
Numéro 5529 octobre 2021
|
Le Canada participe à une rafale de réunions internationales
Les ministres de la Défense de l’OTAN adoptent un « plan directeur» pour la guerre contre la Russie
Les 21 et 22 octobre, les ministres de la Défense des 30 pays de l’OTAN se sont réunis en personne à Bruxelles. L’humiliante défaite des États-Unis et de l’OTAN en Afghanistan n’a pas amené ces pays à la conclusion que les conflits ne peuvent pas être réglés par des invasions. Bien au contraire, l’OTAN s’est maintenant donnée de ce qu’elle appelle un nouveau « plan directeur » pour se préparer à une guerre avec la Russie. Il y a également des indications qu’elle va maintenant redoubler d’effort pour imposer aux autres la démocratie de style américain en disant que tous ceux qui ne se soumettent pas au soi-disant « ordre international fondé sur des règles » y sera forcé par la violence. Ce sera d’ailleurs le principal point à l’ordre du jour du prochain sommet des dirigeants de l’OTAN prévu en juin 2022 à Madrid.
Sous prétexte que la politique étrangère est la prérogative du pouvoir exécutif (les ministères) et qu’elle concerne la sécurité, ce plan n’est pas soumis à la discussion au sein du corps politique des pays concernés, pour faire approuver la direction dans laquelle les gouvernements mènent ces pays. Les élites dirigeantes ont transformé les affaires étrangères en un secret d’État tandis qu’elles alimentent l’industrie de guerre en intensifiant les préparatifs de guerres encore plus ravageuses et désastreuses.
Le « plan directeur » est basé sur l’affirmation que « l’agression russe est à la hausse », pour citer l’actuelle ministre allemande de la Défense. En fait, les 61,7 milliards de dollars de dépenses militaires de la Russie en 2021 représentent moins d’un dixième du budget militaire américain de 738 milliards de dollars et font pâle figure en comparaison des 1 174 240 millions dollars US de dépenses militaires combinées des pays membres de l’OTAN.
Les détails du nouveau « plan directeur » approuvé par les ministres de la Défense sont « confidentiels », mais ce dernier est décrit comme « un plan visant à contrer toute potentielle offensive russe multifrontale (dans les régions de la Baltique et de la mer Noire), qu’il s’agisse d’armes nucléaires, de cyberguerre ou d’armement spatial ». Le plan directeur prévoit des améliorations significatives de la défense aérienne et antimissile, le renforcement des capacités conventionnelles avec des avions à réaction de cinquième génération, l’adaptation des exercices et du renseignement et l’amélioration de l’état de préparation et de l’efficacité de la dissuasion nucléaire.
Le secrétaire général de l’OTAN, Jen Stoltenberg, est devenu expert à soulever l’hystérie sur l’imminence d’une attaque de la Russie contre l’Europe.
Stoltenberg décrit ce qui se passe comme « une transformation de l’OTAN ». « Nous avons triplé la taille de la Force de réaction de l’OTAN », a-t-il dit, notant qu’elle dispose désormais de « plus de 40 000 soldats » et que « nous avons des groupements tactiques dans les pays baltes ». Parmi ceux-ci, le groupement tactique multinational de la présence avancée de l’OTAN en Lettonie est dirigé par le Canada, sous le commandement américain, bien entendu.
Le secrétaire général a déclaré : « Nous avons convenu de fournir des forces plus nombreuses et mieux préparées. Nous avons convenu de disposer de forces plus lourdes, dotées de capacités plus élevées, de forces technologiquement avancées et de forces qui doivent exploiter pleinement les technologies émergentes et perturbatrices pour s’assurer que nous maintenons notre avance technologique. »
Les représentants américains ont déclaré que le « plan directeur » permet à l’OTAN « de décider de quelles armes supplémentaires elle a besoin et de la manière de positionner ses forces ».
Les trente ministres de la Défense se sont engagés à créer un fonds d’un milliard de dollars pour amorcer le développement de nouvelles technologies numériques.
L’OTAN a également annoncé que 15 pays membres ont conclu un accord de coopération multinationale pour le développement, l’achat et la livraison de systèmes de défense aérienne basés au sol afin de protéger les bases, les installations et le personnel de l’OTAN contre les menaces aériennes. Il s’agit de l’un des accords conclus par les ministres de la Défense en marge de la réunion de la fin de semaine.
Un autre accord a été conclu « par au moins dix alliés de l’OTAN » pour développer, produire et acquérir des équipements de protection individuelle et des systèmes de protection collective « afin de doter leurs forces d’un équipement de protection standardisé et à la pointe de la technologie qui soit économique ». Les dix pays sont l’Albanie, la Belgique, les États-Unis, l’Espagne, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la Lettonie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
Les ministres de la Défense de l’OTAN font l’éloge de l’invasion et de l’occupation de l’Afghanistan pendant vingt ans
Les ministres de la Défense de l’OTAN réunis à Bruxelles ont refusé de discuter de la défaite humiliante des États-Unis en Afghanistan et de la façon dont les États-Unis ont abandonné même tous les membres de l’OTAN alors qu’ils s’empressaient de sauver leur peau et de se retirer, se livrant au passage à une frénésie de meurtres de leurs propres supporters.
« Notre mission n’a pas été vaine, ont-ils convenu. Nous avons empêché l’Afghanistan de devenir un refuge pour les terroristes internationaux et empêché une attaque contre un allié de l’OTAN pendant vingt ans. » Il n’a jamais été prouvé que l’attentat contre les tours jumelles et le Pentagone le 11 septembre 2001 avait été perpétré par l’Afghanistan. Néanmoins, le secrétaire général de l’OTAN, M. Stoltenberg, a déclaré que les vingt années de guerre de l’OTAN contre l’Afghanistan ont été un succès car elles ont permis d’empêcher les talibans de lancer de nouvelles attaques terroristes contre les États-Unis ou tout autre État membre de l’OTAN.
