurs électoraux pour l’ensemble des 338 circonscriptions du pays. Ajoutez à cela le fait que la loi électorale stipule que la moitié des postes doivent rester ouverts pendant sept jours afin que les partis et les candidats qui ont participé à l’élection précédente puissent les combler avec les personnes qu’ils ont recommandées. Cela laisse moins de 30 jours pour faire les entrevues et embaucher.
N’oubliez pas qu’un grand nombre des personnes qui occupent habituellement ces postes, des personnes âgées pour la plupart, ne seront pas disponibles à cause des inquiétudes liées à la COVID. Élections Canada a proposé au comité parlementaire responsable de l’application de la loi électorale de changer le jour du scrutin, qui est d’une seule journée de 12 heures le lundi 20 septembre, pour deux journées de 8 heures le samedi et le dimanche, afin d’élargir le bassin d’employés disponibles, entre autres raisons. En outre, Élections Canada affirme que les conditions de travail d’une journée de 12 heures, avec des masques, seraient difficiles et a exprimé la crainte que certains ne quittent leur poste en pleine journée. Cette proposition a été rejetée par le comité.
De plus, pour servir leurs intérêts les libéraux ont choisi la période de la rentrée scolaire pour tenir ces élections. Les parents, les élèves et les enseignants ont déjà fort à faire avec la rentrée scolaire. Puisque l’année passée l’apprentissage s’est surtout fait en ligne et vue l’incertitude quant aux précautions à prendre cette année, tout le monde est très inquiet Ainsi, les parents et les étudiants ne sont pas non plus disponibles pour remplir les postes offerts par Élections Canada.
Mais ce n’est pas tout. Les directeurs du scrutin ont dû faire face à bien plus au cours des dix premiers jours de cette campagne irresponsable. Ils ont dû se familiariser avec le Centre de services aux entités politiques (CSEP). Il s’agit d’un système en ligne pour l’inscription des candidats qui est assez compliqué à utiliser en raison de tous les protocoles de sécurité intégrés qui doivent être respectés et qui présente encore des failles qu’Élections Canada s’efforce de corriger. Il a été utilisé pour la première fois à l’élection de 2019, mais ce n’est que maintenant, avec la pandémie de COVID, que son utilisation se généralise, ce qui implique une courbe d’apprentissage et une attention supplémentaires. Les directeurs du scrutin doivent également apprendre à organiser des réunions virtuelles avec les candidats pour minimiser les contacts physiques, le tout en devant respecter les protocoles de sécurité en ligne.
Le fait que beaucoup d’électeurs se présentent aux bureaux des directeurs de scrutin pour obtenir des bulletins de vote par la poste représente un défi supplément. Un directeur du scrutin a expliqué qu’en l’absence d’un effectif complet de personnel, il a dû accueillir jusqu’à 500 personnes venues chercher des bulletins de vote par la poste ne serait-ce que la première semaine de l’élection. Ces bulletins ne peuvent pas être simplement remis. Les informations complètes doivent être répétées à chaque demandeur afin de préserver l’intégrité du vote, puis les trousses doivent être préparées et envoyées par la poste. Bien que les électeurs puissent faire une demande en ligne pour le bulletin de vote par la poste, il est clair que beaucoup n’ont pas les moyens de le faire, soit parce qu’ils n’ont pas le savoir-faire ou la possibilité de scanner les pièces requises, soit parce qu’ils ne maîtrisent pas du tout les procédés informatiques ou n’ont pas accès à un ordinateur. Et même s’ils ont cette capacité, c’est leur droit de venir chercher en personne un bulletin de vote par la poste.
Ainsi, pour ceux d’entre vous qui êtes avec raison contrariés de voir les rencontres avec les directeurs du scrutin être sans cesse remises, imaginez la frustration des directeurs du scrutin. Cette élection en pleine pandémie de la COVID est une élection très irresponsable.