
Numéro 6211 novembre 2021
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Jour du Souvenir
Anniversaire de l’Armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale
– Nick Lin –
Le 11 novembre 1918 était signé l’armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale. Une boucherie et un massacre sans précédent, cette guerre a été appelée « la guerre pour mettre fin à toutes les guerres ». Pourtant, il est bien connu que le traité de paix signé par la suite à Versailles a pavé la voie à la montée du fascisme et à la Deuxième Guerre mondiale.
La Première Guerre mondiale a été une guerre inter-impérialiste, une guerre dans laquelle les ouvriers ont été envoyés au massacre pendant que les empires s’affrontaient pour le repartage le monde. La Première Guerre mondiale a fait 9 millions de morts et 21 millions de blessés. À cela il faut ajouter au moins cinq millions de civils morts de maladie, de famine ou de froid.
La guerre a également marqué un tournant dans l’histoire. En 1917, la classe ouvrière et le peuple de Russie ont accompli la Grande Révolution socialiste d’Octobre et ont sorti la Russie de la guerre. Quand le pouvoir soviétique a été instauré, Winston Churchill a appelé à « étrangler l’enfant dans son berceau ». Puis, immédiatement après la guerre, quatorze puissances étrangères, dont le Canada, sont intervenues militairement pour fomenter la guerre civile, s’emparer des avoirs de la Russie et mettre fin à la révolution et au pouvoir soviétique, mais elles ont été vaincues. Loin d’être écrasée, la Grande Révolution socialiste d’Octobre a conduit au progrès de la société, à son développement vigoureux et à la libération sans précédent de l’initiative humaine. La Première Guerre mondiale a été suivie de profonds changements politiques, culturels, économiques et sociaux en Europe, en Asie et en Afrique, et également dans des régions qui n’avaient pas été directement touchées par la guerre. Quatre empires se sont effondrés à cause de la guerre — l’empire tsariste russe, l’empire ottoman, l’empire allemand et l’empire austro-hongrois. De vieux pays ont disparu, de nouveaux ont été créés et les frontières ont été redessinées. Des organisations internationales, comme la Société des Nations, ont été créées.
Après la Révolution d’Octobre, la Russie soviétique a annulé tous les traités internationaux injustes auxquels elle était liée. En plus de nombreuses autres réalisations, elle s’est industrialisée à un rythme sans précédent, un phénomène inconnu jusqu’à cette époque. Elle donnait l’exemple d’une marche triomphante. Quel que soit l’ennemi qu’elle a dû affronter, elle a triomphé.
Les idéaux élevés d’une « guerre pour mettre fin à toutes les guerres », de remplir son devoir pour la Patrie, pour le Roi et l’empire, se révélèrent être un couvert, une fausse justification, pour le terrible affrontement entre fauteurs de guerre impérialistes. Pourtant, ces mêmes valeurs sont promues actuellement avec la devise « Nous nous souviendrons d’eux ». Les morts sont les glorieux, car ils ont consenti le sacrifice suprême pour la liberté contre un ennemi odieux.
Manifestation contre la conscription au square Victoria à Montréal le 17 mai 1917. Le gouvernement canadien, incapable d’offrir un argument convaincant pour amener les travailleurs à sacrifier leur vie pour l’empire britannique, a imposé la conscription en août 1917.
L’historiographie de la classe dominante dit que la Première Guerre mondiale a « marqué l’entrée du Canada sur la place des nations », digne de faire partie des grandes puissances en raison du rôle qu’il a joué. Le sacrifice des jeunes Canadiens jetés comme chair à canon dans les tranchées de l’Europe aurait montré que le Canada était en mesure de conduire sa propre politique étrangère et de couper les liens dans ce domaine avec le Parlement impérial britannique. Cette désinformation sert à inculquer aux Canadiens une vision chauvine selon laquelle le Canada était une grande puissance de l’Entente, digne d’être à la table des puissants pour le partage du butin de la guerre. En fait, cette participation a fait du Canada un béni-oui-oui au service des ententes entre la Grande-Bretagne et la France pour exclure l’Allemagne et du soutien à toutes les nouvelles organisations hostiles à la Russie soviétique
Aujourd’hui, le bellicisme du Canada est présenté comme une valeur canadienne fondamentale. Mais le sacrifice des Canadiens contredit l’histoire officielle. Il n’a pas été fait pour la liberté mais au nom de l’empire. L’indépendance du Canada n’a pas été réalisée par l’envoi des jeunes Canadiens à la boucherie et au massacre impérialiste qu’a été la Première Guerre mondiale, une guerre pour le repartage du monde entre les empires de l’époque pour accaparer les sources de matières premières, la main-d’oeuvre à bon marché et les zones pour l’exportation de capital et pour acquérir une influence stratégique. Les élites dirigeantes du Canada se sont taillé une place comme serviteurs d’abord des impérialistes britanniques puis des impérialistes américains, tandis que persiste parmi le peuple un mouvement pour un véritable projet d’édification nationale dans lequel les ressources naturelles et humaines et le pouvoir décisionnel sont au service du peuple et non des riches.
