Numéro 6312 novembre 2021
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Des sujets de préoccupation en éducation
Légifération de l’offensive du gouvernement albertain contre le droit à l’enseignement postsecondaire
– Dr Dougal MacDonald –
Le gouvernement du Parti conservateur uni (PCU) de l’Alberta a déposé le projet de loi 74, Advanced Education Statutes Amendement Act (Loi modifiant les statuts et règlements en éducation), le 26 octobre 2021. Selon lui, il s’agit de modifier la Loi sur l’apprentissage postsecondaire et la Loi sur les métiers spécialisés et les stages en éducation pour mieux les accorder avec sa nouvelle « stratégie Alberta 2030 », un plan de dix ans pour l’enseignement postsecondaire annoncé par le PCU le 29 avril dernier. La loi sur les métiers déposée le 17 juin remplacera la Loi sur la formation en apprentissage et en industrie au début de 2022.
Tel qu’indiqué dans l’analyse récemment publiée dans Le Renouveau[1], la stratégie Alberta 2030 attaque ouvertement le droit à l’éducation postsecondaire. Il s’agit de répondre aux besoins d’intérêts privés étroits en main-d’oeuvre qualifiée gratuite et les modalités de ce service seront enchâssées par le projet de loi 74. Alberta 2030 n’a rien à voir avec l’éducation des jeunes pour qu’ils accèdent aux connaissances et compétences qui leur permettront de penser par eux-mêmes et de bâtir un avenir radieux pour eux et pour la société dont ils dépendent, et de contribuer aux mêmes objectifs internationalement.
Le projet de loi 74 apporte des changements fondamentaux à la Loi sur l’apprentissage postsecondaire qui régit l’éducation postsecondaire en Alberta :
– il aligne la loi la avec la « vision et la mission » d’Alberta 2030;
– il met sur pied un nouveau conseil d’administration, le Conseil consultatif des ministres sur l’éducation supérieure et les compétences, qui recommandera au ministre de l’Éducation supérieure des buts stratégiques et une direction pour l’éducation postsecondaire, des paramètres pour mesurer le rendement des établissements postsecondaires (EPS) et sur d’autres questions;
– il classe dorénavant les EPS en universités et écoles polytechniques/collèges;
– il limite le mandat des membres des conseils de gouverneurs à six années consécutives; et
– il transfert l’autorité de fixer les frais de scolarité du ministre aux conseils de gouverneurs des EPS.
Il est important de noter la création d’un super conseil d’administration, surtout s’il ressemble le moindrement au nouveau conseil d’administration de « coalition de conseillers » créé par le PCU pour diriger la mise en oeuvre d’Alberta 2030. La création du super conseil d’administration de coalition de conseillers montre clairement que le principal objectif d’Alberta 2030 est de fournir gratuitement de la main-d’oeuvre spécialisée à des intérêts privés étroits. On y retrouve des dignes représentants tels que l’ancien chef de cabinet de Stephen Harper, l’ancien PDG de l’Association canadienne des producteurs pétroliers, un député du PCU, le président du Business Council of Alberta et un membre de l’archi-réactionnaire Institut Macdonald-Laurier. En quoi ces personnes sont-elles qualifiées pour faire autre chose que servir les intérêts de l’industrie privée ?
Un autre aspect à bien noter est cette remise de l’autorité de fixer les frais de scolarité aux ISP. Alberta 2030 révèle que le plan à long terme est de permettre aux ISP de s’autofinancer autant que possible et de réduire encore davantage le soutien financier du gouvernement. Un des principaux moyens pour y parvenir est de se vendre à des donateurs privés. Un autre moyen est de « filiariser » les EPS en entreprises commerciales. Le troisième est d’augmenter les frais de scolarité le plus possible et sans pitié. En avril, le conseil d’administration de l’Université de l’Alberta a approuvé une hausse importante qui, dans sa forme la plus extrême, augmentera les frais de scolarité de 104 %. Ces hausses ont été condamnées par l’Union des étudiants et l’Association des étudiants diplômés de l’université.
