
Numéro 4312 octobre 2021
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Plainte du NPD contre Élections Canada
Le problème est le système de partis cartellisés qui prive les électeurs de leurs droits
– Anna Di Carlo –
La Presse canadienne rapporte que le Nouveau Parti démocratique (NPD) a déposé une plainte auprès du commissaire aux élections fédérales au sujet de « nombreuses défaillances systémiques des responsables électoraux » lors du scrutin fédéral du 20 septembre. « Élections Canada a manqué à sa responsabilité d’assurer l’admission au droit de vote de tous les électeurs, même et surtout ceux de communautés à faible revenu, ceux qui vivent dans des communautés autochtones et rurales/éloignées et à des personnes handicapées », a affirmé la directrice nationale du NPD Anne McGrath dans une déclaration à la Presse canadienne. Elle ajoute que « ces échecs systémiques d’Élections Canada à s’assurer que chaque personne au Canada puisse participer à notre processus contreviennent à la Loi électorale et doivent être corrigés ». Elle affirme que ces erreurs ont « sérieusement miné la confiance des Canadiens dans notre système électoral ».
Avec ou sans le dépôt d’une plainte, la Loi électorale du Canada prévoit que pour chaque élection générale, « le directeur général des élections retient les services d’un vérificateur — autre qu’un membre de son personnel ou un fonctionnaire électoral — qui, selon lui, est un expert et qui est chargé d’effectuer une vérification et de lui présenter un rapport indiquant si les fonctionnaires électoraux ont exercé correctement les attributions — identifiées par le directeur général des élections — que la loi leur confère ». Mais il faut se demander ce qu’accomplira une enquête et la rétention des services d’un vérificateur par le commissaire aux élections dans ce cas-ci ?
Selon la Presse canadienne, « le NPD est conscient ‘de la pression exercée sur Élections Canada’ pour organiser une élection ‘pendant une crise de santé publique’. Mais Mme McGrath affirme que le travail d’Élections Canada ‘est de faciliter le vote, pas de le rendre plus ardu. »
Pour l’élection fédérale de 2021, Élections Canada a mis en place 7 300 bureaux de vote par anticipation et 61 400 « tables de vote » le jour du scrutin. Il a traité un peu plus d’un million de bulletins de vote par la poste. Il a ouvert 501 locaux et embauché environ 215 000 travailleurs électoraux.
À titre de comparaison, pour l’élection fédérale de 2019, déclenchée à la date prévue par la loi sur les élections à date fixe, Élections Canada avait mis en place 6 166 bureaux de vote par anticipation et un total de 64 671 bureaux de vote. Les bureaux de votes sont les endroits où se trouvent plusieurs « tables de vote », alors si vous comparez les chiffres il est évident que cela allait entraîner des files d’attente plus longues et des désagréments pour les électeurs.
Néanmoins, tout observateur objectif se doit de lever le chapeau à Élections Canada pour avoir réussi cette élection, une « élection surprise » déclenchée par le Parti libéral avec la campagne la plus courte possible, et quand on sait que les libéraux ont rejeté avec arrogance la demande du directeur général des élections qui proposait une campagne de 50 jours plutôt que 36. C’est sans compter l’irresponsabilité collective des partis du cartel qui ont refusé d’adopter les modifications à la loi électorale demandées par Élections Canada pour une élection en situation de pandémie.
Les difficultés encourues étaient multiples. La loi électorale ne permet pas, par exemple, aux directeurs du scrutin de louer des bureaux et des lieux de vote en fonction des spéculations sur le déclenchement d’une élection. Les personnes âgées qui offrent habituellement leurs services pour le travail électoral n’étaient pas autant disposées à travailler pendant la quatrième vague de la pandémie. Les écoles et les églises traditionnellement utilisées n’étaient pas disponibles pour les mêmes raisons. Les installations devaient permettre une distanciation physique. Des lieux tels que les halls d’entrée des immeubles en copropriété, par exemple, n’étaient pas envisageables. Élections Canada a renoncé à installer des kiosques spéciaux sur les campus, étant donné qu’il n’était même pas certain que les étudiants y seraient en présentiel.
Qui est responsable des problèmes qui en résultent pour l’électorat ?
Dans un autre reportage — un article de la CBC qui examine la campagne et l’échec du NPD à gagner plus de sièges — Mme McGrath laisse entendre que la performance de son parti a été affectée par une tactique calculée de suppression de votes du Parti libéral. Elle a déclaré à la CBC : « Une partie de la raison pour laquelle les élections ont eu lieu à ce moment-là était de maintenir un faible taux de participation afin de réélire le gouvernement en place. Je crois vraiment que les jeunes électeurs et les électeurs autochtones, en particulier, ont été privés de leur droit de vote. »
Qui doit donc faire l’objet d’une enquête ? Le parti qui, selon le NPD, a déclenché une élection en faisant de la suppression d’électeurs un facteur de sa stratégie de campagne ? Ou l’agence qui a dû assumer le fardeau de l’administration de cette élection précipitée ?
