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La loi 9 du gouvernement de l’Alberta
et la question des droits des travailleurs
Un tribunal albertain accorde
une injonction contre la loi 9
Piquetage d’information contre la loi 9 devant l’hôpital Misericordia à Edmonton le 30 août 2019
Le Syndicat des employés provinciaux de l’Alberta (AUPE) a réussi à obtenir une injonction contre la loi 9, Loi sur le report de l’arbitrage salarial dans le secteur public. Le gouvernement Kenney a immédiatement porté cette décision en appel le 30 juillet. La cour d’appel a dit qu’elle décidera bientôt si l’injonction reste en place.
À la suite de cette injonction, les audiences en arbitrage sur la réouverture des salaires des travailleurs du secteur public ont été remises à l’ordre du jour et se sont terminées le 12 août. La décision de l’arbitre ne peut pas être rendue publique avant que la Cour d’appel de l’Alberta n’émette sa décision.
Le juge Macklin a dit dans sa décision confirmant l’injonction que la loi 9 rend impossible la négociation collective entre les représentants du gouvernement et des employés. Il conclut que si les gouvernements peuvent déchirer des conventions collectives comme bon leur semble, la négociation collective perd son sens.
Le juge a dit que la loi 9 annule de façon unilatérale les échéanciers prévus pour l’arbitrage, qui sont un aspect significatif de la convention collective. Le report de l’arbitrage « est entièrement dû à un geste unilatéral d’une des deux parties [le gouvernement de l’Alberta] et ne peut pas se comparer à un délai qui serait dû à un problème de planification, à la maladie ou la non-disponibilité de témoins… Ayant renoncé à son droit de grève et accepté deux années sans augmentation de salaires, [l’AUPE] a perdu le seul avantage qu’il ait gagné, soit l’arbitrage à des dates précises. En plus, il pourrait être difficile, sinon impossible, de négocier avec confiance des termes et des conditions précises d’une convention collective tout en sachant qu’à tout moment, une fois que la convention est signée, ces termes et ces conditions peuvent être changés ou annulés unilatéralement par une loi. »
(Photos: AUPE)
L’injurieuse loi 9 du gouvernement albertain
Le gouvernement Kenny en Alberta a adopté la loi 9, Loi sur le report de l’arbitrage salarial dans le secteur public, le 28 juin.
La loi 9 abolit de façon unilatérale des clauses de la convention collective qui s’applique à 180 000 travailleurs du secteur public en Alberta. Les travailleurs et leur syndicat, le Syndicat des employés provinciaux de l’Alberta (AUPE), n’ont pas consenti à ces changements et ont organisé une vaste opposition à ce geste du gouvernement. La loi 9 est un sujet de préoccupation pour les travailleurs de tout le Canada.
Le gouvernement Kenney s’attaque aux clauses de la convention qui prévoient la tenue d’arbitrage sur les salaires au plus tard le 30 juin. La loi 9 reporte l’arbitrage sur les salaires pour permettre à ce gouvernement d’adopter une loi qui dicte les salaires du secteur public sans négociation et sans le consentement des travailleurs du secteur public. Tout ceci enfreint des contrats négociés de bonne foi avec les syndicats du secteur public, qui avaient été acceptés par le gouvernement précédent et les travailleurs.
De nombreux travailleurs ont dit que bien que la loi 9 vise spécifiquement les travailleurs du secteur public, le changement unilatéral d’une convention collective est une attaque contre toute la classe ouvrière et son droit à un mot décisif et à un contrôle sur ses salaires, ses conditions de travail et son niveau de vie général. Chose certaine, la loi 9 bafoue le droit des travailleurs de négocier leurs conditions d’emploi et d’en bénéficier dans un climat d’équilibre et non d’arbitraire et de diktat.
Un juge de la Cour du banc de la Reine cite une décision de la Cour suprême
Dans sa décision par laquelle il suspend la loi 9 du gouvernement de l’Alberta, Loi sur le report de l’arbitrage salarial dans le secteur public, le juge Macklin cite la décision de la Cour suprême du Canada dans la cause Association de la police montée de l’Ontario c. Canada (Procureur général), [2015] 1 SCR 3, 2015 SCC 1).
Le juge Macklin écrit : « La Cour [suprême] a confirmé que la protection d’un processus véritable de négociation collective requiert que les employés aient la capacité de poursuivre leurs objectifs et que, un des objets fondamentaux de l’al. 2d) est donc de protéger l’individu contre tout isolement imposé par l’État dans la poursuite de ses fins. Cette garantie permet de protéger les individus contre des entités plus puissantes. En s’unissant pour réaliser des objectifs communs, des personnes sont capables d’empêcher des entités plus puissantes de faire obstacle aux buts et aux aspirations légitimes qu’elles peuvent avoir. Le droit à la liberté d’association confère donc certains pouvoirs aux groupes vulnérables et les aide à corriger les inégalités au sein de la société. Il protège ainsi les groupes marginalisés et favorise la formation d’une société plus équitable. [para. 58][31]. La capacité d’une partie de changer unilatéralement les termes d’une convention collective soulève également le problème sérieux de savoir si l’équilibre des forces qui est protégé par al.2 (d) a été enfreint. »
Le Renouveau suivra attentivement les procédures juridiques de la Cour d’appel et possiblement de la Cour suprême et informera les lecteurs de la façon dont sont présentés les arguments.