« Nous allons rester vigilants et préserver ces acquis », a déclaré Jen Stoltenberg. Il n’a pas précisé quels gains exactement auraient justifié autant de morts et de crimes par les forces des États-Unis et de l’OTAN.
La contribution du Canada
à la «réussite durable» de l’OTAN
Le ministère de la Défense nationale brosse un portrait à l’eau de rose du rôle qu’a joué le Canada à la réunion des ministres de la Défense de l’OTAN. Selon le communiqué du ministère, le ministre de la Défense nationale Harjit Sajjan a réaffirmé l’engagement du Canada à renforcer la « posture de dissuasion et de défense » de l’OTAN; approuvé des initiatives essentielles destinées à assurer la réussite de l’Alliance au cours des dix prochaines années; soulevé la question de l’opération ALLIED SOLACE, la mission de l’OTAN visant à évacuer des entrepreneurs afghans affiliés à l’OTAN et les membres de leur famille immédiate; tenu une réunion des ministres de la Défense des pays alliés contribuant à la présence avancée renforcée de l’OTAN en Lettonie; et rencontré des partenaires clés pour faire progresser la collaboration et la coordination avec l’OTAN en vue de répondre aux principaux enjeux géostratégiques.
Autrement dit, le Canada a appuyé le « plan directeur » de l’OTAN pour une guerre avec la Russie; a réaffirmé l’engagement du Canada envers le déploiement de troupes et le commandement des forces de l’OTAN en Lettonie sur la frontière avec la Russie; a tout fait pour dissimuler la violation du droit international par l’OTAN et les crimes commis contre l’Afghanistan et le peuple afghan; s’est engagé conjointement avec d’autres pays membres de l’OTAN à discuter de missions de l’OTAN en Irak et ailleurs. Pour le reste, personne ne le sait, puisqu’au nom de la sécurité tout est confidentiel.
Pour le Canada, la diversion et la dissimulation ont été les moyens choisis pour détourner l’attention du fait que l’OTAN est une alliance belliciste qui doit être démantelée pour que la demande des Canadiens et des peuples du monde qu’on interdise le recours à la force dans le règlement des conflits puisse se concrétiser. Le Canada était représenté par Harjit Sajjan qui était toujours ministre de la Défense au moment de la réunion. En aucun temps Sajjan a-t-il assumé la responsabilité des désastres que les États-Unis et l’OTAN ont engendrés en Afghanistan. Il a annoncé que « le Canada réinstallera jusqu’à 322 Afghans supplémentaires affiliés à l’OTAN ainsi que les membres de leur famille immédiate » au Canada. Le nombre d’Afghans affiliés à l’OTAN que le Canada s’est engagé à accueillir au Canada est donc de 472.
Dans les derniers jours de l’occupation de l’Afghanistan sous commandement américain, les pays de l’OTAN ont évacué près de 120 000 personnes, y compris 2 000 qui étaient directement « affiliées à l’OTAN ». Les personnes évacuées par avion ont été amenées vers des « stations de triage » dans des bases militaires américaines ou de l’OTAN au Qatar, en Allemagne et en Espagne, ainsi qu’au Koweït, en Italie, en Albanie, au Kosovo, en Macédoine du Nord et aussi loin qu’en Colombie, en Équateur, au Cambodge et en Ouganda.
Des dizaines de milliers d’autres auraient quitté le pays pour aller dans des pays avoisinants durant ces derniers jours, s’ajoutant aux millions qui s’étaient déjà enfuis au cours des décennies de guerre et d’agression.
Bien qu’ils parlent amplement de relocalisation, en réalité les pays de l’OTAN ne veulent pas régler le gâchis qu’ils ont créé. Ils préfèrent payer des pays avoisinants pour qu’ils gardent les réfugiés dans des campements ou pour les relocaliser pour qu’ils servent de main-d’oeuvre bon marché dans les usines de transformation de la viande au Canada. L’Union européenne, par exemple, a l’intention de donner 600 millions de dollars aux voisins de l’Afghanistan, y compris l’Iran, le Pakistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan, pour les aider à couvrir les dépenses encourues avec l’arrivée d’Afghans, et 300 millions de dollars pour l’aide humanitaire à ces pays.
Au moins 2,6 millions d’Afghans vivaient déjà à l’étranger comme réfugiés enregistrés, le plus grand nombre s’étant réfugié au Pakistan, en Iran et en Turquie. L’Iran a accueilli 800 000 réfugiés enregistrés et près de 3 millions d’Afghans déplacés. Le Pakistan a 1,4 million de réfugiés enregistrés et près de 2 millions d’Afghans déplacés.
Plus de 3 millions de personnes ont été déplacées en Afghanistan même avant la fin de l’année 2020 et l’agence des réfugiés de l’ONU estime qu’un autre 550 000 Afghans ont été déplacés au sein du pays du début de 2021 jusqu’au 10 août, y compris près de 240 000 personnes déplacées depuis le début du retrait des forces militaires de la soi-disant coalition en mai.
L’histoire de « réussites » du Canada sert en réalité à camoufler l’ampleur du désastre qui sévit en Afghanistan et pour les millions d’Afghans à cause de la participation de l’OTAN à la guerre menée par les États-Unis en Afghanistan.
(Sources : Ministère de la Défense nationale, OTAN, Agence des réfugiés de l’ONU et Human Rights Watch)
(Pour voir les articles individuellement, cliquer sur le titre de l’article.)
Envoyez vos articles, photos, rapports, points de vue et commentaires à redactionpmlc@cpcml.ca.