Entrevue: Line Sirois, coordonnatrice d’Action Chômage Côte-Nord
Des manifestants aux bureaux de Service Canada de Forestville (gauche) et de Baie-Comeau, au Québec, demandent des mesures pour l’élimination du trou noir des travailleurs saisonniers, le 29 novembre 2018.
Le plus grand problème c’est le manque d’accès à l’assurance-emploi. Il se manifeste de plusieurs façons.
Par exemple, on voit de plus en plus de gens qui tombent malades, et ils n’ont droit qu’à 15 semaines de prestations de maladie de l’assurance-emploi. Il y a le problème du trou noir, cette période de temps où les chômeurs sont sans revenus, ayant épuisé leurs prestations et n’ayant pas recommencé à travailler. C’est un problème qui frappe les régions comme la nôtre où prédomine le travail saisonnier. Le gouvernement a accordé cinq semaines supplémentaires de prestations pour faire face au problème du trou noir, mais cela ne suffit pas à éviter cette période où les chômeurs sont sans revenus.
Sur la Côte-Nord, le calcul qui est fait pour recevoir de l’assurance-emploi, avec des taux de chômage faussés, c’est un très grand problème. Comme on offre de l’assurance-emploi selon le taux de chômage officiel, on va demander plus d’heures de travail et donner moins de semaines selon le taux de chômage officiel de la région économique de l’assurance-emploi. Le taux de chômage qui est déclaré n’est pas le taux de chômage réel de la région. La Côte-Nord est incorporée dans une région économique de l’assurance-emploi qui comprend plusieurs régions administratives. Sur la Haute Côte-Nord, par exemple, le taux de chômage réel est d’environ 20 %. Pourtant, dans la région économique dans laquelle on nous a inclus, on nous dit que le taux de chômage est d’environ 6,7 %. Si le taux de chômage reconnu pour la Haute Côte-Nord était 20 % comme il l’est dans la réalité, les gens se qualifieraient après 420 heures et ils auraient droit à 35 semaines de prestations. Présentement, avec le taux de chômage qui nous est attribué, les gens se qualifient après 665 heures pour 15 semaines de prestations. Cela n’a aucun sens.
On trafique les chiffres pour nous en donner le moins possible afin que nos gens quittent la région et aillent travailler ailleurs. C’est un geste délibéré pour nous faire quitter la région. Ils appellent cela la mobilité de la main-d’oeuvre. Ils veulent que les gens migrent vers où sont les emplois. Cela n’a aucun sens non plus que les gens qui tombent malades reçoivent uniquement 15 semaines d’assurance-emploi. Le prestation de maladie est limitée à 15 semaines partout au Canada.
Nous demandons que la prestation de maladie soit relevée à 25 semaines et à 50 semaines dans les cas de maladies plus graves comme le cancer.
Nous demandons que dans les régions comme la nôtre, où prédomine le travail saisonnier, les gens soient admissibles après 420 heures de travail, reçoivent 35 semaines de prestations, avec un taux de prestations de 60 % du salaire alors qu’il est présentement de 55 %.
L’assurance-emploi n’est pas adaptée à la réalité, que ce soient dans les régions ou en ville lorsque les gens travaillent dans des emplois précaires, à 15-20 heures semaine. Ils ne peuvent pas joindre les deux bouts avec cela, et cela prend beaucoup de temps pour obtenir les heures pour être admissibles à des prestations.
Il faut revoir l’assurance-emploi d’un bout à l’autre. C’est un système qui ne reflète pas la réalité et ne comble plus les besoins des travailleurs. L’assurance-emploi doit être une assurance pour les travailleurs quand il y a un manque d’emplois.
Le manque d’accessibilité au régime d’assurance-emploi est le noeud du problème.