Des piquetages d’information sur la loi 9 partout en Alberta dans le cadre d’un « été d’actions »
Lethbridge, 19 août 2019
Le Syndicat des employés provinciaux de l’Alberta a organisé un été d’actions pendant lequel des piquetages militants ont été dressés devant les hôpitaux et d’autres endroits de travail en opposition à la loi 9 antiouvrière du gouvernement Kenney. Les travailleurs ont dit Non ! à la loi 9 et aux attaques du gouvernement Kenney contre leurs droits et les services publics essentiels aux Albertains. Des milliers de travailleurs ont participé aux piquetages devant les hôpitaux de Calgary, Camrose, Edmonton, Lacombe, Lamont, Leduc, Lethbridge, Tofield, Two Hills, Stony Plain, Vegreville et Wetaskiwin.
Des membres des Infirmières unies de l’Alberta, de l’Association des sciences de la santé de l’Alberta et du Syndicat canadien de la fonction publique, qui représentent aussi les travailleurs d’hôpitaux, se sont joints en grand nombre aux lignes de piquetage. Des travailleurs de plusieurs autres syndicats ont aussi participé. Des travailleurs ont débrayé en masse sur leur heure de lunch pour participer aux piquetages. Ils ont affirmé leur détermination à défendre leurs droits et les services publics qu’ils fournissent contre l’offensive antisociale du gouvernement Kenney. D’une seule voix, ils ont dit Non ! au diktat du gouvernement et à son mépris de l’état de droit et de leurs droits. Ils ont dit Oui ! à leur droit d’avoir un mot à dire sur leurs salaires et leurs conditions de travail. Avec leur participation massive et leur militantisme aux actions d’été, les travailleurs ont affirmé leur détermination à défendre leurs droits et à ne pas accepter le diktat du gouvernement.
Hôpital Misericordia, Edmonton, 30 août 2019
Yellowhead, 16 août 2019
Cold Lake, 10 août 2019
Calgary, 31 juillet 2019
Red Deer, 29 juillet 2019
(Photos: AUPE)
À propos de l’imposition de limites aux droits des travailleurs au nom de l’intérêt public — un commentaire
— Peggy Morton —
Les gouvernements et les tribunaux estiment que le droit des travailleurs du secteur public de négocier collectivement et de définir leurs conditions d’emploi doit être « limité de manière raisonnable » en raison d’un conflit apparent avec l’intérêt public. Les gouvernements et les tribunaux se donnent le droit de définir les « limites raisonnables » de la négociation collective dans le secteur public en raison de ce prétendu conflit avec l’intérêt public. Ils définissent l’intérêt public en fonction des intérêts privés de l’oligarchie financière.
Le conflit déclaré entre les droits des travailleurs et l’intérêt public est également étendu à l’intérêt national, comme le gouvernement libéral Trudeau l’a fait concernant les grèves tournantes des travailleurs des postes en novembre dernier. Le gouvernement libéral, dans « l’intérêt national », a imposé la loi C-89, la Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux, pour mettre fin aux grèves tournantes, ce qui a empêché concrètement les travailleurs des postes d’utiliser l’arme du retrait de leur capacité de travailler pour forcer la direction à négocier afin de résoudre les problèmes en suspens dans le cadre d’une nouvelle convention collective. Là encore, l’intérêt national est défini par ceux qui sont en contrôle et non par les conditions concrètes, les besoins et les droits des travailleurs.
Le gouvernement limite également le droit des travailleurs du secteur privé à la négociation collective dans les confins et le point de référence d’un intérêt public ou national autoproclamé, comme ce fut le cas des travailleurs ferroviaires et d’autres. Le « droit de propriété » est également invoqué pour limiter les droits fondamentaux des travailleurs du secteur privé.
Dans les « limites raisonnables » de son point de référence qui met en conflit les droits des travailleurs et l’intérêt public et national défini par l’oligarchie financière, la Cour suprême et les tribunaux inférieurs ont confirmé le « droit » des gouvernements d’imposer les salaires et les conditions de travail des travailleurs sans le consentement des personnes touchées. Cela s’est produit en dépit des beaux discours au sujet d’un droit garanti par la Charte à un processus de négociation collective et du droit de grève.
Le gouvernement Kenny en Alberta a déclaré que l’élection lui a donné un mandat de « limiter raisonnablement » la convention collective en vigueur des travailleurs du secteur public. Cela exprime le contrôle dont dispose le gouvernement pour définir l’intérêt public et imposer sa définition aux travailleurs.
Un tribunal albertain a conclu que la loi 9 allait au-delà de son point de référence des « limites raisonnables » et de la définition de l’intérêt public et a accordé une injonction permettant la tenue de l’arbitrage de réouverture des salaires. Toutefois, l’injonction n’a pas empêché le gouvernement de faire appel de la décision devant une juridiction supérieure et, en cas d’échec, d’adopter une nouvelle loi imposant directement un contrôle des salaires aux 180 000 travailleurs. Cette violation des droits des travailleurs fait appel à des termes trompeurs sur la défense de l’intérêt public selon des « limites raisonnables », sans révéler qui définit l’intérêt public, alors que l’intention véritable est de s’attaquer aux salaires et aux conditions de travail de la classe ouvrière et de porter atteinte à ses droits.
Les travailleurs de tout le Canada devraient réfléchir sérieusement à cette situation. La question se résume à qui contrôle et qui décide. Lors de cette élection, les travailleurs doivent s’exprimer avec force sur ces questions importantes. Investissez-vous du pouvoir dès maintenant!
Peggy Morton est candidate du PMLC dans Edmonton-Centre à l’élection fédérale.
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