Le projet de loi 74 apporte également quelques changements à la récente loi sur l’enseignement des métiers, mais il est surtout important de noter comment cette nouvelle loi diffère dans son ensemble de la loi précédente.
La nouvelle loi sur les métiers :
– étend l’apprentissage à un plus grand nombre de professions;
– réduit le cadre réglementaire;
– établit le Conseil des métiers spécialisés;
– élargit les possibilités de poursuivre des études ou de changer son tracé de carrière.
Il est important de noter que lorsque l’actuel premier ministre de l’Alberta Jason Kenney était le ministre de l’Emploi et du Développement social dans le gouvernement de Stephen Harper au fédéral, c’est lui qui a piloté la mise en oeuvre du Programme des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral) (PTMS) de 2013, qui visait les personnes désireuses de devenir des résidents permanents en raison de leurs compétences dans un métier spécialisé. À l’époque, Jason Kenney avait spécifiquement mis l’accent sur l’importance de combler les pénuries de travailleurs qualifiés dans l’industrie des sables bitumineux. En d’autres termes, le PTMS visait à répondre aux besoins des monopoles en main-d’oeuvre supplémentaire.
Il est raisonnable de croire que toute loi sur les métiers spécialisés provenant du PCU aura le même objectif général que le PTMS, c’est-à-dire répondre aux besoins des monopoles en matière de main-d’oeuvre qualifiée. La principale différence entre l’ancienne et la nouvelle loi sur les métiers est que celle-ci élargit et simplifie le processus d’apprentissage précisément à la lumière de ces besoins. D’ailleurs, c’est le nouveau Conseil des métiers spécialisés qui supervisera le tout afin de s’assurer que les services d’apprentissage élargis sont fournis aux monopoles rapidement, efficacement et tel que requis.
Note
1. Pour une analyse approfondie de la stratégie Alberta 2030, voir « Les conclusions des consultations gouvernementales bidon », Le Renouveau, 6 octobre 2021.
Plein appui aux fermiers indiens!
Les fermiers indiens soulignent le premier anniversaire de leurs campements à la frontière de Delhi
– J. Singh –
Pour souligner le premier anniversaire des campements entourant Delhi, l’organisation qui chapeaute la lutte des fermiers, Sanyukta Kisan Morcha, a décidé d’envoyer des groupes de 500 fermiers au parlement indien à chaque jour, à partir du 29 novembre. Le 26 novembre, des rassemblements de masse auront lieu pour souligner l’anniversaire de l’arrivée des fermiers aux frontières de Delhi, après avoir brisé les barricades policières à Haryana et Uttar Pradesh.
Un mahapanchayat (réunion de masse) des fermiers a été organisé par les jeunes à Kala Sanghian, dans le district de Kapurthala, au Pendjab, le 6 novembre. Des milliers de fermiers sont venus parler sans peur de leur détermination à continuer de lutter jusqu’à ce que les lois anti-fermiers soient abrogées. Un jeune fermier a souligné que les derniers sondages montrent que le BJP a subi des revers dans 13 États par ce que le mouvement des fermiers est devenu un mouvement populaire partout en Inde. Un autre fermier qui arrivait de Kerala où les gens organisent des rassemblements en appui aux fermiers. Il a dit qu’à Kerala, les petits cultivateurs de thé sont tous partis ; les grands monopoles ont pris le contrôle de leurs terres. Adani y construit présentement un énorme port, mettant fin aux activités des petits pêcheurs. En raison de la structure et des lois, le gouvernement de Kerala n’a pas le pouvoir d’agir sur ces questions. Kerala est un gouvernement de gauche mais n’est pas en mesure de défendre les droits du peuple. Nous devons trouver des solutions à ce problème, a dit le fermier. Peu importe le parti au pouvoir, il ne défend pas et ne peut pas défendre les intérêts du peuple.
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Le 6 novembre, les fermiers aux morchas (les campements de protestation) autour de Delhi ont célébré le 35e anniversaire du décès du poète pendjabi Sant Ram Udasi. Ses poèmes et chansons révolutionnaires sont devenus des chansons reprises par les travailleurs et les jeunes dans les années 1970 et 1980. Ses chansons ont inspiré tout une génération, donnant courage à tous ceux et celles qui luttent pour une vie de dignité et de justice.
