Lettre au ministre des Affaires étrangères Marc Garneau
Le Canada ne doit pas se joindre à la « déclaration commune » des États-Unis qui attaque Cuba!
– Réseau canadien pour Cuba –
Je vous écris au nom du Réseau canadien pour Cuba (RCC), qui représente les organisations d’amitié et de solidarité entre le Canada et Cuba, de Vancouver à Halifax, et qui compte plus de 50 000 membres. Deux des principaux objectifs du RCC sont de mettre fin aux sanctions économiques des États-Unis contre Cuba et de veiller à ce que les relations du Canada avec Cuba soient fondées sur l’égalité et le respect de l’indépendance, de la souveraineté et du droit à l’autodétermination de la nation insulaire.
Nous, au Réseau canadien pour Cuba, sommes préoccupés par la pression extrême et humiliante que le gouvernement des États-Unis exerce sur des pays tiers pour qu’ils soutiennent une déclaration commune – qu’il a rédigée – condamnant injustement Cuba.
Nous demandons au gouvernement du Canada de ne pas se joindre à cette attaque sans précédent, injustifiée et haineuse contre Cuba.
Non seulement cette soi-disant déclaration et demande commune est une déformation pernicieuse de ce qui s’est passé à Cuba le 11 juillet, mais elle empeste l’hypocrisie et le deux poids, deux mesures.
Aucune déclaration de ce type n’a été émise, par exemple, lorsque les forces de police colombiennes ont tué au moins 34 personnes lors des récentes manifestations dans ce pays. Ou dans le cas du Chili en 2019, lorsque des centaines de personnes ont été aveuglées par les forces de sécurité. De nombreux autres exemples peuvent être fournis.
Si Washington est vraiment intéressé par les droits humains du peuple cubain, alors il devrait mettre fin clairement et sans ambiguïté à la guerre économique et aux autres agressions des États-Unis contre Cuba.
Il est important de souligner que le 23 juin dernier, pour la 29e fois consécutive, la communauté internationale s’est massivement rangée du côté de Cuba, en votant à 184 contre 2 à l’Assemblée générale des Nations unies, rejetant de façon retentissante la guerre économique des États-Unis contre Cuba comme une violation flagrante du droit international. Le Canada a une fois de plus rejoint les rangs des nations du monde qui ont rejeté catégoriquement la politique coercitive, unilatérale et extraterritoriale des États-Unis.
Depuis le début des années 1960, le gouvernement des États-Unis a imposé à Cuba le plus long régime de sanctions de l’histoire. Il ne serait pas exagéré de décrire la politique de Washington comme une guerre économique contre le peuple cubain. Les sanctions économiques des États-Unis — un blocus économique — constituent le principal obstacle au développement social et économique de Cuba ; le coût pour l’héroïque nation insulaire a été et reste immense : plus de 130 milliards de dollars.
Sous la conduite du président américain Donald Trump, la guerre économique contre Cuba a atteint des niveaux sans précédent avec l’ajout de 243 mesures distinctes et vindicatives ciblées contre la nation insulaire. L’administration du président Joseph Biden poursuit cette guerre économique implacable contre Cuba.
Dans la poursuite de sa politique criminelle et immorale, le gouvernement des États-Unis exerce des pressions et force d’autres pays à participer à son régime de sanctions économiques contre Cuba.
Le Canada n’est pas à l’abri de ces pressions. Par exemple, en 2017, le Bureau du contrôle des avoirs étrangers du département du Trésor des États-Unis a imposé une amende de 87 255 dollars à la Société américaine de financement Honda (AHFC) parce que celle-ci avait approuvé et financé, entre février 2011 et mars 2014, la location par Honda Canada Finance Inc. de 13 voitures à l’ambassade de Cuba au Canada.
Également, en 2020, les Services Financiers Western Union (Canada) Inc. ont décidé de mettre fin aux transferts de fonds du Canada à Cuba. Dans une déclaration à Radio-Canada, l’entreprise a dit que cette décision avait été prise « en raison des défis uniques que pose l’exploitation de services de transfert de fonds de pays autres que les États-Unis vers Cuba ». Non seulement cette décision a occasionné — et occasionne toujours — d’importants dommages aux relations de peuple à peuple et aux relations entre le Canada et Cuba, mais elle est aussi en violation de la souveraineté du Canada en élevant la loi américaine au-dessus de la loi canadienne.