Aujourd’hui, plus de 100 ans après la fin de la Première Guerre mondiale, le Canada a été intégré à la machine de guerre impérialiste des États-Unis, tandis que les États-Unis, l’OTAN et leurs alliés étendent leur ingérence et leur agression, et menacent de faire la guerre à des pays qui ne se soumettent pas à leur diktat. En même temps, le gouvernement canadien, au service de cet ordre du jour, prépare le terrain pour utiliser ses pouvoirs de police afin de déclarer l’opposition à la guerre et aux alliances agressives comme l’OTAN comme étant une menace à la sécurité nationale.
Aujourd’hui, plus que jamais, les Canadiens et les Québécois doivent défendre leurs convictions contre l’agression impérialiste et la guerre et entreprendre le travail pour faire du Canada une zone de paix.
Se souvenir de la guerre contre l’Afghanistan
– Le balado Education Is a Right –
Des jeunes de Windsor au devant à la marche dud 19 mars 2005 contre la participation du Canada à l’agression menée par les États-Unis en Afghanistan.
Ce qui suit est une transcription et traduction de l’épisode 116 du balado Education Is a Right (L’éducation est un droit) à l’occasion du jour du Souvenir.
Cet épisode du Balado Education Is a Right est dédié à l’apprentissage de la jeune génération sur la participation du Canada à la guerre en Afghanistan et à la mémoire de tous celles et ceux qui ont été tués et sacrifiés dans le cadre de la guerre contre le terrorisme menée par les États-Unis. Nous sommes d’avis que la meilleure façon d’honorer les soldats et les autres personnes qui ont perdu la vie est de s’assurer que les mots « Plus jamais » signifient qu’il n’y aura plus de guerres d’agression et d’occupation.
Le jour du Souvenir est une occasion importante de renforcer l’aspiration des jeunes à la paix mondiale et de se souvenir de tous ceux qui ont perdu la vie ou qui ont donné leur vie pour la cause de la paix. La « paix par le souvenir » est depuis longtemps le slogan de la Légion canadienne, tel qu’inscrit sur ses boîtes de coquelicots. Les anciens combattants sont souvent les premiers à s’opposer à la guerre, car ils ont vu de première main ce qu’elle fait aux soldats, aux femmes, aux enfants et à la société dans son ensemble. Souvent, ceux qui ont le plus souffert des guerres n’en parlent pas, à cause du traumatisme, et nous n’avons pas souvent l’occasion d’entendre leurs récits.
Cette année, le jour du Souvenir s’inscrit dans le contexte de l’échec total de l’invasion et de l’occupation de l’Afghanistan par les États-Unis, ainsi que des nouvelles menaces de guerre — économiques, cybernétiques et militaires — des États-Unis et de leurs alliés tels que le Canada contre la Chine. La question de la paix n’est donc pas une affaire du passé, c’est une affaire du présent. En ce jour du Souvenir, nous, à Education is a Right, pensons qu’il est important de rappeler la vérité sur la guerre en Afghanistan en particulier, afin que les jeunes sachent ce qui s’est passé et puissent tirer leurs propres conclusions. Les jeunes d’aujourd’hui n’étaient même pas nés quand cette guerre a commencé. Connaître la vérité est donc quelque chose d’essentiel.
Les affirmations selon lesquelles toutes les guerres dans lesquelles le Canada s’est engagé ou s’engagera sont pour la liberté ou pour d’autres causes justes ne sont pas acceptables étant donné que dans la plupart des cas, comme dans le cas de l’Afghanistan, le Canada n’a pas le choix, même si le gouvernement pourrait en faire valoir un. En vertu de son appartenance à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), le Canada est amené à participer aux guerres d’agression que les États-Unis décident de lancer.
C’est ce qui s’est passé en Afghanistan. À la suite des attentats terroristes criminels du 11 septembre 2001 contre les États-Unis, dans laquelle quelque 3 000 personnes ont perdu la vie, la plupart dans les tours jumelles du New York Trade Centre, une guerre internationale de terreur a été déclenchée par les États-Unis. Le président de l’époque, George W. Bush, a déclaré que c’était une « guerre contre le terrorisme ». Les États-Unis ont déclaré être sous attaque et ont rapidement lancé leur invasion de l’Afghanistan de manière unilatérale. Puis l’OTAN a invoqué la disposition de défense collective de son traité (article 5) qui exige de tous ses membres qu’ils se portent à la défense de tout membre qui est attaqué.