L’une de ses chansons a été d’une grande inspiration pour les fermiers, les travailleurs, les étudiants, les femmes, les Dalits et tous les opprimés :
Camarades des récoltes de l’automne et de l’été, aiguisez vos serpes,
levez vos marteaux, des rocs martelés jaillissent les flammes, et nous avons soif d’étincelles.
Il était d’origine Dalit et sa poésie dénonçait toutes les indignités dont étaient accablés les Dalits. Il a été torturé par les agences de police qui tentaient de le réduire au silence mais ils ne pouvaient pas éteindre son ardeur.
À Tripura, les musulmans sont présentement attaqués par des fiers-à-bras organisés par des complices du BJP, sous l’oeil bienveillant des agences de l’État et du gouvernement central. Des accusations en vertu de la Loi sur les activités illégales (Prévention), 1967 (UAPA) ont été portées contre plus de 100 personnes, dont deux avocats de la Cour suprême de l’Inde, qui étaient membres d’un comité d’enquête.
À Gauhati, dans la région d’Assam, les sikhs sont évincés de leurs terres par l’État, eux qui y sont établis depuis très longtemps. Cela fait partie de la stratégie de l’élite dirigeante de provoquer des carnages en incitant la haine et la violence basées sur la religion.
Le 7 novembre, dans la ville de Yuba, en Californie, des milliers de gens se sont rassemblés pour appuyer les fermiers indiens. Ils ont condamné l’État indien, ses attaques contre les fermiers et ses tentatives de scinder l’unité du peuple en l’attaquant sur une base religieuse. Des chanteurs, jeunes, femmes, fermiers et conseillers municipaux ont condamné le gouvernement indien pour ses lois anti-fermiers.
Le 7 novembre était aussi le 104e anniversaire de la Révolution bolchévique en Russie. Elle a ouvert une nouvelle voie et établi le premier État des ouvriers, des fermiers et des autres travailleurs. Pour la première fois, elle garantissait le suffrage universel, l’éducation gratuite et les soins de santé gratuits et créait les conditions pour que les travailleurs puissent entreprendre de nouveaux exploits. Plusieurs révolutionnaires, fermiers et travailleurs se sont rendus dans ce nouvel État et ont vu de leurs yeux ce que les travailleurs y réalisaient. Le parti Ghadar y a envoyé des délégations pour rencontrer le dirigeant de cette révolution, V.I. Lénine et d’autres. Les leçons de la Grande Révolution socialiste d’Octobre et du démantèlement du premier État des travailleurs par la contre-révolution continuent d’inspirer les peuples partout dans le monde à élaborer leur propre stratégie pour le renouveau et la rénovation.
Le 7 novembre était aussi le 159e anniversaire du décès de Bahadur Shah Zafar, qui est devenu le dirigeant de la grande révolte de 1857, nommée la Première Guerre d’indépendance de l’Inde. Bahadur Shah Zafar avait 81 ans lorsque la révolte a éclaté. Il était un grand poète et sa plume servait la cause du peuple et il était le rédacteur du journal Payam E Azadi. Les Britanniques considéraient que ce journal était si dangereux que le simple fait d’en avoir un en sa possession était jugé un crime passible d’une condamnation à mort. Les Britanniques ont décapité tous ses fils. Ils lui ont offert la tête de deux de ses fils sur un plateau pour le punir de ses oeuvres. Ses couplets appelant à la révolte résonnent toujours dans les rues de Delhi. Il a été exilé à Burma et est mort à Rangoon le 7 novembre 1862. Dans un de ses poèmes, il disait :
Encore un assaut contre Delhi, oh ! Travailleurs de l’Inde
Pour anéantir les citadelles de l’oppression et de l’exploitation
Les ruelles, les rues et les quartiers retentissent de l’appel de Zafar.
(Photos : Kisan Ekta Morcha, Humanity First, N. Singh, S. Bal)
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