En pleine pandémie de COVID-19 et face à la condamnation internationale de sa guerre contre Cuba, Washington a non seulement maintenu le cruel et vindicatif blocus économique, financier et commercial de Cuba mais a également imposé cinquante mesures punitives supplémentaires, limitant sévèrement l’accès de la nation insulaire aux équipements et autres fournitures nécessaires pour préserver la santé des Cubains. Malgré ces défis de taille, Cuba a l’un des taux de mortalité liés à la COVID-19 les plus bas — 0,68 % — au monde.
Pourtant, au milieu de cette agression et de cette situation économique extrêmement difficile, le gouvernement cubain non seulement continue de protéger et de préserver la santé de ses citoyens grâce au développement de ses propres vaccins et traitements, mais il continue aussi de diriger la lutte mondiale contre le coronavirus. Près de 4 000 professionnels médicaux cubains dans pas moins de 39 pays et territoires ont participé et participent en première ligne à la lutte contre la COVID-19 en Amérique latine, dans les Caraïbes, en Afrique, Asie, Europe, et au Moyen-Orient.
L’échec de Washington à isoler Cuba dans les relations internationales et l’opinion publique est illustré de manière saisissante par les nombreuses nominations du contingent médical international cubain — la Brigade Henry Reeve — pour le prix Nobel de la Paix 2021.
Cuba est assiégée. L’objectif est d’affamer le peuple cubain jusqu’à ce qu’il se soumette. C’est ce qu’a exprimé sans ambiguïté Lester D. Mallory, vice-secrétaire d’État et architecte de la politique des États-Unis envers Cuba, dans une note de service du Département d’État des États-Unis, désormais déclassifiée, le 6 avril 1960 : « Le seul moyen prévisible d’aliéner le soutien interne est le désenchantement et la désaffection fondés sur l’insatisfaction et les difficultés économiques… tous les moyens possibles devraient être entrepris rapidement pour affaiblir la vie économique de Cuba… refuser de l’argent et des fournitures à Cuba, diminuer les salaires monétaires et réels, provoquer la faim, le désespoir et le renversement du gouvernement. »
Cet effort pour asphyxier Cuba est une violation flagrante des droits humains du peuple cubain et une violation intolérable du droit à l’autodétermination.
L’objectif ultime de Washington est la négation et l’extinction du droit de Cuba à l’autodétermination, à la souveraineté et à l’indépendance. Cet objectif s’accompagne d’une campagne de subversion. Le gouvernement des États-Unis a ouvertement versé des millions et des millions de dollars à de prétendues personnalités de l’opposition dans le seul but de déstabiliser et de miner la société et les institutions cubaines.
Le Réseau canadien pour Cuba réaffirme le droit inaliénable, inviolable et inextinguible du peuple cubain — et de tous les autres peuples — de décider de son avenir et de son système politique, économique et social, suivant ses propres termes, sans ingérence extérieure d’aucune source, un droit consacré par la Charte des Nations unies et de nombreux autres traités, pactes et instruments juridiques internationaux.
De plus, quelles que soient leurs positions politiques ou idéologiques, les Canadiens sont en faveur de l’établissement d’une véritable amitié avec la nation insulaire : des relations fondées sur le respect mutuel, l’égalité et la reconnaissance du droit de Cuba à l’autodétermination et à la souveraineté. Cela se reflète dans les plus de 2 500 Canadiens — surtout depuis les événements du 11 juillet — qui ont signé et appuyé la pétition parlementaire condamnant les sanctions économiques de Washington contre Cuba.
En terminant, je tiens à vous remercier d’avance pour l’attention que vous porterez à ces questions. Si vous avez des questions, n’hésitez surtout pas à me contacter.
Sincèrement,
Isaac Saney,
Co-président et porte-parole national, Réseau canadien pour Cuba