En réalité, les États-Unis avaient été attaqués par une bande de terroristes qui, selon eux, faisaient partie d’Al-Qaïda, un groupe disparate dirigé à l’époque par Oussama Ben Laden. Ben Laden avait été un atout de la CIA dans les années 1980, lorsque les milices afghanes soutenues par les États-Unis combattaient les Russes en Afghanistan. Après la défaite et le départ des Russes, Ben Laden s’est retourné contre les États-Unis. Après les attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis ont demandé à l’Afghanistan de leur livrer Ben Laden, affirmant que c’est lui qui avait été le maître d’oeuvre de ces attentats. Le gouvernement afghan a demandé des preuves de la responsabilité de Ben Laden, mais les États-Unis ont refusé d’en donner et ont tout de suite conclu que l’Afghanistan ne voulait pas leur livrer Ben Laden, qu’il abritait donc des terroristes et que, par conséquent, ils étaient en droit d’envahir le pays, de renverser son gouvernement et de mobiliser le Canada et d’autres alliés de l’OTAN pour ce faire. Les premières troupes du Canada étaient des forces spéciales qui étaient sur le terrain moins d’un mois après les attentats du 11 septembre.
Les premiers Canadiens décédés en Afghanistan sont au nombre des soldats étrangers qu’on dit avoir été tués par des « tirs amis » : ils sont morts dans des frappes ordonnées par un pilote de chasse américain qui les aurait pris pour des combattants talibans. De nombreux autres soldats canadiens et beaucoup de civils ont été tués en Afghanistan à mesure que la guerre menée par les États-Unis s’intensifiait. Il y a eu de nombreux suicides de soldats et d’autres personnes incapables de composer avec leur expérience en Afghanistan ; d’autres ont été marqués physiquement et émotionnellement pour la vie et les familles en ont souffert également.
Au nom de la lutte contre le terrorisme, un tout nouveau régime de sécurité nationale a été instauré, tant aux États-Unis qu’au Canada, avec de toutes nouvelles agences aux commandes dotées de nouveaux pouvoirs leur permettant de violer les droits au nom de la sécurité. Aux États-Unis, le département de la Sécurité intérieure a été créé. Au Canada, c’est la Sécurité publique et l’Agence des services frontaliers du Canada. Un nouveau régime de détention indéfinie et de détention sur la base de soupçons a été instauré, connu sous le nom de certificats de sécurité, en vertu duquel des personnes qui ne sont pas des citoyens canadiens peuvent être détenues pendant de longues périodes sans preuve ou sur la base de preuves secrètes. Ces certificats sont toujours en vigueur. Des Canadiens ont également fait l’objet de « restitutions extraordinaires » (c’est-à-dire qu’ils ont été enlevés et envoyés par avion) dans des lieux secrets sous contrôle américain, comme Guantanamo Bay, où ils ont été torturés et ont été victimes d’autres crimes sans avoir droit à procédure régulière. Tout cela était censé être justifié par de nouvelles règles de sécurité. Toute l’idée que notre sécurité vient du fait que nous avons des droits a été renversée : dorénavant, la sécurité voulait dire que vous n’avez pas de droit, une notion pour le moins médiévale.
Une atmosphère générale a été créée où toute opposition à la guerre est de facto considérée comme un soutien au terrorisme. L’islamophobie est devenue une politique d’État officielle au Canada et aux États-Unis : les musulmans devaient montrer qu’ils sont de « bons » musulmans en dénonçant le terrorisme, tandis que la campagne de terreur des États-Unis devait être acceptée comme un mal nécessaire, voire applaudie. George W. Bush a déclaré : « Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes avec les terroristes », ce qui signifie que si vous vous opposez à la terreur américaine, à l’étranger ou dans votre pays, vous êtes avec les terroristes et vous pouvez vous attendre à être menacé. Les frontières ont été militarisées. Des villes entières ont été militarisées lors de grandes réunions et manifestations internationales, le tout sous le couvert de la lutte contre le terrorisme. Il s’ensuit toutes sortes de violations des droits des Canadiens, surtout aux frontières pour ceux qui sont de confession islamique ou qui proviennent de pays ciblés par les États-Unis parce que faisant partie d’un « axe du mal ».
