Dans l’actualité le 29 avril
« Rolling Thunder Ottawa »
À quoi les citoyens et les résidents doivent-ils s’attendre ?
Les médias indiquent qu’un groupe de motocyclistes se faisant appeler « Rolling Thunder Ottawa » prévoit se rassembler à Ottawa cette fin de semaine, du 29 avril au 1er mai. Cela évoque le spectre du « convoi de la liberté », qui a occupé la ville pendant une longue période, du 22 janvier au 23 février, dans lequel étaient impliqués toutes sortes de militaires, de policiers et de mercenaires en service actif ou anciens, ainsi que toutes sortes de gens criant à la liberté contre les mandats de vaccination et réclamant des systèmes de santé alternatifs et une multitude d’autres choses. Du point de vue de la majorité des résidents d’Ottawa, un problème central soulevé par le « convoi de la liberté » était de savoir ce qu’un citoyen ou un résident fait lorsque ses droits ne sont pas défendus par l’État et, pire encore, lorsque l’État lui-même est contre eux. C’est effectivement une grave question.
Cette situation a débordé sur Calgary, où des manifestations hebdomadaire de type « convoi de la liberté » se poursuivent depuis un an dans un quartier résidentiel et un quartier d’affaires. Finalement, le maire a émis une injonction contre toutes les manifestations non autorisées, prenant ainsi tout le monde dans ses filets, qu’il s’agisse de racistes et de fascistes qui ne devraient pas avoir le droit à la parole ou de s’organiser, de simples individus turbulents qui ont sauté dans le mouvement pour leurs propres raisons ou de citoyens et de résidents dont les droits doivent être garantis. C’est là le coeur du problème. Qu’est-ce qui constitue de la propagande haineuse, qui décide des critères et que faut-il faire à ce sujet ?
À l’heure actuelle, ce sont des personnes occupant des positions de pouvoir et de privilège qui, sur la base de croyances idéologiques personnelles, déclarent les règles au fur et à mesure et agissent comme juge, jury et bourreau au nom de grands idéaux. Cela ne doit pas passer !
Même si ce convoi de motos, qui s’appelle « Thunder Rolling Ottawa », ne prétend pas avoir de revendications et insiste spécifiquement sur le fait qu’il n’a aucune revendication liée aux mandats de la COVID, le scénario est déjà rempli des souvenirs du cauchemar auquel ont été confrontés les citoyens et les résidents d’Ottawa pendant le « convoi de la liberté » .
Lors d’une entrevue radiophonique à l’émission de Evan Solomon, l’organisateur Neil Sheard a déclaré que l’événement a pour but de « redonner de la dignité » au Monument commémoratif de guerre du Canada « profané par les pouvoirs en place », c’est-à-dire l’installation d’une clôture autour du monument pendant le « convoi de la liberté ».
« Nous avons travaillé avec la ville, avec la police, et nous avons maintenant un parcours, et tout est réglé », a déclaré Neil Sheard, qui a précisé que l’itinéraire ne consisterait pas à contourner le monument, mais que les motards pourraient « faire un petit salut … en passant par Mackenzie, en traversant le pont Mackenzie, en redescendant sur Rideau et en repartant … ».
Le 25 avril, le groupe a publié sur son site Web une déclaration indiquant qu’il était « prudemment optimiste » quant à la possibilité que la police d’Ottawa parvienne à un accord avec lui pour établir un itinéraire permettant à entre 500 et 1 000 motocyclettes de se rendre dans la Cité parlementaire pour une événement du 29 avril au 1er mai.
Le même jour, sans qu’il soit possible de savoir quelle déclaration a été faite en premier, le Service de police d’Ottawa a émis une déclaration qui dément toute suggestion que la police ferait autre chose que de « prendre contact » avec les organisateurs de Rolling Thunder. « Nous agissons toujours ainsi », lit-on dans le communiqué. « Cela n’est pas dans l’intention d’appuyer une cause particulière, mais plutôt d’assurer qu’il y ait des lignes de communication bien établies et que les questions de sûreté publique soient abordées », précise la déclaration.
Les lignes de communication semblent être tout sauf claires.
Le Service de police d’Ottawa dit qu’il s’adressait également aux particuliers « ayant l’intention de manifester leur opposition à cet événement ». « Chacun sera traité équitablement », indique le communiqué et précise : « La police a pour rôle de demeurer impartiale, de veiller sur la sûreté publique et de faire l’application des lois pertinentes. » Dire que les forces de l’ordre sont neutres à tout moment est en soi une farce. Même si elles suivent une règle de droit, les lois sont surtout favorables à l’État et aux intérêts qu’il soutient. Aujourd’hui, alors que l’anarchie règne et que tout le monde, des responsables gouvernementaux aux services correctionnels en passant par la police et les forces armées, est enclin à parler en dehors de son mandat et à donner son avis personnel sur des questions préoccupantes, de telles déclarations sont encore plus dénuées de sens. Elles ne rassurent certainement pas les citoyens et les résidents, qui sont tous laissés à eux-mêmes.
