Pourquoi l’état des voies ferrées n’est-il pas un sujet de préoccupation nationale?
— Pierre Chénier —
Le 24 août, un train a déraillé dans le village de Nantes, au Québec, à seulement 12,9 kilomètres de la ville de Lac-Mégantic. Il y a six ans, un train sans conducteur a commencé à descendre vers Lac-Mégantic à partir de Nantes, avec 72 wagons qui transportaient 7,7 millions de litres de liquides inflammables, avant de dérailler dans le centre-ville de Lac-Mégantic. L’explosion et l’incendie gigantesques qui ont suivi ont tué 47 personnes et détruit plus de 40 bâtiments. La destruction a forcé 2 000 personnes à quitter leur domicile et a entraîné la fermeture de nombreuses entreprises. La perte pour la ville, au-delà du bilan humain, a été estimée à 1,5 milliard de dollars.
Selon le maire de Nantes, le déraillement de train du 24 août est au moins le troisième dans la région depuis la tragédie de 2013. À peine dix jours avant l’incident du 24 août, la Coalition des citoyens et organismes engagés pour la sécurité ferroviaire de Lac-Mégantic avait sonné l’alarme auprès du Bureau de la sécurité des transports du Canada pour signaler que les réparations devenues nécessaires à l’emplacement exact du déraillement n’avaient pas été effectuées.
Selon la Coalition, le manque d’entretien et de réparation des voies est chose courante dans toute la région de l’Estrie. La Coalition affirme que la compagnie, Central Maine and Quebec Railway, peut faire ce qu’elle veut en toute impunité. Une heure seulement avant le déraillement du 24 août, un autre train de 30 wagons-citernes transportant de l’acide sulfurique, de l’essence, du gaz propane et du bitume est passé sur les mêmes voies sans que les réparations nécessaires n’aient été effectuées.
Le Bureau de la sécurité des transports a informé la compagnie en avril dernier que 253 anomalies de voie devaient être réparées. Le 7 mai, Transports Canada a émis un avis assorti d’un ordre, mais les réparations n’étaient pas terminées lorsque le train a déraillé en août.
Pour diverses raisons, Lac-Mégantic est considéré comme l’un des sites ferroviaires les plus dangereux au Canada. Au moins un maire de la région affirme que le coeur du problème n’est pas l’emplacement ou la géographie, mais le facteur humain. Celui-ci est nié et les sociétés ferroviaires s’autoréglementent. Beaucoup décrient une situation dans laquelle les entreprises ferroviaires agissent avec un mépris total pour le bilan humain dans une atmosphère d’anarchie, d’anticonscience et d’impunité.
L’attitude du Bureau de la sécurité des transports à l’égard du dernier déraillement survenu à Nantes est un exemple de cette impunité. Le Bureau refuse d’enquêter davantage sur l’incident car aucune blessure n’a été signalée et aucune matière dangereuse n’a été déversée. Il faut donc que les gens souffrent comme ceux de Lac-Mégantic pour que les autorités remarquent même un problème avec l’état des voies ferrées ! C’est le facteur antihumain/antisocial qui contrôle la vie et la sécurité des populations. Ceci exprime une contradiction dangereuse entre les conditions et l’autorité. Le temps est venu d’une nouvelle direction !
Pierre Chénier est le secrétaire du Centre ouvrier du PMLC et son candidat dans Châteauguay—Lacolle.
(Sources : La Tribune et d’autres médias locaux)