Le PMLC conclut que le problème est le système de partis cartellisés qui prive tous les Canadiens de leurs droits et les partis du cartel qui se plaignent uniquement quand les arrangements fondés sur le pouvoir et les privilèges ne les favorisent pas spécifiquement. Il ne fait aucun doute que le Parti libéral du Canada prend des décisions sur la base de calculs intéressés. Si le conflit d’intérêts et l’irresponsabilité étaient pris au sérieux, une enquête pourrait être déclenchée pour déterminer pourquoi cette élection surprise a été déclenchée, pourquoi on a permis tout ce gaspillage, et faire payer aux responsables les 610 millions de dollars en dédommagement. Mais les partis du cartel n’ont aucun intérêt à demander une enquête qui pourrait conclure que c’est l’ensemble de la loi électorale qui est en dissonance avec les exigences de l’époque.
Le PMLC mène une enquête permanente sur le processus électoral et politique dominé par un cartel de partis corrompus, qui place leurs intérêts en premier et qui mènent des campagnes dont la caractéristique essentielle est de manipuler le vote pour gagner des sièges. L’existence d’un électorat est devenue un obstacle à leurs ambitions de pouvoir. Il ne faut faire confiance qu’à ceux dont l’intérêt est de résoudre les problèmes auxquels le pays est confronté en investissant le peuple du pouvoir de prendre les décisions qui affectent sa vie.
Investissons le peuple du pouvoir de décision et opposons-nous aux gouvernements de parti !
Tout en oeuvre pour le renouveau démocratique !
Le rapport du coroner sur le décès de Joyce Echaquan au Québec
La nécessité de régler les comptes avec les notions racistes qui sous-tendent les institutions politiques d’aujourd’hui
– Pierre Soublière –
Le 1 octobre, le Bureau du coroner du Québec a publié un communiqué sur le décès de Joyce Echaquan en septembre 2020 intitulé « La coroner Géhane Kamel dépose son rapport d’enquête ». La coroner confirme que Joyce avait bel et bien été ostracisée pendant son séjour final à l’hôpital et que son décès aurait pu être évité.
La coroner souligne que lorsque Joyce s’est présentée au Centre hospitalier de Lanaudière le soir du 26 septembre de l’année dernière pour ses problèmes de santé, elle a été étiquetée comme une patiente en sevrage, ce qui a fait que ses appels à l’aide n’ont pas été pris au sérieux.
En fait, rien n’indiquait qu’elle était en sevrage et il a été démontré au-delà de tout doute lors des audiences qui ont suivi son décès qu’elle ne consommait que les narcotiques dûment prescrits pour ses problèmes de santé. En outre, lorsqu’elle est devenue agitée, elle a été physiquement retenue avec des contentions. Il est dit dans le rapport que le décès de Joyce est dû à un oedème pulmonaire et que d’autres facteurs qui pourraient être en cause dans son décès sont « l’hypotension occasionnée par l’injection de l’Haldol ainsi que les contentions qui ont retenu Mme Echaquan clouée contre sa civière sans possibilité de se redresser, un geste naturel lorsqu’il y a accumulation d’eau sur les poumons ».
Il est aussi question d’un manque de surveillance adéquat en tant que facteur supplémentaire contribuant à son décès. Il est aussi souligné que la Commission Viens, un an avant le décès de Joyce, avait enquêté sur les « relations entre les communautés autochtones et certains services publics » et fait des mises en garde quant aux craintes exprimées par la communauté atikamekw de Matawan à l’égard du Centre hospitalier de Lanaudière quant aux services qui leur étaient prodigués.
La coroner recommande d’emblée que le gouvernement québécois « reconnaisse l’existence du racisme systémique au sein de nos institutions et prenne l’engagement de contribuer à son élimination ». Lors de sa conférence de presse le 5 octobre, elle fait valoir que, bien que la question de racisme systémique ait été montée en épingle par l’Assemblée nationale et les médias, il était important de prendre en compte d’autres recommandations extrêmement pertinentes du rapport, dont la nécessité de travailler de près avec la communauté atikamekw et de régler le problème de pénurie de personnel dans les hôpitaux.
Les droits de peuples autochtones au Canada et au Québec passent au premier plan en ce moment en tant qu’enjeu qui interpelle l’ensemble du corps politique. Les discussions sans fin sur le fait de reconnaître ou pas le racisme systémique semblent futiles, en plus de servir de diversion, puisque le suivi des instances gouvernementales qui le reconnaissent se résume à « faire mieux ». Cette réaction s’apparente à celle qui, devant les crimes horribles commis contre les communautés autochtones, telles que les pensionnats — et, comme il est présentement rapporté, les écoles de jour — tire pour toute conclusion qu’il s’agit d’« erreurs ». Tout cela fait perdre de vue que les gouvernements ne rendent aucun compte face aux recommandations et aux appels à l’action mis de l’avant pour garantir les besoins et les droits des peuples autochtones, y compris celles faites par les commissions qu’ils ont eux-mêmes créées.
Un des 94 appels à l’action de la Commission sur la vérité et la réconciliation est que « tous les gouvernements rejettent les notions servant à justifier la souveraineté européenne sur les peuples et les terres autochtones, telles que la doctrine de la Découverte et terra nullius ». Voilà une recommandation qui va droit au coeur de la question et touche aux fondements-mêmes de la constitution canadienne et des institutions politiques d’aujourd’hui. Dans nos luttes pour les droits de tous, il devient incontournable de discuter des changements que nous devons apporter à ces fondements constitutionnels et institutionnels.
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