Le Service de police d’Ottawa a également déclaré que son rôle est d’appuyer et de faire respecter la position de la Ville d’Ottawa qui interdit « des manifestations, rallyes or activités avec véhicules à moteurs au sein de secteurs désignés du centre-ville. Ces secteurs comprennent les alentours de la Colline du Parlement et le Monument commémoratif de guerre du Canada ». Le Service de police d’Ottawa a annoncé que la GRC, la Police provinciale de l’Ontario et d’autres services de police municipaux apporteront leur soutien et que « des intersections contrôlées, des fermetures routières, le remorquage des véhicules et les contraventions » feront partie de la stratégie d’application prévue pour assurer la sûreté publique.
En d’autres termes, citoyens et résidents, zones résidentielles et quartiers d’affaires, prenez garde !
Tout organisateur, dit la police, « sera tenu responsable de ses actes d’avant, de durant et d’après les événements ». Rolling Thunder affirme que la police « sera tenue responsable devant un tribunal de ses actions avant, pendant et après les événements ».
La police va plus loin en disant : « Nous continuons à surveiller les commentaires en ligne et de source générale en lien avec tous les événements. » Cela signifie-t-il qu’elle ne surveillera pas les échanges privés ? Ce n’est pas clair. « Les comportements menaçants ou intimidants feront l’objet d’une enquête et soumis à des frais lorsque cela est justifié », indique le communiqué de la police. De plus le communiqué informe que « des équipes d’enquête, y compris notre Unité des crimes haineux, se trouvent sur les lieux, s’affairant à recueillir des éléments de preuve et à porter des accusations ».
Selon le communiqué, « depuis l’expulsion de la manifestation illégale » (c’est-à-dire le « convoi de la liberté »), elle a veillé sur le déroulement d’une centaine de manifestations. « Nous protégerons toujours les droits individuels de manifester légalement et pacifiquement, conformément à la Charte des droits et libertés », précise le communiqué.
Enfin, la police informe que les résidents et les commerçants doivent s’attendre à des ralentissements de la circulation et à la possibilité de restreindre l’accès à la zone désignée « exclusivement aux piétons ». Elle ajoute qu’il y aura une présence policière accrue dans une partie rurale du chemin Eagleson où « nous sommes conscients » que certains des participants de Rolling Thunder se rassembleront.
La déclaration de Rolling Thunder, publiée alors qu’il affirme être encore « prudemment optimiste », dit : « Nous ne soutenons pas les blocages, l’obstruction de la police, les dommages à la propriété, ou la haine et le vitriol dirigés vers les résidents d’Ottawa. Nous encourageons également tous les participants à Rolling Thunder Ottawa à [respecter les lois]. »
La déclaration, qui parle du « convoi de la liberté » comme étant la « manifestation légitime à Ottawa », affirme qu’il a été ciblé par « des provocateurs, des saboteurs et des embellisseurs pour ternir le mouvement pacifique et épris de liberté ». Rolling Thunder demande aux participants de signaler toute action illégale dont ils seraient témoins à l’agent de police le plus proche.
Par ailleurs, le recours à la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement Trudeau pendant le « convoi de la liberté » est étudiée par le Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise. Le mandat du comité est d’examiner « l’exercice des pouvoirs et l’exécution des tâches et des fonctions en vertu d’une déclaration d’urgence ».
Le comité a tenu sa première réunion à huis clos le 14 mars et a déposé son premier rapport au Parlement le 22 mars, le seul contenu étant d’informer que « le comité a l’intention de déposer des rapports supplémentaires à une date ultérieure ».
Le comité semble engagé dans une discussion prétentieuse qui ne clarifie rien, et surtout pas le problème qu’il tente de résoudre. Lors de sa troisième réunion, le 29 mars dernier, les conservateurs ont déclaré qu’il « appartiendrait » au Comité d’interpréter son mandat de manière à reconnaître son « rôle bien reconnu de grand enquêteur de la nation ».
Philippe Dufresne, légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes, a déclaré aux membres : « L’idée de ‘grand enquêteur de la nation’ … a certainement été citée et incluse par la Cour suprême du Canada en reconnaissance de l’important travail de la Chambre et des comités pour demander des comptes au gouvernement et lui permettre de faire son travail. »
Les Canadiens sont obligés d’attendre le verdict des grands inquisiteurs, ce qui n’est certainement pas une image qui évoque le fait de faire partie de l’équation pour décider de ce qui les attend au fil des événements.
Le Renouveau, affiché le 29 avril 2022.
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