Dès le début, les Canadiens se sont opposés à la guerre et aux mesures de sécurité draconiennes. Des rassemblements et des manifestations ont lieu dans tout le pays. Les jeunes, les retraités, les travailleurs et leurs syndicats ont tous pris des positions courageuses pour dire non quand c’était important de le faire. Même au Parlement, le NPD dirigé par Jack Layton s’est opposé à ce que le Canada envoie des troupes en Afghanistan et prolonge les missions subséquentes, bien qu’il n’en parle pas aujourd’hui parce qu’il se bat pour le pouvoir. Le gouvernement libéral de Jean Chrétien s’était déjà engagé dans la guerre, mais il a tenu quelques débats « exploratoires » au Parlement après coup, sans qu’aucun vote ne soit demandé. Le premier véritable vote a eu lieu en 2006 sous les conservateurs, lorsque Stephen Harper était premier ministre, et c’était pour prolonger la mission du Canada jusqu’en 2009. La motion a été adoptée par une faible marge avec le soutien d’une partie du caucus libéral.
Face à l’opposition populaire et devant l’illégalité de l’invasion et de l’occupation d’un autre pays en violation de la Charte des Nations unies, qui l’interdit à moins que votre pays ne soit attaqué par un autre État, le Canada a été parmi les premiers à prétendre qu’il ne s’agissait pas d’une guerre d’agression, qu’il s’agissait en fait d’une guerre pour libérer les Afghans, leurs enfants et surtout les femmes et les filles, qui vivaient dans des conditions brutales, lesquelles conditions sont encore pires 20 ans plus tard. En fait, le but était de justifier après coup ce que les États-Unis avaient déjà décidé de faire. Il s’agissait aussi de trouver une justification pour la mobilisation de l’OTAN, à savoir que c’était une guerre pour arrêter le terrorisme. C’était la justification pour le début d’une nouvelle série de campagnes pour le changement de régime dans différents pays du monde entier. Moins de deux ans après avoir envahi l’Afghanistan, les États-Unis ont lancé leur troisième invasion de l’Irak en un peu plus d’une décennie, en se fondant sur des mensonges concernant la présence d’armes de destruction massive dans ce pays. Plus tard, ils prétendront que cette guerre avait pour but de libérer les Irakiens de l’emprise d’un dictateur. Le Canada ne s’est pas officiellement joint à la guerre en Irak, mais c’était pour cacher qu’il a soutenu publiquement les objectifs de la guerre et a ensuite fourni un soutien sous forme de ravitaillement et de ciblage pour les avions de guerre américains et de formation de la police irakienne.
Ces guerres d’agression ont engendré l’anarchie totale, le chaos et la violence en Asie occidentale et centrale, causant des morts et des destructions massives. Elles ont également été le précurseur d’autres invasions des États-Unis et de l’OTAN pour imposer violemment des changements de régime, comme en Haïti en 2004 et en Libye en 2011, pour ne citer que ces deux exemples. Cela s’est ensuite transformé en une guerre orchestrée par les États-Unis contre la Syrie, présentée comme une guerre civile, entraînant le Canada encore plus dans la machine de guerre américaine et ses guerres de conquête au nom de la lutte contre les terroristes de l’État islamique et d’autres idéaux pompeux.
Il est donc essentiel aujourd’hui, en ce jour du Souvenir, de ne pas accepter la pression exercée par le gouvernement, son ministère des Anciens Combattants et l’armée, qui disent que tout le monde doit simplement soutenir les troupes et honorer les anciens combattants. Nous ne pouvons pas permettre que l’on blanchisse l’histoire en prétendant que toutes les guerres auxquelles le Canada a participé avaient pour but de défendre des idéaux élevés comme la « liberté ». Sinon, nous risquons de répéter les erreurs du passé et d’ouvrir la voie à un avenir rempli de guerres et d’agressions, le tout en violation de la Charte des Nations unies. Comme nous pouvons le constater en Afghanistan, tout cela ne fait qu’empirer les choses pour ceux au nom de qui ces guerres sont menées.
Le recours à la force dans le règlement des différends dans les affaires internationales n’est pas acceptable ; c’est la pire forme d’intimidation et d’agression. C’est pourquoi la Charte des Nations unies, adoptée par les nations du monde à la suite de deux terribles guerres mondiales, interdit expressément la guerre comme instrument de politique étrangère. Comment quelque chose qui viole les règles établies à la suite de ces guerres mondiales meurtrières peut-il être considéré comme juste, légal ou digne d’être honoré ? C’est une question légitime qui ne peut être écartée par des appels au patriotisme.
Nous vous encourageons à profiter de ce jour du Souvenir pour encourager les jeunes à s’informer sur le passé plus récent, comme la guerre en Afghanistan, d’une manière à contribuer à la paix et non à la dissimulation de l’histoire au nom de l’honneur ou de la bravoure.
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